Quelle créatrice de mode africaine est actuellement en vogue en Afrique et dans l'hémisphère nord ?
Question d'origine :
Bonjour,
quelle créatrice de mode africaine serait actuellement en vogue, et en Afrique et dans l'hémisphère nord?
Je cherche plutôt quelqu'un qui travaille en Afrique (pas à l'extérieur) mais qui réussit à intéresser le monde entier pour ces créations (pas seulement le marché africain).
Merci pour votre réponse.
Cordialement,
Réponse du Guichet
À Lagos au Nigeria, véritable capitale de l'industrie africaine du textile, mais aussi au Ghana, au Kenya, au Sénégal ou encore en Côte d'Ivoire, une nouvelle génération de créatrices s'est saisie de la mode pour raconter la diversité des histoires du continent. Nous présenterons cinq créatrices aux formes d'expression différentes : Sarah Diouf, Amaka Osakwe, Aisha Obuobi, Lafalaise Dion et Adama Ndiaye.
Bonjour,
Vous souhaiteriez connaître le nom d'une créatrice de mode d'Afrique (hémisphère nord), à rayonnement international. Nous vous présentons quelques créatrices parmi une scène africaine contemporaine rayonnante et aux formes d'expression plurielles.
- Sarah Diouf, créatrice de mode installée au Sénégal (élevée en Côte d’Ivoire par des parents d’origine sénégalaise, congolaise et centrafricaine), a crée en 2016 la marque Tongoro ("étoile" dans la langue sango parlée en République centrafricaine). C'est une marque de mode pour hommes et femmes qui influence aujourd'hui et qui est le fruit de son propre métissage culturel. Son objectif à long terme est de favoriser le développement économique et social des travailleurs artisans d’Afrique de l’Ouest. (Instagram Tongoro)
- Amaka Osakwe, créatrice de mode nigériane, a créé son label MAKI OH en 2010, à Lagos. Mondialement reconnue aujourd’hui parmi les grandes marques nigérianes, ses vêtements sont portés par une très grande diversité d’artistes. Sa technique de peinture à l’indigo, qui trouve ses racines dans des traditions textiles nigérianes séculaires a notamment fait sa renommée. (Instagram Maki Oh)
- Aisha Obuobi, créatrice de mode ghanéenne a créé la marque de luxe, Christie Brown, en 2008 à Accra et a remporté le prix du designer émergent de l’année en 2009 lors de la semaine de la mode Arise Africa à Johannesburg. En 2013, la marque s’associe à l’Ethical Fashion Initiative et présente sa collection sur le défilé d’Altaroma. (Instagram Christie Brown)
- Adama Ndiaye, créatrice de mode sénégalaise, connue en tant qu’Adama Paris, nom de la marque qu’elle a créée, est à l’origine de plusieurs événements internationaux dont la Black Fashion Week qui se déroule depuis 2010 dans de grandes villes internationales. Ses créations souvent en pagne et tissés localement par des artisans sénégalais reflètent ses multiples voyages entre L'Occident et L'Afrique. (Instagram Adama Paris)
Lafalaise Dion, créatrice de mode ivoirienne, a créé en 2018 sa toute première pièce, une coiffe sertie de cauris (petits coquillages issus de l'Océan Indien), qu'elle porta pour se rendre au Chale Wote Street Art Festival d’Accra, au Ghana. Elle s'inspire des tenues des danseuses de temate (danse traditionnelle wobé), "une manière, dit-elle, de me réapproprier mon histoire, de revendiquer le sens et la valeur de ces coquillages d’avant la colonisation". Selon "Jeune Afrique", Elle devient encore plus connue à l'international, quand en 2019 la star Beyoncé arbore dans son clip Spirit une de ses créations, qui porte le nom de Lagbaja, du nom du chanteur et musicien nigérian lui-même masqué. (Instagram Lafalaise Dion)
Lafalaise Dion s'exprimant dans le magazine panafricain francophone Jeune Afrique : J'ai découvert comment [les cauris] étaient utilisés par nos ancêtres, leur portée spirituelle, mystique, esthétique et culturelle. [...] Ils ont été de véritables objets de divination et ont aussi été utilisés comme monnaie.
Voici maintenant quelques pistes bibliographiques plus générales sur la création de mode africaine contemporaine.
Emmanuelle Courrèges est l'autrice de la première monographie consacrée à la mode venue d'Afrique et parue en 2021 Swinging Africa, le continent mode. Le titre évoque d'ailleurs l’effervescence équivalente qu'a connue la mode anglaise lors du Swinging London des années 1960.
Fondatrice de Lago54 (plateforme de promotion et de représentation de la scène mode africaine), elle détaille de façon passionnante, dans ce livre très illustré, les textiles mais aussi les histoires racontées par ces créations.
Le magazine L'Obs, dans son article paru le 25 novembre 2021, se penche aussi sur la renommée internationale de la création de mode africaine contemporaine et donne la parole à Liz Gomis, fondatrice en 2019 de OFF TO, le tout premier magazine lifestyle dédié au continent africain :
Les créateurs d'Afrique ont toujours existé et ont toujours intéressé l'Occident. Mais on parlait alors de "niche". Ce qui change aujourd'hui, c'est qu'ils deviennent mainstream. [...]
En se libérant du biais colonial, les artistes d’Afrique se réapproprient leur histoire et leur culture.[…] Dans la mode, ils délaissent le wax -à l’origine importé d’Indonésie par les colons hollandais-, pour se tourner vers des tissus traditionnels comme l’indigo ou le kenté.
Dans son livre Oh ! AfricArt, consacré à toutes les formes d'art venues d'Afrique, la journaliste Elisabeth Tchoungui utilise quant à elle l'expression de "narrations postcoloniales" et met en avant un continent d'Afrique pluriel aux formes d'expression diverses, réfutant l'idée d'un continent culturellement homogène.
Ainsi, à Lagos au Nigeria, véritable capitale de l'industrie africaine du textile, mais aussi au Ghana, au Kenya, au Sénégal ou encore en Côte d'Ivoire, une nouvelle génération se saisit de la mode pour raconter la diversité des histoires du continent.
En guise de conclusion, rappelons la présence cette année de la Biennale d'art Révélations (9-12 juin 2022) à Paris, qui a été suivie par Africa Fashion au Victoria et Albert Museum à Londres (juillet 2022 à avril 2023), une grande exposition consacrée à la création africaine, des lendemains de la Seconde guerre mondiale à nos jours.
Bonne journée.