Y a-t-il une philosophie de la rue, des cités, de l'urbain ?
Question d'origine :
Y a-t-il une philosophie de la rue, des cités, de l'urbain ?
Réponse du Guichet
A notre connaissance et d'après nos recherches, il n'existe pas Une philosophie de la ville, de la rue, des cités, de l'urbain mais bien des philosophes se sont emparés de la question en réfléchissant notamment sur l'organisation de la cité, à commencer par Platon et Aristote. Nous vous proposons une bibliographie d'articles et d'ouvrages traitant ce sujet.
Bonjour,
Vous pouvez commencer par lire les articles de l'Encyclopédie Universalis CITÉ ANTIQUE, disponible en bibliothèque et en accès à distance pour les abonnés de la BML via Europresse, et Ville de l'Encyclopédie philosophique mais aussi La République de Platon et Les politiques d'Aristote .
A propos de ces philosophes et de leurs écrits à ce sujet, il existe une littérature prolixe dont :
- La cité idéale de Platon : de l’imaginaire à l’irréalisable de Luciana Romeri, 2008
- Le problème de l’unité dans la cité : Platon, Aristote, Proclus de Jean-Marc Narbonne
- Cité et citoyen dans la Politique d’Aristote d'Edmond Lévy. In: Ktèma : civilisations de l'Orient, de la Grèce et de Rome antiques, N°5, 1980. pp. 223-248.
- Charbit, Yves. « La Cité platonicienne : histoire et utopie », Population, vol. 57, no. 2, 2002, pp. 231-260.
- Romeyer-Dherbey, Gilbert. « L'un et l'autre dans la cité d'Aristote », Revue philosophique de la France et de l'étranger, vol. 130, no. 2, 2005, pp. 191-202.
Voici également une courte bibliographie d'ouvrages édités entre 1982 et 2016 sur le sujet.
- Un philosophe en ville : essais : introduction à la philosophie de l'urbain / Thierry Paquot, 2016
Rares sont les philosophes sur le "front urbain", alors même que l'urbanisation planétaire transforme tous les territoires et les modes de vie, et multiplie les brèches qui ne cessent de grandir entre les inclus et les exclus... C'est à une philosophie de l'urbain qu'invite Thierry Paquot en s'attaquant à des questions trop souvent minimisées : les portes et les murs, l'architecture de verre, les rythmes urbains, la place de ceux qui n'en ont pas (les SDF), ce qu'habiter veut dire, la rupture avec l'urbanisme, ce moment occidental de l'urbanisation productiviste... Pour traiter ces thèmes qui concernent chacun d'entre nous, Thierry Paquot opte pour l'écologie comme démarche qui croise les processus, la transversalité et l'interrelation. [source : Editeur]
- Philosophie de l'environnement et milieux urbains / Thierry Paquot (dir), Chris Younès (dir), 2010
Dans une vision transversale, cet essai ouvre des pistes innovantes pour combler le vide épistémologique qui caractérise le domaine de la philosophie de l’environnement urbain. Le croisement de ces diverses réflexions aboutit, in fine, à développer une nouvelle conception de l’aménagement et de l’architecture, une conception qui tienne compte de notre "être au monde". La "philosophie de l’environnement et des milieux urbains ouvre la philosophie au devenir urbain de l’être, tout comme elle conduit à renouveler la compréhension du vivant en interaction avec les humains, et ce que ces derniers désignent par la "nature" .
Source : Pour une approche philosophique de l’environnement urbain, Nonfiction
- La cabane et le labyrinthe / Henri Gaudin, 2000
Les vieilles villes nous livrent des trésors d'espace, des agencements bizarres, des topologies rusées qui en font ce labyrinthe où la pensée architecturale devrait se vivifier. Celle-ci s'épuise dans un système de composition hérité du " clacissisme " et qui n'est jamais qu'un cas particulier parmi tous les types d'assemblements possibles. Si l'architecture est bien la science des agglomérations, ce sont ces agencements qu'il nous faut découvrir à travers nos promenades, analyser brisures, décalages, glissements, face à face, pointer ce que la ville doit au parcellaire, aux intentions minuscules, au mode mineur, débusquer combien, si les grands dessins et les longues pensées l'ont parfois marquée de leur sceau de Beauté, le mythe néo-classique de l'extension en a provoqué la perte, a fait des villes nouvelles, des cimetières. Pourquoi cette morale de la distance, cette séparation, ce monde des exclusions quand la ville disait celui des proximités infinies, des parentés et de l'échange ? C'est cette interrogation qui sous-tend notre réflexion.
- Du déchet : philosophie des immondices : corps, ville, industrie / Cyrille Harpet, 1999
Ce qu'il y a de plus important à étudier dans une société, ce sont les tas d'ordures" devait s'exclamer un jour Marcel Mauss face à ses élèves quelque peu interloqués. Le déchet, masse diétritique, les immondices offrent alors au philosophe la possibilité de réactiver les problématiques du corps et de l'esprit, des savoirs, des représentations et des pratiques relatives aux matières abjectes, des modes de gestion de l'espace urbain (la ville), des activités sous-produits issus des activités industrielles, et ainsi de passer de l'excrémentiel au nucléaire. Non plus obstacle au dialogue ou impropre à la réflexion, le déchet a beaucoup à nous dire lorsque l'on sait le faire "parler". Aujourd'hui, pour qui s'intéresse à l'homme, au développement des sciences et des techniques, pour qui tente de comprendre l'ensemble des pratiques de gestion et de maintien de la vie en société, il convient de s'affranchir de la répulsion que provoque l'abject. Le déchet garde sa valeur épistémologique. Il sert plus d'élément d'analyse à part entière et ne serait plus à "balayer du revers de la main" : le déchet élevé au rang de signe, de symptôme, de marqueur, d'indice ou d'indicateur des modes d'existence et d'expériences humaines revient à se situer directement au coeur des divers enjeux contemporains que sont les formes de discriminations sociales (l'autre désigné comme "déchet"), les atteintes aux espaces de vie et à l'environnement. Il reste un objet privilégié d'une aventure intellectuelle et humaine dont l'auteur s'est efforcé de tracer certaines étapes fondamentales.
