D'où proviennent ces grandes dalles visibles près des pas de portes du Vieux Lyon?
Question d'origine :
Bonjour, sauriez-vous d'où proviennent ces grandes dalles (plutôt couleur blanc crème) que l'on voit au niveau des rigoles, de certains pas de portes dans les rues du Vieux Lyon?
Est-ce du réemploi?
Merci pour votre aide.
Réponse du Guichet

Bonjour, vous souhaitez connaître la provenance des dalles qui constituent les rigoles ainsi que certains pas de porte dans les rues du Vieux Lyon. D'après l'association Renaissance du Vieux Lyon, il semble que ces dalles aient été taillées dans la pierre de Villebois.
La pierre de Villebois, également appelée choin de Villebois, provient de la ville de Villebois, situé dans l'Ain, au bord du Rhône. C'est un type de calcaire beaucoup utilisé dans la construction des bâtiments lyonnais, notamment religieux. La situation des carrières en bordure du Rhône facilitait son acheminement jusqu'à Lyon.
La pierre de Villebois est une variété de calcaire fin, compact et peu fossilifère. Elle a été exploitée jusque dans les années 1970.
En réalité, malgré son aspect médiéval, le quartier Saint-Jean a été totalement restauré récemment (années 70), grâce à l'action de l'association Renaissance du Vieux Lyon, qui se bat depuis 1946 pour la préservation du patrimoine lyonnais.
Dans un article paru sur leur site le 7 décembre 2018, La rue Saint-Jean piétonne a 40 ans !, Louis Baldasseroni, doctorant en Histoire contemporaine, explique l'évolution de cette rue jusqu'à sa piétonisation en 1978 :
Au vu de sa faible largeur et de ses vieux pavés, on imagine que la rue Saint-Jean a toujours été piétonne, tant elle est inhospitalière pour tous les autres moyens de transport. Que nenni ! Elle n’est officiellement piétonne que depuis la décision du Conseil Municipal du 12 décembre 1977 et son inauguration le 7 décembre 1978. Cette image du Vieux-Lyon piétonnier ne nous apparaît comme une évidence que depuis quelques décennies (...)
La rue Saint-Jean, artère symbolique du quartier du même nom, n’était pas destinée à être une rue piétonne. Par sa grande densité de commerces en tant que rue principale du quartier et sa situation géographique d’axe Nord-Sud parallèle au quai de la rive droite de la Saône, cette rue est empruntée par des véhicules de toute sorte, sans que cela ne pose problème avant les années 1930. C’est d’ailleurs pour améliorer la circulation générale que les riverains demandent en 1889 la pose d’un revêtement pavé et qu’un élargissement de cette rue à 12 mètres est prévu à plus long terme. (...)
Le cheminement vers l’idée de piétonniser cette rue, ainsi que les quelques rues étroites qui en dépendent, naît progressivement à partir de la volonté de valoriser ce patrimoine. L’association Renaissance du Vieux-Lyon (RVL), créée en 1946 avec cet objectif, organise ainsi plusieurs évènements commerciaux ou festifs qui impliquent l’interdiction de la circulation dans la rue Saint-Jean et aux alentours. L’idée de réduire la circulation fait ainsi son chemin, ce qui permet à la municipalité Pradel d’appliquer plusieurs mesures dans ce sens, comme l’interdiction du stationnement en 1959 et la défense de transformer des rez-de-chaussée en garages en 1960. (...)
La première mention de l’idée de piétonisation se trouve en 1963, dans un rapport de l’association RVL à la suite du premier colloque « Cités et quartiers anciens ». Elle est rapidement écartée et reste absente des débats sur la création du secteur sauvegardé du Vieux-Lyon, premier de France, en 1964. Entre-temps, l’idée fait son chemin dans plusieurs villes, notamment à Rouen. L’association RVL, appuyée par les commerçants, arrive à convaincre une municipalité Pradel plutôt réticente de tenter un essai de piétonisation.
Par la suite, l’intense campagne de pression sur la municipalité pour la piétonisation aboutit à celle des rues de la République et Victor-Hugo en 1975 et relance la question de la piétonisation du Vieux-Lyon. Celle-ci est finalement obtenue, à la suite d’âpres débats dans le quartier, au Conseil municipal du 12 décembre 1977. Elle ne consiste pas simplement à interdire la rue Saint-Jean et les places qu’elle traverse aux automobiles, mais en un réaménagement complet de la rue. Des travaux d’un montant de 2,4 MF, financés au tiers par l’État, sont décidés pour la rue Saint-Jean, le reste du quartier devant suivre peu après. (...)
La forme de la rue rénovée marque une volonté de retour à un état antérieur, pour accompagner la mise en valeur historique du quartier. Ainsi, les trottoirs supprimés et le profil de la rue en cuvette avec un caniveau central font penser aux rues d’avant le XVIIIe siècle. Si les pavés déjà présents sont réutilisés, un dallage vient s’ajouter pour marquer les entrées des immeubles et souligner certains bâtiments marquants. Le but de cet aménagement original est d’amener le passant à s’intéresser aux éléments patrimoniaux, sans pour autant encombrer la rue de mobilier urbain moderne : les dalles sont conçues par leur architecte Marc Moulins comme un « guide muet » des façades qui les entourent.
Le pavage et le dallage font désormais partie de la mise en valeur du quartier au même titre que la restauration des bâtiments, si bien que lors de sa réfection en 2018 (l’aviez-vous remarquée ?), la municipalité a simplement voulu rendre les pavés plus lisses et épaissir leurs joints pour les rendre moins glissants par temps de pluie.
Dans la revue Renaissance du Vieux Lyon, le Bulletin de liaison de mai 1978, on peut lire :
Les travaux doivent commencer fin mai / début juin. La rue Saint-Jean, sur toute sa longueur, les Places du Change, du Gouvernement, et de la Baleine seront, ainsi que la rue des Trois Maries, rendues aux piétons. Les travaux devraient prendre fin en décembre 1978 (pourquoi pas pour le 8 décembre ?).
Des réunions techniques, organisées par la ville de Lyon et les bâtiments de France, ont réuni diverses Associations du quartier afin de déterminer le choix des matériaux à employer : pavés du Vieux Lyon, dalles de pierre en signalisation devant les entrées de boutiques et des immeubles, caniveaux centraux en pierres (pierres récupérées aux anciens Abattoirs de la Mouche).
Pour aller plus loin, un article paru sur le site La vie en pierre relate l'histoire des matériaux utilisés pour la construction de Lyon à travers les siècles.
Vous pourrez également trouver dans la salle de la documentation régionale, au 4e étage de la bibliothèque de Lyon Part-Dieu, des ouvrages sur la géologie dans notre ville, comme Promenade géologique à Lyon.Vieux Lyon ou Promenade géologique à Lyon : colline de Fourvière.
Espérant avoir répondu à votre question, nous vous souhaitons une bonne journée