Question d'origine :
Bonjour,
-Est-il exact que le bourdon de la cathédrale St.Jean s'appellait - ou s'appelle encore - Anne-Marie ?
-Est-ce que le gros bourdon de la cathédrale St Jean se trouve toujours actuellement dans le clocher ou a t'il été détruit et fondu lors des évènements de 1793 ?
Merci de votre réponse.
Réponse du Guichet
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- Département : Documentation régionale
Le 03/05/2012 à 08h58
Bonjour,
L’abbé Sachet, réticent à l’usage selon la mode parisienne du mot «bourdon», disait à propos de la « grosse cloche » de la tour nord : « Non, elle ne bourdonne pas, notre grosse Anne-Marie. Elle sonne, elle parle, elle chante, et sa voix puissante et douce remue nos cœurs plus encore qu’elle ne secoue nos poitrine. »
On peut lire cette citation dans l’ouvrage Lyon primatiale des Gaules, et accessoirement y trouver aussi la réponse à vos deux questions : la « grosse cloche » de la primatiale Saint-Jean s’appelle en effet Anne-Marie ; elle est l’une des deux cloches rescapées de la Révolution…
En 1789, le clocher de Saint-Jean compte huit cloches, quatre grosses et quatre petites, formant grand et petit accord selon la règle de la sonnerie lyonnaise. Elles datent de 1622 (Recordon), de 1642 (Abraham), de 1671 (Léonard Dupont, trois cloches), de 1768 (Ducret père et fils, trois cloches). La loi de 1791 sur la réquisition des biens d’Église prescrit la fonte des cloches. Elle rencontre à Lyon comme ailleurs une résistance larvée, et le Conseil général décide le 29 août 1793 que « toutes les cloches des églises seront fondues, à l’exception d’une seule, la quatrième en descendant, comme étant suffisante pour appeler les citoyens à leur culte. Considérant cependant qu’i1 convient de conserver dans cette ville, dont l’étcndue est considérable, une cloche dont le son soit assez fort pour se faire entendre au loin en cas d’alarme ou d’avertissement quelconque, le Conseil arrête que la grosse cloche de la métropole soit conservée uniquement pour cet objet ainsi que la cloche du beffroi de l’hôtel commun ». Furent donc sauvées la grosse cloche, quoique réduite au silence (elle sonnera à nouveau en 1797), ct la quatrième, autorisée à sonner pour le culte. Les six autres furent descendues ; l’état de la saisie du 7 fvrier 1793 établit leur poids cumulé à 18666 livres de bronze, expédiées aux arsenaux.
Pour en savoir un peu plus sur Anne-Marie :
Anne-Marie, la «grosse cloche ».
Voici la merveille du clocher, classée monument historique des 1903. Au Moyen Âge, on l’appelait « gros sainct » (signal); à la Renaissance « grosse Marie », puis la « grosse cloche », son appellation actuelle pour les desservants de la primatiale. Mais les vieux Lyonnais l’appellent « le bourdon »: on leur disait, enfants, quand ils faisaient une grimace, que le bourdon de Saint-Jean allait sonner et les pétrifier.
La grosse cloche vient en remplacement des trois grosses cloches successives, Nicolas, Marie I et Marie II, coulées respectivement en 1305, 1508 et 1555. Ayant survécu aux huguenots en 1562, Marie II est fêlée en juillet 1622, à la suite d’un usage trop intensif (pic de mortalité dû à une épidémie). En moins d’une semaine, le chapitre passe commande de sa remplaçante. Le traité signé le 12 juillet avec Pierre Recordon, fondeur du roi à l’arsenal de Lyon, prescrit sa refonte à la même note au plus tard à la Toussaint. Recordon confectionne les moules et reçoit, courant octobre, les débris de la cloche fêlée plus des donations en nature (lingots) pour en augmenter le poids. La coulée a lieu le 3l octobre au pied du clocher, à l’emplacement usuel appelé « la fonderie », derrière l’église Saint-Etienne. La cloche neuve reste cinq mois au sol ; le 28 mars 1623, Recordon est mis en demeure par le chapitre, sous peine d’emprisonnement, de la mettre en état de sonner pour Pâques. La montée au clocher, rendue ici délicate en l’absence d’oculus (trappe de treuillage) à l’intérieur de la primatiale, a dû s’effectuer au début du mois d’avril 1623.
Elle est nommée Anne-Marie par le chapitre en mémoire d’Anne de Bretagne, marraine de la cloche Anne détruite en 1562 par les huguenots, et en l’honneur de la régente Anne d’Autriche marraine de la nouvelle cloche. Ainsi sont honorées les deux marraines, l’ancienne et la nouvelle, et la sainte patronne, la Vierge Marie.
La grosse cloche Amie-Marie mesure 2,19 m de diamètre pour un poids expertisé de 7 700 kg (Singer, 1996). Son battant, en fer forgé doux, long de 2 m, pèse 300 kg. Le joug incorpore 1,5 m3 de chêne massif pour un poids estimé de 1 200 kg, soit une masse totale en balancement de plus de 9 t.
La grosse cloche présente un profil ultralourd qui lui donne puissance et profondeur harmonique. Sa rémanence (persistance du son après le coup) est de 100 s. Sa note est un la bémol 2 au diapason 420 hertz, alors que les bourdons de poids similaire coulés au XIXe siècle sonnent généralement en fa 2. Elle était actionnée depuis la pièce basse du beffroi par l6 sonneurs. Ce nombre peut sembler élevé, mais on sonnait longtemps et un tirage aussi fort
permettait à la cloche de donner toute sa puissance.
En 1840, elle fut endommagée : en dérapant, son battant arracha un gros fragment de bronze et fêla le bord. L’accident put être réparé, mais il fallut changer le point de frappe en tournant la cloche d’un quart de tour. Enfin, la sonnerie à roues et à cordes est remplacée
par la bascule au pied, système qui se répand au XIXème siècle et qu’on installe également pour la deuxième et la troisième. Réduisant le nombre de sonneurs à quatre, efficace, facile d’entretien, il supprime les cordes perpétuellement usées et aux ruptures traîtresses. Mais, à
Lyon, il est critiqué car la grosse cloche ne peut plus monter à l’horizontale, d’où une perte de puissance et de portée du son.
Aujourd’hui, la grosse cloche sonne pour les grandes occasions liturgiques. Le son qu’elle produit est une merveille de profondeur.
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