Question d'origine :
Bonjour !
Avec un ami, nous avons un débat (plutôt alimenté) au sujet du terrorisme. Nos avis divergent, ce qui a soulevé quelques questions. Est-ce qu'un Etat peut être terroriste vis-à-vis d'un autre Etat ? Il me semble que l'on ne peut employé ce terme uniquement quand un Etat est terroriste vis-à-vis de sa population ? Si un Etat finance une communauté activiste voulant provoquer un acte terroriste, est-ce qu'il peut être qualifié de terroriste à son tour ? Le terrorisme serait plutôt indirect (car les attaques menées par les terroristes ne sont pas directement liées au pays) et une intervention militaire étatique (donc directe) serait plutôt qualifiée d'offensive ou de contre-attaque, non ?
Réponse du Guichet
gds_db
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 10/12/2015 à 12h09
Bonjour,
Il n’existe pas de définition consensuelle de la notion de "terrorisme". Chaque Etat, organisme international ou spécialiste du domaine en donne une définition différente selon le contexte. C'est ce qu'explique Gilles Ferragu dans l'article intitulé Le terrorisme en définitions dont voici quelques extraits :
Définir le terrorisme est plus difficile qu’il n’y paraît : l’appellation relève davantage de la rhétorique politique que d’une réalité juridique. [...]
Crime transnational, le terrorisme ne se laisse pas non plus définir aisément par le droit. Pourtant, des définitions, on en recense plus d’une centaine, émanant des États, d’organismes internationaux ou de spécialistes.
[...]
Si la communauté internationale peine à définir le terrorisme, une définition plus cohérente existe au niveau de structures régionales comme l’Union européenne. Ainsi, la Convention européenne du 10 janvier 2000 pour la répression du financement du terrorisme propose la suivante, toutefois assez large : «Tout acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque par sa nature ou par son contexte cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque . »
Faute d’un consensus international, chaque État donne sa définition, généralement accompagnée d’une liste d’organisations désignées comme terroristes.
De la même manière, les notions d'Etat terroriste ou de terrorisme d'Etat ne semblent pas être figées et leur définition évolue au fil du temps. C'est ce qu'indiquent par exemple Alain Bauer et Jean-Louis Bruguière dans Les 100 mots du terrorisme :
Terrorisme d'Etat :
A l'origine, cette expression était utilisée par les pays du bloc de l'Est pour désigner les Etats totalitaires utilisant la répression (police secrète, escadrons de la mort...).
Actuellement, le terme est devenu synonyme de "terrorisme parrainé par un Etat" et servant d'outil à une stratégie globale d'un Etat ou d'un groupe d'Etats. [...]
Lire aussi : La criminologie pour les nuls d'Alain Bauer et Christophe Soullez consultable partiellement sur Google livres
Mario Bettati va dans le même sens et précise :
L'expression "Terrorisme d'Etat", d'origine marxiste-léniniste, désignait la politique des Etats totalitaires (fascistes ou d'extrême droite) qui s'appuyaient sur le rôle actif d'une police secrète. Par extension, elle désigne désormais toutes les formes de répression d'un Etat . Il faut donc distinguer le "terrorisme traditionnel" qui cherche avant tout à défier l'Etat et à braver l'appareil législatif, alors que le terrorisme d'Etat résulter d'une application abusive de la loi. Si les méthodes sont souvent comparables, la finalité de ces types d'actions est fondamentalement différente. Initialement, cette expression désignait la stratégie antisubversive de certains pays d'Amérique latine, notamment l'usage d'escadrons de la mort organisés par certaines forces de police (Salvador, Argentine, Brésil), ou le Groupe antiterroriste de libération (GAl) espagnol, etc. utilisés dans la lutte contre le phénomène. La stratégie des escadrons de la mort se résumait d'une formule bien connue : "Terroriser les terroristes".
Aujourd'hui, l'expression est souvent utilisée comme synonyme de "terrorisme parrainé par un Etat".
Certains pays non alignés réservent cette expression pour désigner la politique d'Israël à l'égard des Palestiniens ou des Etats-Unis à l'égard de plusieurs pays musulmans.
