Question d'origine :
Bonjour,
le génie parle ?
Réponse du Guichet
Oui, oui, le génie parle dans le long métrage d'animation Aladdin et ses premières paroles sont : "Aie des millénaires, cela vous fout un de ces torticolis …"
Mais ce n'est certainement pas la réponse souhaitée et nous ne pouvons que vous encourager à préciser votre pensée !
Bonjour,
Nous pouvons effectivement vous certifier que le génie parle dans le long métrage d’animation Aladdin puis dans Retour de Jafar ou Alladin et le roi des voleurs … reste à savoir s’il pratique l’art divinatoire auquel cas nous ferions appel à lui pour comprendre le sens de votre question.
En effet, nous ne réussissons pas à cerner votre demande et nous nous trouvons donc dans l’impossibilité de vous apporter une réponse satisfaisante. Ceci étant dit, nous nous reporterons à la définition apportée par Baldine Saint Girons dans Encyclopædia Universalis :
À l'éloge réitéré depuis l'Antiquité jusqu'à la fin du XVIIe siècle du génie comme «divine ardeur», «fureur démoniaque», «sublime folie», «inspiration surhumaine», fait place au début du XVIIIe une description positive du genius, de ses causes et de sa nature. Un peu postérieure à la renaissance (grâce à la traduction que donna Boileau du Peri upsous en 1674) du concept de «sublime», une curieuse et nouvelle fortune du «génie» commença lorsque l'abbé Dubos, faisant, en 1719, la première tentative de physiologie de celui-ci, le conçut comme une «facilité» naturelle pour apprendre et inventer, facilité «que la crainte de mourir de faim ne peut donner».
L'article paru en 1757 dans l'Encyclopédie et attribué à Diderot établit une nette distinction entre l'homme génial, dont il importe de faire la psychologie, voire la physiologie, et l'œuvre géniale, qui nous invite à une analyse critique, en particulier littéraire et picturale. Loin de s'accrocher à la matérialité des sensations et à l'objectivité des souvenirs, l'homme de génie trouve des motivations d'un autre ordre que le reste des hommes. L'universalisation de la sensibilité, l'amplification de la mémoire et de l'imagination, l'exaspération de la vision engendrent chez lui le désir de «donner corps aux fantômes» qui le hantent.
Diderot revient sur cette définition dans le Paradoxe sur le comédien, où la sensibilité apparaît comme faiblesse d'organisation, «affaire d'âme et non de jugement», bref comme une qualité des plus aisées à contrefaire et ne pouvant constituer l'apanage du génie. En outre, dans un texte de 1772, le travail de sublimation non seulement de la sensibilité, mais aussi de la fantaisie et de la vue est envisagé par Diderot sous une forme strictement négative. S'efforçant de définir cette «je ne sais quelle qualité d'âme particulière» qui est propre au génie, l'esthéticien ne trouve aucun terme qui lui convienne; mais il évite cependant une réduction définitive au mystérieux physiologique dans la mesure où il dote le génie de «l'esprit observateur», qui possède lui-même quatre caractères: la spontanéité, la divination, la diversification, la faillibilité. Le génie est ce vrai «sixième sens» que cherchait Hutcheson; il s'exerce sans contention, pour reprendre le terme de Dubos, diffère suivant les états, comme l'avait montré Saint-Évremond, et ne garantit pas des chutes, ainsi que l'avait souligné le pseudo-Longin.
Mais la notion essentielle mise en évidence par Diderot à propos du génie est celle de «modèle idéal», au moyen de laquelle l'abbé de Batteux tentait de dépasser l'opposition entre vérité dans la nature et vérité dans l'art: «Le génie, écrivait-il, ne doit pas imiter la nature telle qu'elle est» Diderot va plus loin: la place du génie n'est pas au théâtre, mais au parterre, parce que son rôle est de «saisir» et de «conserver» ces temps forts de la nature par lesquels, dans une improvisation heureuse, elle semble se dépasser elle-même. «Ce n'est pas que la pure nature n'ait ses moments sublimes, mais, s'il est quelqu'un sûr de saisir et conserver leur sublimité, c'est celui qui les aura pressentis d'imagination ou de génie, et qui les rendra de sang-froid.» Diderot disait du grand comédien: «Il n'est pas un avare, il est l'avare.» De même en va-t-il du génie, qui échappe à toute comparaison pour devenir modèle en son genre.
Dans la lignée de Diderot et du Sturm und Drang, Kant définit le génie comme «talent ou disposition innée par laquelle la nature donne des règles à l'art». Stück Natur, comme disait Goethe, morceau encore inégalé d'une nature supérieure, l'ingenium du génie ne ressemble à aucun autre; et il devient par là même source d'une nouvelle mesure pour le jugement.
