Question d'origine :
Bonjour, Je cherche des informations pour réaliser une petite présentation de Mme de Servient dans le cadre d'une balade urbaine du quartier de la Part-Dieu. J'ai rédigé un texte sur la base d'informations trouvées notamment sur votre site (https://www.guichetdusavoir.org/viewtopic.php?t=23843) mais aussi celui des archives municipales, l'expo des archives départementales, etc... mais il me manque quelques informations que vous pourriez m'apporter. Connaissez-vous la date de naissance de Mme de Servient (je n'ai que sa date de décès)? Avait-elle des frères et soeurs ? Existe-t-il une image d'elle (portrait ou autre) ? Je cherche des images pour illustrer mon histoire, mais je ne trouve que l'acte de "donation", ou des gravures du "Tumulte du pont du Rhône". Enfin, savez-vous pourquoi les rues portant des noms de femmes ne portent que rarement leur prénom? Je n'arrive pas à comprendre pourquoi c'était le cas à une certaine époque. En vous remerciant d'avance
Réponse du Guichet
Bonjour,
Les ouvrages que nous avons consultés (par exemple le Dictionnaire des lyonnaiseries) restent très anecdotique sur la Dame de la Part-Dieu, et s'ils confirment la légende selon laquelle l'accident du pont de la Guillotière aurait poussé Madame de Servient à léguer son large domaine de la Guillotère aux Hospices civils de Lyon, ils n'apportent pas davantage d'informations. Cette dame semble ne pas s'être singularisée autrement que par ce legs exorbitant. Les traces de cette transaction sont conservées aux Archives municipales, mais dans les documents officiels la date de naissance de Catherine Mazenod-Servient n'est pas mentionnée.
Ce que nous apprennent ces recherches en revanche c'est que son père, Marc-Antoine Mazenod, décédé en 1679, fut échevin à Lyon.
Il y a donc de fortes chances pour que ce Marc-Antoine Mazenod soit celui dont nous retrouvons la trace sur l’arbre généalogique de Olivier LEDOUX compilé sur Geneanet :
Marc Antoine MAZENOD
Ecuyer - Seigneur de Pavezin et de la Chance
Born in April 1606
Deceased, aged 73 years old
Buried 14 May 1679 - Saint-Chamond, 42400, Loire, Rhône-Alpes, FRANCE
Avocat au parlement de Lyon - Echevin de 1659 à 1660
Mathieu MAZENOD †1631
Marguerite BESSET
Married 1 May 1640, Saint-Pierre Saint-Saturnin - Lyon, 69000, Rhône, Rhône-Alpes, FRANCE, to Etiennette BERTON 1618-1678 with
M. Charles Joseph de MAZENOD, Ecuyer - Seigneur de la Chance , Pavezin, Saint-Georges et autres places 1642-
M. Mathieu Marcelin MAZENOD 1643-
M. Etienne MAZENOD, Ecuyer - Seigneur de Pavezin 1644-
F. Françoise MAZENOD 1647-
M. Marc Antoine MAZENOD 1648-
F.
M. Genis MAZENOD 1651-
Godfather (1654) : baptism, Marc Antoine RIVÉRIEULX 1654-
Godfather (1672) : baptism, Antoinette Etiennette de MAZENOD 1672-
Burial
Voir aussi BMS Lyon Saint-Paul 1679 p22
Spouse: Archives de la ville de Lyon - http://www.archives-lyon.fr - - Internet - M Saint-Pierre Saint-Saturnin 1606-1668 p184
Burial: AD42 - http://www.loire.fr - - Internet - BMS Saint-Pierre 1676-1681 p33
On apprend sur le résultat de ces recherches généalogique que sa fille Catherine est née en 1649, et qu'elle a 5 frères et une soeur.
Dans l'espoir de retrouver un portrait de cette femme, nous avons parcouru la collection des portraits de personnalités lyonnaises du fonds Costes, sans succès, mais sans surprise non plus. On voit mal ce qui pourrait justifier à cette époque où les représentations de célébrités sont assez rares la diffusion du portrait d'une riche bourgeoise dont le seul acte d'éclat fut le legs d'une partie importante de sa fortune aux hospices civils. La meilleure chance de pouvoir contempler les traits de cette femme serait sans doute de trouver un portrait familial ; à cette époque on commence dans la bourgeoisie à se faire représenter en peinture pour décorer les appartements. Mais par définition, ces portraits privés sont difficiles à retrouver, circulant par le biais d'héritages et finalement de vide-greniers : peut-être qu'en épluchant un inventaire après décès des biens de Catherine Mazenod éventuellement conservé aux archives municipales aurez-vous la confirmation de l'existence d'un tel portrait? Et encore faudrait-il ensuite le retrouver...
Réponse du Guichet
En complément de la réponse de nos collègues du département Documentation Régionale, nous avons effectué une recherche concernant votre question subsidiaire : pourquoi les rues portant des noms de femmes ne portent que rarement leur prénom ?
