Y-a-t-il eu des migrations depuis l'Alsace et la Lorraine vers l'Autriche ?
Question d'origine :
Bonjour
Je cherche à savoir s'il y eu des migrations depuis l'Alsace et la Lorraine vers l'Autriche au 18 ou 19 siècle
Merci
Réponse du Guichet

Dès le XVIIe siècle les Alsaciens et les Lorrains protestants fuient leur pays et émigrent en Autriche-Hongrie. Ce phénomène s’accroît au XIXe siècle.
Bonjour,
Pour des raisons religieuses, politiques ou économiques, les Alsaciens et Lorrains protestants fuient leur pays dès les temps modernes.
Les Archives du bas-Rhin expliquent que
Dès le XVIIe siècle, les persécutions religieuses ont mené les Alsaciens protestants à fuir. Poussées également à partir par les catastrophes naturelles et les famines, les populations migrantes se sont réfugiées aux Etats-Unis ou dans les pays de l’Est, notamment en Autriche-Hongrie.
Au XIXe siècle, l’Alsace connaît de nouvelles vagues d’émigration, d’abord vers la Russie, puis vers les Etats-Unis et l’Algérie.
Un premier type d’émigration est lié à la forte poussée démographique et à la pauvreté des populations alsaciennes : l’industrialisation progressive, les règles de partage des terres lors d’héritages et les rendements faibles de l'agriculture poussent les Alsaciens, essentiellement agriculteurs, à rechercher ailleurs un meilleur niveau de vie. Régulièrement, certains jeunes gens partent aussi pour échapper au service militaire, alors que l’armée en guerre est ravagée par les épidémies. Cela touche particulièrement les familles de confession mennonite, pacifistes et opposées à la conscription, qui émigrent afin de pouvoir pratiquer leur religion librement.
De 1804 à 1810, de nombreux Alsaciens suivent un grand mouvement migratoire rhénan vers l’Est, s’installant en Russie tsariste et en Ukraine.
Norman Laybourn consacre une étude approfondie à ces émigrations dans L'émigration des Alsaciens et des Lorrains du XVIIIe au XXesiècles : essai d'histoire démographique (1986, p. 211) :
Entre-temps, des milliers de catholiques et un certain nombre de protestants avaient quitté l’Alsace et la Lorraine, afin de fonder un nouveau foyer dans l’empire conquis par les Habsbourg sur les Tuircs, certains dans ‘larmée autrichienne
Il revient sur les raisons (religion guerre service militaire, raisons économiques) de l'émigration et note que
tous ces futurs émigrants répondaient d’autant plus facilement aux offres des recruteurs installés, selon les époques et les pays, à Kehl, Offenburg, Karlsruhe (Bade-Wurtemberg), à Bâle et environs, ainsi que dans le Palatinat- c’est-à-dire principalement outre-Rhin où les départs étaient particulièrement importants -qu’on leur offrait souvent certains avantages et des privilèges (….) Ainsi des centaines d’Alsaciens et de Lorrains sont partis vers de lointaines contrées ...
Dans l'article "Emigration alsacienne" (Annales de Démographie Historique, 1970; p. 490-491) , Jean-Pierre Kintz écrit effectivement qu'en 1770, année de disette, de nombreux Alsaciens partirent vers l’Empire Autrichien et présente le procès verbal des dépositions faites par des Emigrants alsaciens revenus de la Hongrie.
Le site alsacemonde.org reproduit l'article de B. Vogler, "l'émigration de 1815 à 1918" publié dans Elan en 1982 et propose une bibliographie des alsaciens dans le monde. Il consacre notamment une section à l'émigration en Europe et liste certaines sources abordant la question des migrations en Autriche.
Une brève synthèse sur ces émigrations est mise en ligne sur blamont.info.
Nous conclurons sur les propos de Jort Blazejewski ( « Pays de refuge, pays de départ. Regards croisés sur les dynamiques migratoires aux Pays-Bas autrichiens pendant la Révolution française (1789-1795) », Revue du Nord, 2020/3 (n° 436), p. 511-550)
Pendant la période révolutionnaire, à la fin du xviiie siècle, les provinces des Pays-Bas autrichiens sont des contrées d’importantes circulations humaines. Dès 1789, les bouleversements en France déclenchent une grande émigration qui se manifeste avec véhémence dans les régions limitrophes. Au-delà de la frontière française, les émigrés trouvent des refuges provisoires qui leur permettent de se mettre à l’abri et d’attendre la suite des événements. Comptant approximativement entre 150000 et 180 000 personnes au total, ces mouvements migratoires sont en réalité d’une grande diversité sociale, englobant, si l’on suit l’échelle hiérarchique de la fin de l’Ancien Régime, des catégories sociales très diverses allant des journaliers aux membres du haut clergé
Bonnes lectures.