Mais, si le génie donne ses règles à l'art, il le fait en tant que nature, c'est-à-dire sans passer par l'intermédiaire de la catégorie comme source de détermination. Causalité aveugle, puisque dépourvue de concept, il ignore les conditions de sa création. Mais sa fantaisie «court d'un bout de l'univers à l'autre pour rassembler les idées qui lui appartiennent». Et ce qu'on appelle génie n'est, pour reprendre l'expression de l'éveilleur de Kant, Hume, qu'une «faculté magique de l'âme», qui soumet «d'un coup» le monde des idées à sa vue.
C'est pourquoi l'éloge du génie demeure tempéré par le désir propre au philosophe de soumettre l'imagination au jugement, même si celui-ci tire sa richesse et ses forces de la première. Le goût détermine, harmonise, solidifie. «Si donc, en un conflit opposant ces deux qualités, quelque chose doit être sacrifié dans une œuvre, cela devrait plutôt concerner ce qu'il y a de génial; et la faculté de juger [...] permettra plutôt qu'on porte quelque préjudice à la liberté et à la richesse de l'imagination qu'à l'entendement.»
«Les gens de génie sont détestables», écrivait Diderot. Ils choquent l'ordre établi et s'imposent envers et contre la bienséance. C'est pourquoi toute théogonie qui se respecte suscite de mauvais génies, afin que les bons soient moins aisément déchus de leur piédestal.
Certes, remarque Nietzsche, le culte du génie est exigé par notre vanité; bien plus, il l'est par notre goût. Le monde tient ses couleurs du génie; et l'homme sait n'avoir de dignité que grâce à cette étincelle de génie par laquelle il contemple ce que Schopenhauer appelle un «autre univers», et Freud, après Fechner, une «autre scène».
Toute apologétique du génie doit donc s'accompagner d'une théorie économique des gains et des pertes. Ainsi, Schopenhauer, affirmant le primat de la connaissance intuitive sur la connaissance discursive, est contraint d'élaborer les concepts d'«excédent de force», d'«anormalité», de «faculté contre nature».
Un certain «manque» caractérise dès lors le génie, manque dont Nietzsche souligne la nature organique. Il oppose au génie, qui, avant toutes choses, crée et veut créer, celui qui se laisse féconder et enfante: le génie attend les «500 mains nécessaires pour maîtriser le kairos, le moment propice». Et Nietzsche reproche à Schopenhauer de ne pas avoir osé voir l'immoralité foncière du génie, sa parenté avec l'instinct, qui se situe par-delà le bien et le mal, bref le caractère tyrannisant du génie.
Comment ne point songer ici aux pulsions, ces tyrans du moi dont la psychanalyse a donné la théorie généralisée? Le propre du génie serait de parvenir à affirmer «un» génie en orientant dans une même direction les forces pulsionnelles démoniaques entre lesquelles toute subjectivité se trouve écartelée.
Cependant, le «désemparement de l'intelligence», qui, pour reprendre l'expression freudienne, est l'effet spécifique du génie, vient sans doute reproduire un élément appartenant à la constitution de ce dernier ou à une strate de son histoire. Désordre organique et tension émotionnelle ne sont point sans accompagner la mutation géniale. Aussi bien les conditions d'accès au génie doivent-elles refléter quelque chose des conditions d'accès du génie à lui-même et porter l'estampille du degré plus ou moins grand de contention qui caractérise l'individu génial, suivant que celui-ci penche davantage vers le beau ou vers le sublime.
Le Centre national de ressoureces textuelles et lexicales apporte également diverses définitions.
De notre côté, perdue dans les dédales de notre pensée, nous voici transportées vers un autre univers, celui du Génie du christianisme de Chateaubriand, « les Muses parlent et entendent toutes les langues…» ou d’Albe qui dans Les Œuvres de Goethe s’adresse à Silva « Mon mauvais génie parle par ta bouche. Il ne vient pas ! Il diffère jusqu’au dernier moment pour se déclarer! Il ose ne pas venir ! Donc, cette fois, contre toute apparence, le sage a été assez sage pour être téméraire ! ».
Il ne nous reste plus qu’à vous proposer la lecture de l’ouvrage Les secrets des génies / José de Valverde, Todd Lubart, 2022:" L'exploration de la biographie de grands génies montre que la créativité n'est pas réservée aux personnalités exceptionnelles et qu'elle est présente en chacun. L'ouvrage s'appuie sur les recherches en psychologie, en sociologie, en philosophie ou en histoire de l'art afin de donner des clefs pour exprimer son potentiel créatif".
Et si vraiment, vous souhaitiez comprendre ce qu’est le génie, nous vous recommandons la lecture de «grands classiques»,
Léonard : Best of Raoul : chat de génie
Léonard. 53 : Un amour de génie
Le génie des alpages, intégrale. 2
Dans l'attente de précisions, il ne nous reste plus qu'à vous quitter sur ces quelques images :