Question d'origine :
Bonjour,
Pour faire suite à un débat qui avait enflammé les médias il y a quelques années, je m'étonne de ne pas trouver énormément d'informations sur les avancées vis à vis de la place de l'inné dans le comportement humain, et plus généralement dans celui des êtres vivants (caractère, personnalité).
J'avais lu il y a quelques temps que la plupart des scientifiques s'accordaient pour dire que l'inné définirait moins d'1% de nos comportements. Mais d'autres tablent sur du 30 / 70 ! Est ce toujours d'actualité ? Ou me renseigner sur ce sujet et comment avoir accès aux études ?
Pour résumer, quel ratio inné/acquis définit notre comportement ?
Merci d'avance !
Réponse du Guichet
gds_alc
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 23/10/2012 à 15h57
Bonjour,
La discussion « inné / acquis » proprement dite est présente depuis longtemps mais c’est l’éthologie de la deuxième moitié du XXe siècle qui l’a poussée le plus avant, jusqu’à mettre en cause la pertinence de ces deux notions. Depuis, les débats et polémiques n’ont cessé de rythmer la vie scientifique mais aussi politique. Que l’on se souvienne, il y a peu encore des prises de positions sur la pédophilie, l’homosexualité ou encore la criminalité.
Pour revenir sur la pertinence ou non d’une quantification de la part d’inné et d’acquis revenons tout d’abord sur les définition apportées par Axel Kahn sur ces deux notions puis présentons les avis, parfois divergents, de divers scientifiques :
L'inné est la part de notre personnalité liée à nos gènes transmis par nos parents à la naissance, alors que l'acquis est la part liée à l'environnement : la culture, l'éducation, l'expérience personnelle, etc. L'opposition entre les tenants d'une influence déterminante de l'inné et ceux de l'acquis est largement artificielle. En effet, on peut dire que l'homme a la capacité innée d'acquérir, ce qui fait toute sa spécificité et sa richesse. C'est parce que les gènes humains permettent d'édifier un psychisme humain que l'homme est si sensible aux empreintes laissées par son milieu, en particulier à l'influence de la culture et de l'éducation. Il est certain que les gènes doivent pouvoir intervenir dans telle ou telle caractéristique du cerveau humain, modulant plus ou moins son type de réactivité à l'environnement. Cependant, le modelage par ce dernier jouera à l'évidence un rôle essentiel dans l'édification du psychisme.
Source : archives.universcience.fr
Sur le blog du monde la question est posée de savoir si ce débat était ou non dépassé :
C’est devenu un lieu commun de la vulgarisation scientifique : en ce qui concerne les dispositions psychiques humaines, la science a permis de dépasser le débat entre « inné » (de droite) et « acquis » (de gauche). Mais de quel débat parle-t-on exactement, et sur quelles données scientifiques cette affirmation est-elle fondée ?
En février dernier, en pleine campagne présidentielle, le biologiste Pierre-Henri Gouyon, chercheur et professeur de renom intervenant fréquemment dans l’espace public pour parler d’évolution, de génétique, d’écologie et de bioéthique, donnait une conférence sur l’inné et l’acquis présentée comme suit :
« La question de ce qui est inné ou dû à l’environnement social dans les comportements humains défraie régulièrement la chronique. Qu’il s’agisse de questions de genre/sexe ou de comportements déviants, ces sujets resurgissent particulièrement en périodes pré-électorales. Que peut-on en dire sur le plan biologique ? […] »
Lors de cette conférence, le biologiste – qui va donc nous expliquer ce qu’on peut en dire « sur le plan biologique » – commence par revenir sur le fameux débat qui avait opposé en 2007 Michel Onfray à Nicolas Sarkozy : le premier avait affirmé qu’ « on ne naît pas homosexuel, ni hétérosexuel, ni pédophile » et dit penser que « nous sommes façonnés, non pas par nos gènes, mais par notre environnement », le second avait indiqué qu’il inclinait pour sa part à penser qu’ « on naît pédophile » et expliqué que les jeunes qui se suicidaient le faisaient non parce que leurs parents s’étaient mal occupé d’eux « mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable ». Gouyon ironise sur la probable ignorance en génétique du « philosophe de gauche » comme du « candidat de droite », et résume ainsi la dimension idéologique de leurs propos : « les gènes c’est de droite, l’environnement c’est de gauche ». Brossant à grand traits une histoire de cette cristallisation du débat inné/acquis en clivage droite/gauche, il oppose deux extrémismes de la première moitié du 20ème siècle : d’un côté, à l’Ouest, la croyance dans l’inné a fait de la génétique la base de l’eugénisme et du nazisme ; de l’autre, dans la Russie soviétique, la croyance inverse a été promue et imposée par Lyssenko, théoricien de l’idée de Engels « qu’il n’y a aucune différence entre humains à la naissance et que c’est uniquement, et les propos de Michel Onfray reviennent tout-à-fait là-dessus, c’est uniquement la société qui les transforme, et donc le résultat c’est qu’on serait tous pareils, messieurs dames, si jamais on avait exactement vécu dans la même société ». Mais ce débat idéologique, c’est du passé, nous dit Gouyon :
« Evidemment, c’est aussi faux l’un que l’autre, hein. […] la variation que j’observe dans une population, c’est la somme des effets de l’environnement plus des effets des gènes. Et […] évidemment, hein, ce qui compte, c’est de comprendre qu’il y a toujours de l’environnement et des gènes qui jouent, dans quasiment tous les caractères. »
Il explique ensuite qu’on sait même calculer la part respective de l’un et de l’autre dans la variabilité d’un caractère observée dans une population et un panel d’environnements donnés :
« C’est exactement ce qu’on fait en génétique : on va pouvoir, sur une variation – la taille du blé, ou le QI des enfants – mesurer la part de variation qui est due à l’environnement et la part de variation qui est due aux gènes. Et on peut trouver que c’est de l’ordre de 50/50 chez les enfants français des années 1970. Mais ça veut rien dire d’autre que "à cet endroit là" : si je change le système scolaire, je vais changer les résultats ...»
