Le personnage de Laurent Prades du film "Notre Dame brûle" est-il authentique ?
Question d'origine :
Bonjour.
Je viens de voir le film "Notre Dame brûle".
Le personnage de Laurent Prades est-il authentique ? Est ce un personnage légendaire qui serait la synthèse de plusieurs personnes dans la réalité pour les besoins du film ?Serait ce Laurent Prades qui rejouerait son propre rôle ? (Anne Hidalgo rejoue bien son propre rôle dans ce film déjà). Est ce que l'aspect "sérieux" de son emploi du temps dans le film est conforme à la réalité ? (On se doute bien que ses malheurs avec son Vélib', c'est la touche "humoristique" du film, c'est probablement inventé, quoi que... le truc qui n'avait pas trop lieu d'être, on est plutôt dans le documentaire mais bon...)
Réponse du Guichet

Laurent Prades est une personne complètement authentique et peut-être, aussi, une synthèse sinon légendaire, composite de personnes et personnages dans le film "Notre Dame brûle". Dans notre dimension, Il s'agit bien du régisseur de la Cathédrale Notre Dame de Paris, chargé de l’inventaire des objets d’art du monument.
Bonjour,
"Né en 1975, diplômé en biochimie et biotechnologies, il est engagé comme régisseur de Notre-Dame de Paris en 2000 pour assurer, en lien avec le recteur et le directeur des services généraux, la gestion de l’événementiel et la supervision de la régie audiovisuelle. En 2009, il se voit confier la poursuite de l’inventaire du trésor initiée en 2004 par le chapitre, travail qu’il étend à l’ensemble de la cathédrale pour réaliser un inventaire général des objets d’art et reliques, somme compilant les données historiques, scientifiques et bibliographiques de près d’un millier d’objets dont il assure le suivi en lien avec les services de la DRAC Île-de-France."
Anne Hidalgo joue bien son propre "rôle" dans le film de Jean-Jacques Annaud tout comme les journalistes : Anne-Sophie Lapix, Carole Gaessler et Gilles Bouleau. Celui du régisseur est assuré par l'acteur Mikaël Chirinian.
En ce qui concerne le déroulé des événements, la volonté du réalisateur était de proposer à voir, sur le mode d’une plongée immersive chronométrée, les différentes étapes du drame.
Ainsi, le film est lui-même nourri de l’expérience particulière des protagonistes qu’il donne à voir.
La folle course du régisseur à travers Paris que vous évoquez semble donc tout à fait réelle. C’est en tout cas ce que confie Laurent Prades au micro d’Europe 1, quelques jours après les faits (17.04.2019)
Ce film qualifié de docu-fiction catastrophe ou docudrama, est donc une adaptation... relative de la réalité.
Jean-Jacques Annaud affirme : « Je ne fais pas l'enquête. Ce n'est pas le sujet de mon film. J'évoque les pistes telles qu'elles existent. J'ai fait un travail de journaliste en croisant les informations et témoignages. J'ai rencontré la plupart des intervenants sur l'incendie, jusqu'aux généraux des sapeurs-pompiers de Paris, ou au régisseur de Notre-Dame, Laurent Prades», explique le réalisateur à l'Agence France-Presse.
Afin de développer ces subtilités nous vous proposons les lectures suivantes :
Le documentaire et ses faux-semblants, François Niney
A l'enseigne du réel: penser le documentaire, Jean-Luc Lioult
Le documentaire, un autre cinéma, Guy Gauthier
Une vie pour le cinéma, Jean Jacques Annaud et Marie Françoise Leclère
Le docudrame, Fariborz Fallah, in Le Temps des médias 2005/1 (n°4), pages 223 à 237
Enfin, nous vous livrons des propos et positions du réalisateur interrogé sur son film :
Jean-Jacques Annaud : "j'ai tourné Notre-Dame brûle comme une fiction, sauf que c'est vrai"
"De quel genre Notre-Dame brûle relève-t-il ?
Je ne sais pas répondre à votre question. Disons que j’ai fait ce film à ma manière ! J’ai toujours voulu sortir des cases. Beaucoup de gens ont cru que La Guerre du feu et L’Ours étaient des documentaires. Notre-Dame brûle est une fiction basée sur les événements réels, si insolites soient-ils, d’une nuit mémorable. C’est un mélange de quelques images d’archives avec une reconstitution. Les spectateurs qui ont vu le film lors d’avant-premières m’en parlent comme d’un thriller.
Ce n’est pas un docu-fiction ?
Pas du tout ! Le docu-fiction n’a jamais les moyens dont j’ai disposés. J’ai conçu Notre-Dame brûle comme grand spectacle où l’on retrouve des éléments de film catastrophe et des éléments de suspense basés sur les leçons de Hitchcock.
Vous avez tourné ce film comme si c’était une fiction ?
Pareil ! Il y a, dans le cinéma de fiction, une manière de tourner qui permet de se rapprocher des drames que chacun vit et au spectateur de s’identifier avec ceux qu’il voit. Notre-Dame brûle est un film qui veut parler à nos émotions. Je l’ai donc tourné comme une fiction, sauf que c’est vrai.
Les spectateurs peuvent s’interroger sur la réalité de ce que vous montrez.
Lorsque je présente le film, je dis aux spectateurs : « Ce qui vous paraîtra invraisemblable est vrai, et ce qui vous semblera normal et plausible sera peut-être de la fiction, quelque chose d’imaginé pour les besoins du récit. » J’ai mis en ouverture cette citation d’Antoine Rivaroli : « Tout est vrai sans que rien paraisse vraisemblable », parce que je savais que les gens trouveraient mon film invraisemblable. Moi-même, pendant mes recherches, j’ai eu le sentiment que seuls des scénaristes de Hollywood avaient pu imaginer ce que je découvrais. Dans l’équipe des pompiers de premier secours qui arrive à la cathédrale, il y a deux jeunes femmes, alors que les femmes ne représentent que 1 % des pompiers et ne vont que très rarement au feu. On se dit que c’est une vision de cinéma, mais c’est la réalité. Les exemples de ce genre sont innombrables."
Pour cerner davantage les volontés du cinéaste, nous vous invitons également à prendre connaissance de cet entretien de Jean-Jacques Annaud avec Corinne Pelissier (France Inter, 12 mars 2022)
Réponse rédigée avec l'aide de E.R.qui est vivement remerciée.
Bonne journée.
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