Je souhiaterais connaître la signification d'une gravure sur une faucille
Question d'origine :
Bonjour à tous,
Sur ma faucille est gravé ce sceau contenant une croix de pattée et un corps de chasse. J'aimerai en connaître l'origine ou sa signification. Pouvez-vous m'aider ?

Réponse du Guichet

Nous n'avons pas trouvé l'origine précise du poinçon imprimé sur votre faucille, mais il nous fait penser à un insigne militaire utilisé au moins depuis l'époque napoléonienne par les chasseurs à pied.
Bonjour,
Il nous a été impossible de trouver l'origine précise de votre objet mais voici quelques éléments qui nous ont paru intéressants.
Tout d'abord, nous nous sommes renseignés sur l'héraldique : il se trouve que les instruments de musique sont un motif courant, appelé huchet lorsqu'il est, comme sur votre photo, dépourvu d'attache. Voyez l'article Liste des meubles héraldiques :
Le cor (ou cor de chasse) instrument à vent utilisé pour la chasse mais aussi pour la guerre.
Les anneaux qui le cernent sont les viroles ; le cordon qui permet de le suspendre est le lien, ou attache (s'il en est dépourvu, on le nomme huchet).
Il peut être embouché (ou enguiché), virolé, lié (ou attaché), pavillonné, suivant que, respectivement, son embouchure, ses viroles, son lien ou son pavillon sont d'une couleur particulière (pour certains auteurs, enguiché est synonyme de lié).
La position par défaut est unanimement reconnue comme ayant embouchure et pavillon dirigée vers le chef, en revanche les avis sont très partagés quant à la place de l'un et l'autre. « L'embouchure ou enguichure des cors se trouve ordinairement à senestre selon certains mais à dextre selon d'autres, au cas contraire le cor est “contourné”. La représentation de l'enguichure à dextre est cependant plus courante. »
[...]
Le huchet (ou cornet) est un petit cor de chasse, mais dépourvu de lien, ou attache, ce qui le différencie clairement des cors, trompes, grêliers et autres olifants. Les anneaux qui le cernent sont les viroles.
Sa position par défaut est celle du cor. Il peut être embouché (ou enguiché), virolé, pavillonné, suivant que respectivement, son embouchure, ses viroles ou son pavillon sont d'une couleur particulière (pour certains auteurs, enguiché est synonyme de lié).
On nomme huchet le cor de chasse qui n'a point d'attache, d'après le Dictionnaire encyclopédique de la noblesse de France de Nicolas Viton de Saint-Allais, Paris, 1816.
D'azur, au cor de chasse d'or, qui est de Philix de Saint-Viance, en Limousin.
D'or, à trois cors de chasse de sable, enguichés, liés et virolés d'azur, qui est de Nesmond, en Normandie.
De gueules à la bande d'or chargée de trois alérions de sable, et accompagnée de deux huchets d'or, qui est de Saint-Gengoux-le-National.
L'association de la croix et du cor n'est d'ailleurs pas neuve, puisqu'on la trouve sur une monnaie battue par le prince Guilhem Ier d’Orange, au XIIè siècle, et qu'on peut découvrir dans l'article de Laurent Macé, Icône du saint, figure du héros : la déclinaison du cor sur les sceaux et les monnaies dans la Provence et le Languedoc des XIIe-XIIIe siècles, in Entre histoire et épopée. Les Guillaume d’Orange (IXe-XIIIe siècles),Presses universitaires du Midi, 2006, p. 135-161, consultable sur books.openedition.org.
Cependant toutes les sources nous montrent que le cor héraldique n'est pas l'instrument de fanfare de la famille des cuivres que nous reconnaissons sur votre poinçon, mais d'une corne, ou olifan.
Il s'agit donc d'une fausse piste. Toutefois, on trouve des le poinçons évoquant notre instrument, par exemple dans le Dictionnaire des poinçons officiels d'Emile Beuque lisible en version numérisée sur le site Inter'Or :
Cor de chasse – poinçon FRANCE
Poinçon de contremarque utilisé à Provins sous J. Alaterre Fermier général de 1768 à 1774 à la marque des ouvrages en argent à 958 millièmes et de ceux en or à 916 millièmes. Provins (Seine-et-Marne) appartenait à la Généralité de Paris.
