Question d'origine :
Bonjour à tous,
La plupart des personnes ayant perdu un proche du fait d'un crime éprouve un besoin/désir immédiat de vengeance, allant jusqu'à souhaiter la mort du meurtrier.
Existe-t-il un ouvrage d'un psychologue, d'un psychiatre ou d'un sociologue, expliquant pourquoi se désir s'émousse et finit le plus souvent par s'éteindre?
Pourquoi les parents ne se font-ils pas justice, au mépris d'être incarcérés, lorsque l'assassin de leur enfant est libéré?
Par avance, merci pour votre réponse.
Réponse du Guichet
bml_civ
- Département : Civilisation
Le 12/09/2015 à 15h03
"Vengeance :
Conduite complexe dont les motivations répondent à des objectifs différents : soit pour obtenir une réparation, un dédommagement, soit pour punir et châtier un offenseur, soit pour apaiser un ressentiment, soit encore pour avoir valeur de représailles. La vengeance peut satisfaire un instinct de défense et être contenue dans les limites d’une justice distributive ou devenir une excuse pour libérer une agressivité justicière. Dans une groupe, elle peut alimenter de proche ne proche des vengeances réciproques et après l’accord des membres s’appliquer à des victimes émissaires ."
P. 711
Dictionnaire de Psychologie, Roland Doron et Françoise Parot
«La vengeance en tant que phénomène social trouve sa source dans la relation spécifique unissant l’offenseur à l’offensé et dans les sentiments que suscite l’offense chez ce dernier. Le motif passionnel de la vengeance n’est réductible ni à la haine ni à l’intérêt mais tient dans l’exigence de réparation de symétrie des sorts individuels. »
[...]
« Dans la civilisation judéo-chrétienne comme dans d’autres, la vengeance et la justice sont en effet conçues come articulées dans un enchaînement où la vengeance est première : logiquement et historiquement, la justice est conçue comme le principe qui vient mettre un terme aux excès de la vengeance et se substituer à elle. »
Extraits de l’article vengeance, p 1786 à 1792, Dictionnaire culturel en langue française
On pourrait donc affirmer que la justice est un des éléments qui permet de mettre à distance le désir de vengeance.
« Aussi, une thèse répandue soutient que la justice doit prendre en considération le désir de vengeance de la victime et trouver un moyen de l’apaiser sans pour autant autoriser sa réalisation pure et simple. La mise en scène symbolique du procès est ici essentielle : désigner une victime et un coupable supposé (« partie civile » et accusé) n’est pas seulement le préalable à toute sanction , c’est un acte, qui, s’il est accompagné de la publicité et de la ritualisation suffisantes, participe à la fois du mouvement de réintégration du coupable et de l’effort d’acceptation de la victime.[…] La reconstruction par le procès d’un face-à-face entre la victime ou ses proches et le coupable peut particper à la satisfation non vindicative du sentiment de vengeance."
Extraits de l’article vengeance, p 1786 à 1792, Dictionnaire culturel en langue française
De plus, « L’émotion spontanée est rarement bonne conseillère, et ce n’est pas parce que j’ai en moi cette pulsion de vengeance qu’il est bon de la satisfaire. La
compréhension profonde, la compassion et le pardon sont des chemins plus sûrs à
long terme, pour les autres mais avant tout pour soi. La colère contenue, maintenue
en soi, au chaud, ne produit que des catastrophes qui nous installent durablement
dans la honte, le regret et la faute. »
Cours de Philosophie. M. Mohandi
Pour aller plus loin :
- Rompre avec la vengeance. Lecture de René Girard
- Le désir, le devoir et l'interdit : masques et visages de la vengeance
- Une émission sur France-Inter : le désir de vengeance
Enfin, pour prendre encore plus de recul :
- La violence et le sacré, de René Girard
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