Existe-t-il un concept philosophique ou psychologique du positif ?
Question d'origine :
Bonjour,
Existe t il un concept philosophique ou psychologique consistant à voir systématiquement un aspect positif dans une situation ou chez un individu?
Réponse du Guichet

L'optimisme correspond à la recherche systématique d'un aspect positif dans une situation ou un individu. Avant de passer dans le langage courant, ce terme a été utilisé pour décrire la Théodicée du philosophe Gottfried Wihelm Leibniz.
En psychologie, si la méthode Coué et la pensée positive ont été largement discréditées, la psychologie positive cherche à identifier les conditions et processus qui contribuent au fonctionnement optimal des individus, des groupes et des institutions.
Bonjour,
Le fait de voir un aspect positif dans une situation ou chez un individu correspond à ce que le langage courant dénomme optimisme.
D’après le Grand dictionnaire de la philosophie dirigé par Michel Blay pour Larousse, le mot a été utilisé pour la première fois en 1737 par les jésuites de Trévoux, dans les Mémoires pour l’histoire des sciences et des beaux-arts, pour caractériser la doctrine de Gottfried Wilhelm Leibniz.
Dans ses Essais de Théodicée, Leibniz postule que notre univers a été créé par Dieu. Or, Dieu choisit toujours le meilleur. On doit donc juger que notre univers est le meilleur possible. Cette position n’implique pas que chacune de ses parties est la meilleure possible, mais que l’agencement créé entre les parties bonnes et mauvaises est optimale, ces dernières venant mettre en valeur les premières. L’harmonie générale serait atteinte non par l’absence du mal, mais par un jeu de différences, contrastes et compensations.
Au cours du XVIIIe siècle, le terme optimisme prendra un sens de plus en plus général, s’appliquant à toute doctrine déclarant notre monde bon ou le meilleur possible.
Le poète Alexander Pope, dans son Essai sur l’homme, radicalisera la position de Leibniz. Pour Lui, «Tout ce qui est, est bien». Il considère donc que le bien n’est pas seulement dans le tout, mais aussi dans l’ensemble des parties.
Ce positionnement sera violemment critiqué par Voltaire dans Candide ou l’Optimisme, mettant en balance cet optimisme avec les souffrances des hommes.
Emmanuel Kant, quand à lui, abandonnera cet optimisme spéculatif. En effet, il considère que la raison ne peut juger des fins de Dieu. Il préconise donc un optimisme pratique, qui participe d’un dessein moral impératif : le parfait accomplissement de l’homme.
Bien entendu, si l’on élargit la focale sur la recherche du bonheur de manière plus générale, la production philosophie regorge de textes, et il nous sera bien impossible ici d’en faire une recension exhaustive.
Toutefois, de nombreuses anthologies existent, telles par exemple:
Les maîtres du bonheur / [textes réunis et présentés par] Catherine Golliau
Pour une anthologie de textes plus récents en lien avec votre sujet, vous pouvez également consulter
Oser l'émerveillement / Bruno Giuliani, Thierry Janssen, Alexandre Jollien... [et al.] ; [présenté par] Frédéric Lenoir et Leili Anvar
En psychologie, l’optimisme a également connu des heurs et malheurs divers.
Parmi les mouvements que l’on pourrait rapprocher de l’optimisme, figure bien entendu la méthode d’autosuggestion du psychologue et pharmacien Émile Coué. Cette méthode se base sur le pouvoir de l’imagination. Selon lui, toute idée qui se grave dans notre imagination tend à se réaliser dans l’ordre du possible. Il serait donc possible de conditionner favorablement notre esprit pour améliorer notre état physique et mental.
Dans le même ordre d’idée, la pensée positive se place résolument du côté de l’optimisme. Ce mouvement pseudo-scientifique a été créé en 1952 par le Pasteur Norman Vincent Peale. il en expose les fondements dans Le pouvoir de la pensée positive. Dans cet ouvrage, Peale suggère que l’on peut contraidre son esprit à devenir optimiste en toute circonstance, voire à agir sur le réel, ce qui donnera par la suite naissance à la loi de l’attraction.
Aussi bien la méthode Coué que la pensée positive ou la Loi de l’attraction ont toutefois été largement discréditées. Si elles font encore le bonheur des ouvrages mêlant développement personnel et ésotérisme, elles ne sont donc plus prises en compte par la recherche actuelle en psychologie.
La pensée positive ne doit pas être confondue avec la psychologie positive qui est, depuis sa fondation en 1998 par le psychologue Martin Seligman, au cœur d’une intense activité éditoriale et de recherche (publications sur la psychologie positive à la BmL). Contrairement à la pensée positive, et bien qu’elle soit elle aussi l’objet de vives controverses, elle ne prétend pas agir sur le réel par la puissance de la suggestion, mais plutôt renouveler l’épistémologie de la psychologie.
Ainsi, historiquement, la psychologie s’est largement construite sur l’étude des troubles psychiques pour tenter de mieux saisir le fonctionnement de l’esprit humain. La psychologie positive, elle, renverse la focale pour se concentrer non sur l’étude des psychopathologies, mais sur les mécanismes rendant les humains plus heureux, résilients ou optimistes. Elle s’intéresse donc en priorité à la santé, au bien-être et aux facteurs de résilience, et cherche à identifier les conditions et processus qui contribuent au fonctionnement optimal des individus, des groupes et des institutions.
Afin d’aller plus loin dans vos recherches, nous vous proposons de consulter les ouvrages suivants:
Les fondements de la psychologie positive / Charles Martin-Krumm
La psychologie positive / Rébecca Shankland
La face cachée de la psychologie positive : approche critique et perspectives / Michel Hansenne
Happycratie : comment l'industrie du bonheur a pris le contrôle de nos vies / Edgar Cabanas, Eva Illouz
Positivité toxique : se libérer de la dictature du bonheur pour aller (vraiment) mieux / Whitney Goodman
Nous vous souhaitons bonne lecture
Cordialement,
L'équipe du département civilisation