Question d'origine :
Plus personne ne semble parler de Raymond Ruyer. Pourquoi ? Est-ce que sa philosophie est datée ?
Réponse du Guichet
Une des raisons évidentes de la méconnaissance du travail de Ruyer réside dans le fait que le philosophe a toujours enseigné à Nancy et "s’est coupé en quelque sorte du champs intellectuel français". Il est ainsi décrit comme un penseur isolé.
Bonjour,
Bien qu’effectivement peu connu des étudiants, le philosophe vosgien, Raymond Ruyer (1902-1987) était au programme de l’agrégation de philosophie en 2014. Fabrice Colonna (auteur d’une introduction à la pensée de Raymond Ruyer) et Patrice Louis (chargé de cours en philosophie à l'Université de Lorraine) revenaient cette même année, sur le travail et la non-postérité de Raymond Ruyer, dans l’émission de France Culture, Les chemins de la philosophie.
Selon Patrice Louis, la méthodologie de Raymond Ruyer opère déjà une rupture avec les penseurs de son époque (mis à part Bergson) en montrant les limites de la science moderne, qui selon lui ne peut expliquer la notion d’unité.
Vous trouverez dans l’article wikipedia qui lui est consacré, un développement de ses champs de recherches et de sa métaphysique des sciences.
Une des raisons évidentes de la méconnaissance du travail de Ruyer réside selon les deux auteurs invités à l’émission, dans le fait que le philosophe a toujours enseigné à Nancy et "s’est coupé en quelque sorte du champs intellectuel français". Il est ainsi décrit comme un penseur isolé.
Cependant en 1974, Raymond Ruyer se rendit médiatique en publiant un fameux canular intitulé “la gnose de Princeton”. En effet, dans ce texte Raymond Ruyer affirme être en lien avec des intellectuels de Princeton qui élaborent des thèses similaires aux siennes. L’ouvrage oscille entre le sérieux de son panpsychisme (qui comme l’affirme Fabrice Colonna est bien plus proche de la pensée leibnizienne que d’un spiritisme nébuleux) et un certain humour :
"L'ouvrage marqué d'humour est un succès, et l'auteur y présente en réalité sous une forme synthétique l'essentiel des idées qu'il a développées au cours de sa carrière. Le succès à part de l'ouvrage montre que la plupart des lecteurs et des critiques littéraires n'ont pas compris le canular. Jean-Émile Charon, par exemple, note avec le plus grand sérieux la concordance de sa pensée avec la Nouvelle gnose américaine et reprend à son compte l'expression de physique « néo-gnostique ».
(source article wikipédia sur la la gnose de Princeton).
Vous trouverez également sur Persée, une recension du même ouvrage de Danièle Hervieu-Leger parue en 1975 qui effectivement ne semble pas saisir la ruse de Ruyer.
Par ailleurs, de récentes publications dédiées au travail de Raymond Ruyer semblent vouloir sauver de l’oubli son œuvre conséquente.
Ainsi le numéro 149 de la revue Philosophie publié cette année est entièrement consacré au travail de Ruyer.
Ses réflexions autour de la multiplicité des corps, de la cybernétique et de son lien avec le travail de Whitehead y sont longuement développées.
Enfin vous trouverez un article sur l'actualité de la critique sociale de Raymond Ruyer sur le site du Journal des Libertés.
Bonnes lectures !
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