Mais dans un même temps, le neuropsychiatre Boris Cyrulnik assure qu’Il faut dépasser ces clivages obsolètes. L’inné, l’acquis, c’est un vocabulaire idéologique. La biologie n’est rien sans la culture, et vice versa. C’est comme se demander si, pour respirer, qui des poumons ou de l’oxygène est le plus important. Un cerveau sain sans émotions ne donnera rien de bon, des émotions sans cerveau non plus. […]" », ou encore : « Nous sommes pétris par notre milieu autant que par nos gènes. Je crois ainsi que la distinction gène/environnement - c’est-à-dire inné/acquis - est purement idéologique et pas du tout scientifique. Le gène est aussi vital que l’environnement, ils sont inséparables. Nous sommes déterminés à 100 % par nos gènes et à 100% par notre environnement.
Source : Blog Le Monde.
Pour compléter cette première approche, nous vous conseillons de parcourir les articles :
* inné ou acquis ? par Ernst Peter Fischer.
* L'inné et l'acquis dans la structure du cerveau par Jean-Pierre Changeux
Mais comme vous le montrent les témoignages mentionnés ci-dessus ou tout simplement la présentation du 11e Forum des Sciences Cognitives : Tout est inné, tout est acquis il importe désormais de dépasser ce débat.
Pour finir, vous trouverez d’autres références dans nos réponses apportées sur :
* le caractère est-il inné ou acquis ?
* orientation sexuelle et gènes
La discussion « inné / acquis » proprement dite est présente depuis longtemps mais c’est l’éthologie de la deuxième moitié du XXe siècle qui l’a poussée le plus avant, jusqu’à mettre en cause la pertinence de ces deux notions. Depuis, les débats et polémiques n’ont cessé de rythmer la vie scientifique mais aussi politique. Que l’on se souvienne, il y a peu encore des prises de positions sur la pédophilie, l’homosexualité ou encore la criminalité.
Pour revenir sur la pertinence ou non d’une quantification de la part d’inné et d’acquis revenons tout d’abord sur les définition apportées par Axel Kahn sur ces deux notions puis présentons les avis, parfois divergents, de divers scientifiques :
L'inné est la part de notre personnalité liée à nos gènes transmis par nos parents à la naissance, alors que l'acquis est la part liée à l'environnement : la culture, l'éducation, l'expérience personnelle, etc. L'opposition entre les tenants d'une influence déterminante de l'inné et ceux de l'acquis est largement artificielle. En effet, on peut dire que l'homme a la capacité innée d'acquérir, ce qui fait toute sa spécificité et sa richesse. C'est parce que les gènes humains permettent d'édifier un psychisme humain que l'homme est si sensible aux empreintes laissées par son milieu, en particulier à l'influence de la culture et de l'éducation. Il est certain que les gènes doivent pouvoir intervenir dans telle ou telle caractéristique du cerveau humain, modulant plus ou moins son type de réactivité à l'environnement. Cependant, le modelage par ce dernier jouera à l'évidence un rôle essentiel dans l'édification du psychisme.
Source : archives.universcience.fr
Sur le blog du monde la question est posée de savoir si ce débat était ou non dépassé :
C’est devenu un lieu commun de la vulgarisation scientifique : en ce qui concerne les dispositions psychiques humaines, la science a permis de dépasser le débat entre « inné » (de droite) et « acquis » (de gauche). Mais de quel débat parle-t-on exactement, et sur quelles données scientifiques cette affirmation est-elle fondée ?