La rapporteuse de la CDH s'est posé d'emblée la question de savoir s'il convenait de partir d'une définition du terrorisme qui devrait mettre l'accent uniquement sur les fait d'acteurs non étatiques ou également sur la notion de terrorisme d'Etat ou de terrorisme encouragé par des Etats (E/CN.4/Sub.2/2004/40,§12). Mais la notion est assez floue. Tantôt elle est synonyme de dictature et évoque les méthodes violentes que celle-ci emploie dans l'ordre interne à l'égard des citoyens opposants ou tout simplement minoritaires ; tantôt elle désigne les actions extérieures d'un gouvernement contre des adversaires, des pays alliés de ceux-ci ou des mouvements établis à l'étranger. [...]
Face à la multiplicité d'emplois de ce qualificatif, la recherche d'une définition et de critères d'identification est malaisé et nécessairement approximative.
source : Le terrorisme : les voies de la coopération internationale / Mario Bettati
A lire aussi :
- Une définition européenne / Par John Brown - Manière de voir, no. 140 - Vous avez dit terrorisme ?, mercredi 1 avril 2015, p. 76,77,78,79
- Le terrorisme et ses métamorphoses / Samir Saul - La Presse, no. Vol. 132 n° 34 - Débats, vendredi 27 novembre 2015, p. A33
Bonne journée.
Il n’existe pas de définition consensuelle de la notion de "terrorisme". Chaque Etat, organisme international ou spécialiste du domaine en donne une définition différente selon le contexte. C'est ce qu'explique Gilles Ferragu dans l'article intitulé Le terrorisme en définitions dont voici quelques extraits :
Crime transnational, le terrorisme ne se laisse pas non plus définir aisément par le droit. Pourtant, des définitions, on en recense plus d’une centaine, émanant des États, d’organismes internationaux ou de spécialistes.
[...]
Si la communauté internationale peine à définir le terrorisme, une définition plus cohérente existe au niveau de structures régionales comme l’Union européenne. Ainsi, la Convention européenne du 10 janvier 2000 pour la répression du financement du terrorisme propose la suivante, toutefois assez large : «
Faute d’un consensus international, chaque État donne sa définition, généralement accompagnée d’une liste d’organisations désignées comme terroristes.
De la même manière, les notions d'Etat terroriste ou de terrorisme d'Etat ne semblent pas être figées et leur définition évolue au fil du temps. C'est ce qu'indiquent par exemple Alain Bauer et Jean-Louis Bruguière dans Les 100 mots du terrorisme :
A l'origine, cette expression était utilisée par les pays du bloc de l'Est pour désigner les Etats totalitaires utilisant la répression (police secrète, escadrons de la mort...).
Actuellement, le terme est devenu synonyme de "terrorisme parrainé par un Etat" et servant d'outil à une stratégie globale d'un Etat ou d'un groupe d'Etats. [...]
Lire aussi : La criminologie pour les nuls d'Alain Bauer et Christophe Soullez consultable partiellement sur Google livres
Mario Bettati va dans le même sens et précise :
Certains pays non alignés réservent cette expression pour désigner la politique d'Israël à l'égard des Palestiniens ou des Etats-Unis à l'égard de plusieurs pays musulmans.
La rapporteuse de la CDH s'est posé d'emblée la question de savoir s'il convenait de partir d'une définition du terrorisme qui devrait mettre l'accent uniquement sur les fait d'acteurs non étatiques ou également sur la notion de terrorisme d'Etat ou de terrorisme encouragé par des Etats (E/CN.4/Sub.2/2004/40,§12). Mais la notion est assez floue. Tantôt elle est synonyme de dictature et évoque les méthodes violentes que celle-ci emploie dans l'ordre interne à l'égard des citoyens opposants ou tout simplement minoritaires ; tantôt elle désigne les actions extérieures d'un gouvernement contre des adversaires, des pays alliés de ceux-ci ou des mouvements établis à l'étranger. [...]
Face à la multiplicité d'emplois de ce qualificatif, la recherche d'une définition et de critères d'identification est malaisé et nécessairement approximative.
source : Le terrorisme : les voies de la coopération internationale / Mario Bettati
A lire aussi :
- Une définition européenne / Par John Brown - Manière de voir, no. 140 - Vous avez dit terrorisme ?, mercredi 1 avril 2015, p. 76,77,78,79
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