Je souhaiterais en savoir plus sur la mention de cas de léproserie à Lyon
Question d'origine :
Bonjour,
Je suis allée aujourd'hui à l'exposition " 8 siècles d'histoire hospitalière dans le Rhône et à Lyon " et je découvre qu'il y a eu des léproseries qui apparaissent à Lyon au XI° siècle. Or pour moi - et j'ai verifié dans ma Petite encyclopédie Médicale Hamburger - la lèpre est une maladie tropicale.
Merci d'éclairer ma lanterne .
Bien cordialement
Réponse du Guichet
Connue depuis l'Antiquité, la lèpre était présente en Europe au Haut Moyen-Âge. Des léproseries existaient en France et en Europe, de manière réglementée, depuis au moins les Ve-VIe siècles.
Bonjour,
Une autre équipe de notre Bibliothèque va vous répondre sous peu sur l’aspect régional de votre question.
Quant à nous nous nous appuierons sur la lecture du très bon article intitulé «Histoire de la lèpre» parue dans la Revue de biologie médicale (n° 319, nov-déc 2019).
On y apprend, entre autres, que:
«Connue depuis l’Antiquité, la lèpre est une maladie chronique qui est devenue épidémique au Moyen Âge, avant de disparaître en Europe à partir du XIVe siècle. […]On pense que la maladie sévissait probablement en Inde et en Chine avant le premier millénaire avant J.-C. […]Selon Galien (130-201), la lèpre sévissait à Alexandrie en raison de la chaleur du climat et des habitudes alimentaires (consommation d’escargots, de lentilles et d’âne !)
[…] Selon les sources historiques, la prévalence de la lèpre, rare en Europe durant la période romaine, a fortement augmenté au Moyen Âge. Cela est attesté par la découverte des stigmates osseux de lèpre sur les squelettes retrouvés entre le IVe et XIIIe siècle en France, en Angleterre, en Italie, en Hongrie, en Autriche et en Anatolie.
[…] Pendant le haut Moyen Âge, les pèlerinages vers les lieux saints ont commencé dès le IVe siècle. De nombreux échanges commerciaux avaient lieu par voie maritime avec le Moyen-Orient. En même temps, on assiste à de nombreuses invasions par les peuples d’Asie centrale vers l’ouest de l’Europe. Des preuves archéologiques attestent de l’existence de la lèpre en Asie centrale et en Ouzbékistan aux Ier-IVe siècles, suggérant que la maladie pourrait s’être répandue par les Avars, tribus mongoliennes pastorales qui envahirent l’Anatolie, l’Europe centrale et de l’Est entre le VIIe et le IXe siècle. La lèpre s’est alors implantée dans l’Empire byzantin, en Hongrie, en Autriche et en Italie.
[…]Les premières léproseries furent fondées aux Ve -VIe siècles, habituellement situées en dehors des villes mais proches des voies de communication pour faciliter la mendicité. Mentionnées en France par Grégoire de Tours (circa 538-594), ce sont d’abord des cabanes de bois que l’on brûlait à la mort du lépreux. En 643, l’édit du roi Lombard Rothari frappe les lépreux de « mort civile » en instituant le rituel du separatio leprosum qui réglemente leurs mises en marge de la société.
[…]Aux XIe -XIIe siècles, on remplace les cabanes de bois par des bâtiments en pierre, avec souvent des chapelles, où étaient hébergés les lépreux. En 1226, il est mentionné dans le testament de Louis VIII l’existence de près de 2 000 léproseries dans le royaume de France. »
Cordialement
Réponse du Guichet
Bonjour,
Aujourd’hui la lèpre est une maladie tropicale mais elle ne l’a pas toujours été.
Dans le Dictionnaire historique de Lyon à l'article Léproseries (pp. 764-766), on peut lire : « Même si Jules Michelet (1798-1874) a pu écrire: « Les croisés revenaient lourds de*lèpre et légers d’argent », il semble bien la terrible maladie ait existé dans le royaume de France depuis les temps les plus reculés. »
Il est indiqué que le concile réuni par l'évêque de Lyon Priscus en 583 institue un logis séparé pour les lépreux dans chaque ville. Il seront nourris et vêtus par l’Eglise pour ne plus vagabonder.
Charles Pétouraud indique "il y avait donc des lépreux à Lyon au 6e siècle, et le canon de ce concile est le premier texte officiel qui fasse allusion à la possibilité d’une léproserie lyonnaise …
A Lyon, où plus exactement de l’autre côté du Rhône, sur le mandement de Béchevelin, à l’emplacement du futur faubourg de la Guillotière, la présence d’une léproserie est mentionnée, au hasard d’un testament en date de 1146. Le bâtiment de cette léproserie de la Madeleine, ou maladrerie de la Madeleine, que complète une chapelle édifiée en 1203 par l’archevêque Renaud de Forez, sont approximativement situés à l’angle actuel des rues de la Madeleine et du Repos."
Il existait également les léproseries de :
- Saint-Irénée, ou léproserie Saint-Marcel ou léproserie du Griffon (ou Griffol) semble-t-il au bas des pentes de la Croix-Rousse vers rue Terraille, proche route de Genève (en dehors des fortifications car situées juste au dessus desTerreaux)
- Saint-Martin, proche de la voie d’Aquitaine (chemin des Fontanières aujourd'hui), près de la source de Choulans
- Saint-Pierre ou Balmont, proche des voies romaines de l’Océan et du Nord
Il semble qu’à partir du 16e siècle, la lèpre se fait de plus en plus rare : la "thérapie au mercure" était en vigueur.
En 1534, il y a quatre lépreux à Balmont. Ces lieux se vident mais sont parfois encore actifs au bénéfice des legs et donations
Des références :
Les léproseries lyonnaises au Moyen Age et à la Renaissance [Article]. 1 / Charles Pétouraud dr.es [Article]. 1 / Charles Pétouraud dr.
Les léproseries lyonnaises au Moyen Age et à la Renaissance [Article]. 2 / Charles Pétouraud dr. [Article]. 2 / Charles Pétouraud dr.
Les anciens hôpitaux de Lyon : léproserie de la Madeleine/ Dr Jules Drivon
La léproserie de la Madeleine : maladrerie de la Guillotière / Dr Jules Drivon
Un document de référence que la bibliothèque de Lyon ne conserve pas : Histoire de la lèpre de Jean Vitaux (2020)