Commençons par préciser que cela est en voie de changement : la ville de Paris en particulier a modifié plusieurs plaques de rues en ajoutant les prénoms de personnalités féminines comme Juliette Récamier ou Marguerite de Rochechouard :
« La mairie de Paris a commencé à rajouter le prénom de femmes célèbres, dont certaines rues parisiennes portent les noms de famille. Une initiative visant à lutter contre leur invisibilisation, alors même que, selon “le Parisien”, seulement 12 % des artères ou équipements publics de la capitale portent le patronyme d'une femme.
Si vous pensiez connaître l’histoire de la capitale comme votre poche, il se peut que vous soyez surpris. Vous vous êtes forcément déjà baladé le long du boulevard de Rochechouart, à Paris, sans forcément soupçonner que, derrière ce nom mythique, se cachait une religieuse érudite, abbesse de Montmartre au XVIIIe siècle. Alors bientôt, cette célèbre artère retrouvera son nom complet, pour devenir le boulevard Marguerite-de-Rochechouart (1665-1727). A l'initiative de la mairie de Paris, une dizaine de plaques de rues parisiennes portant le nom de famille d'une femme vont ainsi être modifiées, de façon à rajouter dessus les prénoms des principales intéressées.
Donner de la visibilité
Un moyen de lutter contre l'invisibilisation des femmes, à l'heure où, selon le Parisien, seulement 12 % des rues ou des équipements publics de la capitale sont incarnés par l'une d'entre elles. Alors si, en plus, il n'y a même pas leurs prénoms sur les plaques... Cette mesure portée par la commission de dénomination des voies, places, espaces verts et équipements publics municipaux, laquelle est présidée par la conseillère de Paris Catherine Vieu-Charier, avait été votée à l'unanimité en avril, avant une décision similaire du Conseil de Paris en septembre.
Comme le montre ce reportage du Huffington Post, la première modification de plaque a eu lieu jeudi 21 novembre : ainsi, la rue Récamier s'appelle désormais la rue Juliette Récamier, femme de lettres et créatrice d'un salon où les opposants de Napoléon Bonaparte se réunissaient. L'une des prochaines étapes, selon le Huffpost : l'impasse et la rue de la Tour-d'Auvergne seront rebaptisées en impasse et rue Louise-Emilie de la Tour d'Auvergne (1667-1737), du nom d'une autre abbesse de Montmartre.
Cette initiative municipale n'est pas sans rappeler la démarche de l'association Osez le Féminisime, qui en 2015, s'était lancée dans la rebaptisation de plusieurs rues parisiennes. »
Source : A Paris, des femmes récupèrent leurs prénoms sur les plaques de rue, lesinrocks.com (22/11/19)
L’article de Frédéric Giraut Contre la sous-représentation des femmes dans les noms de rues : géopolitique d’une mobilisation contemporaine multiforme nous en apprend un peu plus sur le contexte des nominations de noms de rues dans l’histoire récente :
« Cette préoccupation contemporaine et occidentale était totalement absente, voire même implicitement bannie, lors de périodes historiques modernes de nominations massives de noms de rues qui ont contribuées à l’instauration d’un déséquilibre flagrant (Richard 2001). En effet, ces périodes, de la mi XIXeme jusqu’à la crise des années 1970’, ont correspondu au développement de l’odonymie commémorative dans un contexte d’alternance de périodes de guerre et de croissance dans une société patriarcale réservant l’espace public à la quasi hégémonie du genre masculin. Voire à ce sujet le remarquable travail fait sur la Commission Merruau de 1862 chargée du volet toponymique de l’haussmannisation parisienne pour renommer les voies dont les noms étaient inadéquats avec la nouvelle nomenclature ou faisaient doublon dans le cadre d’un Grand Paris unifié (Bourillon 2012, Giraut 2013). Le recours aux patronymes fut assez systématique (plus des deux tiers des propositions de la Commission) s’agissant d’une ville capitale modernisée qui devait inscrire dans le répertoire de ses voies, une sorte de panthéon du régime et de la Nation moderne. Une doctrine complexe est élaborée en tenant compte de nombreux critères, celui du genre est totalement absent et les propositions sont essentiellement masculines sans que cela fasse l’objet de la moindre réflexion, comme une évidence dans le contexte de l’époque. »
Précisons que pour les rues commémorant des personnalités masculines, le prénom n’est pas toujours mentionné non plus, comme l’illustre ce travail de l’informaticien Armand Gilles. En revanche nos recherches ne nous permettent pas de savoir dans quelles proportions les prénoms des femmes et des hommes sont mentionnés ou occultés en odonymie… Et encore moins sous quel motif : ce choix de mentionner ou non le prénom semble être assez arbitraire.
Etant actuellement en télétravail nous ne pouvons pas approfondir nos recherches à l’aide des ressources de la bibliothèque. Néanmoins vous trouverez dans la page Wikipedia sur l’odonymie en France quelques références bibliographiques qui vous seront peut-être utiles si vous souhaitez creuser le sujet.
Bonne journée.