En février dernier, en pleine campagne présidentielle, le biologiste Pierre-Henri Gouyon, chercheur et professeur de renom intervenant fréquemment dans l’espace public pour parler d’évolution, de génétique, d’écologie et de bioéthique, donnait une conférence sur l’inné et l’acquis présentée comme suit :
« La question de ce qui est inné ou dû à l’environnement social dans les comportements humains défraie régulièrement la chronique. Qu’il s’agisse de questions de genre/sexe ou de comportements déviants, ces sujets resurgissent particulièrement en périodes pré-électorales. Que peut-on en dire sur le plan biologique ? […] »
Lors de cette conférence, le biologiste – qui va donc nous expliquer ce qu’on peut en dire « sur le plan biologique » – commence par revenir sur le fameux débat qui avait opposé en 2007 Michel Onfray à Nicolas Sarkozy : le premier avait affirmé qu’ « on ne naît pas homosexuel, ni hétérosexuel, ni pédophile » et dit penser que « nous sommes façonnés, non pas par nos gènes, mais par notre environnement », le second avait indiqué qu’il inclinait pour sa part à penser qu’ « on naît pédophile » et expliqué que les jeunes qui se suicidaient le faisaient non parce que leurs parents s’étaient mal occupé d’eux « mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable ». Gouyon ironise sur la probable ignorance en génétique du « philosophe de gauche » comme du « candidat de droite », et résume ainsi la dimension idéologique de leurs propos : « les gènes c’est de droite, l’environnement c’est de gauche ». Brossant à grand traits une histoire de cette cristallisation du débat inné/acquis en clivage droite/gauche, il oppose deux extrémismes de la première moitié du 20ème siècle : d’un côté, à l’Ouest, la croyance dans l’inné a fait de la génétique la base de l’eugénisme et du nazisme ; de l’autre, dans la Russie soviétique, la croyance inverse a été promue et imposée par Lyssenko, théoricien de l’idée de Engels « qu’il n’y a aucune différence entre humains à la naissance et que c’est uniquement, et les propos de Michel Onfray reviennent tout-à-fait là-dessus, c’est uniquement la société qui les transforme, et donc le résultat c’est qu’on serait tous pareils, messieurs dames, si jamais on avait exactement vécu dans la même société ». Mais ce débat idéologique, c’est du passé, nous dit Gouyon :
« Evidemment, c’est aussi faux l’un que l’autre, hein. […] la variation que j’observe dans une population, c’est la somme des effets de l’environnement plus des effets des gènes. Et […] évidemment, hein, ce qui compte, c’est de comprendre qu’il y a toujours de l’environnement et des gènes qui jouent, dans quasiment tous les caractères. »
Il explique ensuite qu’on sait même calculer la part respective de l’un et de l’autre dans la variabilité d’un caractère observée dans une population et un panel d’environnements donnés :
« C’est exactement ce qu’on fait en génétique : on va pouvoir, sur une variation – la taille du blé, ou le QI des enfants – mesurer la part de variation qui est due à l’environnement et la part de variation qui est due aux gènes. Et on peut trouver que c’est de l’ordre de 50/50 chez les enfants français des années 1970. Mais ça veut rien dire d’autre que "à cet endroit là" : si je change le système scolaire, je vais changer les résultats ...»
Mais dans un même temps, le neuropsychiatre Boris Cyrulnik assure qu’Il faut dépasser ces clivages obsolètes. L’inné, l’acquis, c’est un vocabulaire idéologique. La biologie n’est rien sans la culture, et vice versa. C’est comme se demander si, pour respirer, qui des poumons ou de l’oxygène est le plus important. Un cerveau sain sans émotions ne donnera rien de bon, des émotions sans cerveau non plus. […]" », ou encore : « Nous sommes pétris par notre milieu autant que par nos gènes. Je crois ainsi que la distinction gène/environnement - c’est-à-dire inné/acquis - est purement idéologique et pas du tout scientifique. Le gène est aussi vital que l’environnement, ils sont inséparables. Nous sommes déterminés à 100 % par nos gènes et à 100% par notre environnement.
Source : Blog Le Monde.
Pour compléter cette première approche, nous vous conseillons de parcourir les articles :
* inné ou acquis ? par Ernst Peter Fischer.
* L'inné et l'acquis dans la structure du cerveau par Jean-Pierre Changeux
Mais comme vous le montrent les témoignages mentionnés ci-dessus ou tout simplement la présentation du 11e Forum des Sciences Cognitives : Tout est inné, tout est acquis il importe désormais de dépasser ce débat.
Pour finir, vous trouverez d’autres références dans nos réponses apportées sur :
* le caractère est-il inné ou acquis ?
* orientation sexuelle et gènes
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