Source : 4e de couv.
- Le Droit à la ville, Henri Lefebvre, 1968
retrace à grands traits l'épopée urbaine (visiblement en suivant de près Lewis Mumford, dont La Cité à travers l'histoire venait de paraître en français, au Seuil, en 1964), en insistant sur le couple « urbanisation/industrialisation ». Il questionne également une « métaphore pas claire », celle de « tissu urbain » qu'il rapproche (sans en dire plus, malheureusement) « du concept d?écosystème ».
[...]
Le second chapitre rappelle que la philosophie est fille de la ville, que celle-ci s'oppose à la campagne, qu'elle est le lieu de la consommation et également du spectacle. Ensuite, il dénonce la médiocrité des connaissances sur la ville, évoque « l'homo urbanicus » (commettant une erreur de latin, car il convient de dire homo urbanus) et suggère de considérer l'urbanisme comme une « idéologie ». « Peut-être devrions nous ici, écrit-il avec une lumineuse perspicacité, introduire une distinction entre la ville, réalité présente, immédiate, donnée pratico-sensible, architecturale et d'autre part l'urbain, réalité sociale composée de rapports à concevoir, à construire ou reconstruire par la pensée. » Comme il se doute de l'importance de cet apport intuitif plus que conceptualisé, il précise : « La vie urbaine, la société urbaine, en un mot l'urbain ne peuvent se passer d'une base pratico-sensible, d'une morphologie. Ils l'ont ou ne l'ont pas. » D'où le chapitre suivant, titré « Continuités et discontinuités », qui insiste sur la diversité des formes urbaines et le conduit à définir la ville « comme projection de la société sur le terrain, c'est-à-dire non seulement sur le site sensible mais sur le plan spécifique, perçu et conçu par la pensée, qui détermine la ville et l'urbain. » Cette définition, à ses yeux provisoire et première, va devenir parole d'évangile pour de nombreux enseignants des écoles d'architecture issues de l'après-éclatement des Beaux-arts, dès la rentrée 1969, en une myriade d'unités pédagogiques d'architecture, futures écoles d'architecture. Il propose d'étudier la ville comme langage et aussi écriture, conseille de ne pas oublier les signes qu'elle manipule, les symboles qu'elle entretient, bref toute une sémiologie qu'il convient d'explorer. Il revient sur son constat dialectique (Henri Lefebvre ne reniera jamais son hégélianisme de jeunesse) : la résolution de l'opposition ville/campagne est l'avènement d'un troisième terme, l'urbain, qui à son tour sera secoué par une nouvelle contradiction, conduisant à son dépassement, et ainsi de suite. Il interroge : « La société urbaine se constituant sur les ruines de la ville, comment saisir les phénomènes dans leur ampleur, dans leurs contradictions multiples ? C'est là le point critique. La distinction des trois niveaux (processus global d'industrialisation et d'urbanisation ? société urbaine, plan spécifique de la ville ? modalités de l'habiter et modulations du quotidien dans l'urbain) tend à s'effacer, comme s'efface la distinction ville-campagne. Et cependant cette différence des trois niveaux s'impose plus que jamais pour éviter confusion et malentendus, pour combattre les stratégies qui trouvent dans cette conjoncture une occasion favorable en dissolvant l'urbain dans la planification industrielle ou/et dans l'habitation. »
Source : Paquot, Thierry. « Redécouvrir Henri Lefebvre », Rue Descartes, vol. 63, no. 1, 2009, pp. 8-16.
- La ville sans qualités / Joseph Isaac, 1998
Son principal intérêt est de nous offrir une critique à la fois philosophique et esthétique de l'espace public.
Le caractère urbain de l'espace d'une activité tiendrait ainsi à cette capacité à « faire
d'heureuses découvertes par hasard », à découvrir une chose ou une situation alors qu'on en cherchait une autre ».
« Compétence du citadin » à faire ces heureuses découvertes, ou qualité de l'espace à les occasionner ? Dans la
« densité des activités et des engagements du citadin, caractéristiques du milieu urbain », où est l'effet, où est la cause ? Quelle est la part de l'espace,
celle du citadin, dans la multiplication des zones de contiguïté des activités et des cadrages possibles d'une même activité à partir d'engagements annexes qui
viennent l'éclairer à l'occasion et par ailleurs ? Philosophique, la démarche d'Isaac Joseph laisse la question ouverte, l'intérêt d'une caractérisation essentiellement urbaine
de l'accessibilité étant de permettre de valoriser « le recadrage des activités », moyennant une capacité « de survol ou de balayage des possibles », ou de prélèvement alternatif
« de tel ou tel comportement disponible dans le registre des opportunités ». Dans cette optique, l'accessibilité se définit moins par le centrement exclusif sur un lieu que par sa capacité à interagir avec un autre lieu.Source : Gourdon Jean-Loup. Isaac Joseph, La ville sans qualités, 1998. In: Les Annales de la recherche urbaine, N°82, 1999. Les échelles de la ville. pp. 161-162.
- Après hier, avant demain, la ville : essai de poléonomie : approche théorique de l'architecture et de l'urbanisme selon des modèles philosophiques et systémiques / René Koechlin, 1988
- Essai de philosophie urbaine / Anne Cauquelin, 1982
Bonne journée.
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