Siècle de début: 18 – Siècle de fin: 18
Nous n'avons pas pu davantage creuser cette piste, car les répertoires de poinçons que nous conservons sont tous consacrés à ceux des orfèvres, et à l'évidence, votre symbole est gravé sur un outil de travail.
C'est peut-être du côté militaire qu'on se tournera pour plus de résultats : le site de la Fédération nationale des anciens des forces françaises en Allemagne et en Autriche propose en effet un très large répertoire d'insignes organisé par armes. De très nombreux régiments se servent d'un cor de chasse sur les leurs, notamment dans l'infanterie (5ème Bataillon de Chasseurs à pied Rastatt, 16ème Bataillon de chasseurs à pied Saarburg, 19ème Groupe de chasseurs à pied Villingen-Schweinnigen, 30ème Bataillon de Chasseurs à pied Saarburg...) et la cavalerie blindée (11ème Régiment de Chasseurs de Chars Berlin Napoléon, 3ème Régiment de chasseurs d’Afrique Weingarten, 7ème Régiment de Chasseurs d’Afrique Pirmasens...).
Mais que ferait un insigne militaire sur un outil agricole, nous direz-vous ? Eh bien, ce n'est qu'une hypothèse, mais peut-être l'article de Frédéric Lemaître, Les camps napoléoniens d'Étaples-sur-Mer (camp de Montreuil 1803-1805). Recherches en cours, Revue du Nord, 2010/5 (n° 388), p. 39-49, nous donne-t-il une piste. Cet article, réflexion sur la possibilité d'approcher la vie dans un camp militaire par l'archéologie - c'est-à-dire par les restes matériels - montre d'une part que des objets de toutes sortes faisaient partie du petit monde des armées napoléoniennes, et notamment des outils - d'autre part que le cor de chasse était présent sur les boutons d'uniforme de certaines unités :
5. LE MOBILIER ARCHÉOLOGIQUE De nombreux objets, égarés ou rebutés par les soldats, ont bien évidemment été découverts au cours de ces recherches. Ils proviennent essentiellement des baraques, des couches d’occupation et des remblais qui les scellent, mais également des cheminées, parfois mêlés aux cendres et aux charbons de bois du dernier foyer. Ce sont souvent de petits objets en métal ou en os, qui ont échappé au regard des visiteurs et des démolisseurs, en particulier les monnaies. Ils se rapportent à différentes catégories militaires ou civiles et domestiques (fig. 8).
Les baraques livrent également des céramiques, complètes ou fragmentaires, des restes fauniques, des outils, des pipes en terre blanche…, qui permettent à la fois d’appréhender le quotidien des soldats en campagne au début de l’Empire, mais aussi ce que les archéologues appellent dans leur jargon « la culture matérielle », qui est finalement, et de manière paradoxale, totalement méconnue. Le mobilier dans son ensemble n’a pas encore été étudié de manière raisonnée et statistique ; les objets ont simplement été identifiés.
Les objets militaires sont naturellement les plus nombreux, et les éléments d’uniforme prépondérants, les boutons notamment. Plus d’une centaine ont été trouvés. Ils se rapportent pour une majorité d’entre eux aux deux régiments présents, mais des boutons d’autres unités ou armes sont également attestés. Ils sont en alliage cuivreux et sont timbrés d’un « 6 » dans un cor de chasse, ou d’un « 69 ». Ils se déclinent en deux ou trois modules (fig. 9). Les boutons révolutionnaires sont encore très présents, qui montrent le faisceau de licteur surmonté d’un bonnet phrygien. Ces baraques livrent aussi de nombreux boutons en tombac décorés de fines ciselures (fig. 10). Plusieurs belles boucles en alliage cuivreux sont recensées. Certaines à queue d’aronde sont des boucles de col ou de culotte. D’autres, de grande taille, sont des boucles de chaussure. On note également la présence de ferrets d’aiguillettes. Quelques rares objets en matière périssable ont été exhumés, et principalement un gland en fil d’argent étonnement bien conservé (L : 25 mm).
Si on en croit donc le Musée des armées et Wikipédia, votre faucille pourrait avoir équipé des chasseurs à pied... mais sans certitude, car nous n'avons trouvé nulle part de mention d'outils de ce genre dans de telles unités.
Nous avons donc contacté le Musée des armées mais aussi le Cabinet des poinçons de l'Imprimerie nationale qui nous éclaireront peut-être, et dont nous vous transmettrions évidemment une réponse éventuelle.
Bonne journée.
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