Pourquoi dans les bibliothèques retrouve-t-on un 'certain type' de collections?
Question d'origine :
Pourquoi dans les bibliothèques retrouve-t-on un 'certain type' de collections? Un ami m'a dit 'on sait un peu quels livres on va trouver en bibliothèques'-les livres en bibliothèques ne sont pas les mêmes que les livres vendus en ligne etc-comment cela se fait-il?
Réponse du Guichet
Les bibliothécaires choisissent d'acquérir des documents répondant aux critères fixés par la politique documentaire de leur établissement : qualité, pluralisme des idées, encyclopédisme des sujets traités... mais aussi des critères correspondant à son environnement, aux moyens disponibles et aux objectifs particuliers qu'ils se fixent. Si le premier groupe de critères semble être assez commun à l'ensemble des bibliothèques publiques, le second sera propre à chaque établissement. Il y a donc peu de chances pour que vous retrouviez exactement les mêmes documents d'une structure à l'autre.
Bonjour,
Nous ne voyons pas trop en quoi les livres présents sur les rayons des bibliothèques seraient différents de ceux vendus en ligne car, pour l'immense majorité d'entre eux, ils sont commercialisés pour le grand public par des éditeurs reconnus. Quant à la première remarque de votre ami, veut-il dire par là que ce sont les mêmes thématiques qui sont traitées au sein des documentaires ? Les mêmes fictions que l'on peut lire dans les rayons réservés à la littérature ? Ou bien que ce sont les mêmes titres publiés par les mêmes éditeurs que l'on retrouve dans toutes les bibliothèques ?
Voici quelques éléments de réponses à ses remarques.
Les livres que vous trouverez sur nos rayons sont les mêmes que ceux que l’on peut acheter en ligne mais les bibliothécaires acquéreurs opèrent une sélection drastique. Aucune bibliothèque (sauf la bibliothèque nationale de France qui perçoit le dépôt légal) n’aura les moyens financiers et logistiques d’acquérir l’intégralité de la production éditoriale.
Dans la mesure où le développement des collections d'une bibliothèque dépend des espaces disponibles (des locaux ouverts au public et des réserves appelées « magasins »), de l’importance des budgets d'acquisition, et surtout de la politique documentaire élaborée par l’établissement, il n’existe pas deux collections semblables d’un établissement à l’autre. Les bibliothécaires doivent en outre faire des choix en fonction des besoins du public, du territoire dans lequel est implantée la structure, de ses missions… Il existe peu de chances de retrouver exactement la même collection de livres d'une bibliothèque à l'autre.
Toutefois, les bibliothèques publiques, devant toutes répondre aux mêmes missions d’information, de formation, de culture et de loisirs de ses usagers, achètent des documents ayant peu ou prou les mêmes caractéristiques. Un code de déontologie a été rédigé par l'ABF (Association des bibliothécaires de France) qui explique :
Le personnel des bibliothèques veille à ce que la pluralité des ressources favorise l’autonomie de chacun, en recherchant l’objectivité et l’impartialité, et en respectant la diversité des opinions.
Dans ce sens, il s’engage dans ses fonctions à :
mettre à disposition des publics l'ensemble des ressources et méthodes nécessaires à la construction d’une pensée complexe et autonome : compréhension éclairée des débats publics, de l'actualité, des grandes questions historiques, philosophiques, scientifiques et sociétales ;
Leurs collections tendent donc à l'encyclopédisme et sont caractérisées par la diversité et l'universalité afin de répondre aux goûts et aux besoins de tous. Les collections témoignent des différents courants de pensée existants, permettant de comprendre le monde, son passé et d'appréhender son avenir. Ce sont des documents de qualité et mis à jour.
Vous pourrez lire sur le site de la Bibliothèque municipale de Lyon, ses principales missions présentées, ainsi que sa Charte documentaire dont voici quelques extraits :
Principes directeurs
4.1 Encyclopédisme. Les bibliothèques publiques doivent donner accès à l’ensemble des domaines du savoir et de la création. Cette notion peut se concevoir et s’appliquer à l’échelle du réseau. Il est important de ne pas confondre cette notion d’encyclopédisme avec une tentative d’exhaustivité. Donner accès à l’ensemble des domaines ne signifie pas posséder la totalité des connaissances dans tous les domaines. Une sélection est opérée dans chaque domaine, en privilégiant la qualité et la diversité et en veillant à adapter l’offre aux attentes et aux usages des publics.
4.2 Pluralisme des courants et des opinions. La bibliothèque doit s’assurer de l’expression du pluralisme culturel dans son offre documentaire et la préserver de toute confiscation idéologique. La bibliothèque est un lieu de libre réflexion et concourt à développer le sens critique de ses usagers. L’article 7 de la Charte des bibliothèques affirme que la bibliothèque doit être représentative « de tous les courants d’opinion, dans le respect de la Constitution et des lois. »
4.3 Complémentarité des offres au sein des structures du réseau d’une part et avec les autres institutions documentaires du territoire d’autre part : bibliothèques universitaires, spécialisées, associatives, scolaire, centres de ressources et de documentation… Cette complémentarité concerne aussi bien le contenu de l’offre que les supports, les usages et les modes d’accès.
4.4 Actualité des contenus, qui doivent rester pertinents et régulièrement renouvelés et maintenus à jour.
Les acquisitions récentes doivent venir alimenter les collections courantes destinées à la lecture publique et de référence mais également aux fonds qui constitueront le patrimoine de demain. Le maintien d’une collection courante renouvelée signifie une attention portée aussi bien aux documents entrant dans la collection qu’aux documents devant en sortir. C’est bien l’ensemble de la collection qui est considéré et non chaque document en lui-même.
4.5 Supports multiples et hybrides. Les premiers principes portant sur les contenus, il importe de souligner qu’ils s’appliquent à tous les types de documents. L’offre documentaire de la bibliothèque ne se limite pas aux supports traditionnels que sont les documents imprimés mais peut également être constituée de tout support audio, vidéo, multimédia ou restant à imaginer
Autres exemples de chartes de collections :
- Charte des collections de la bibliothèque de Soustons
- Charte d'acquisition de la bibliothèque du Petit Quevilly
Vous verrez que les grandes orientations de ces établissements se recoupent. Les bibliothécaires se tournent par conséquent vers les mêmes maisons d'édition qu'ils considèrent de qualité et plutôt grand public, ce qui peut peut-être donner l'impression à votre ami que l'on retrouve le même type de documents d'une structure à l'autre.
Nous vous laissons parcourir ce billet du carnet de notes de Bertrand Calenge qui tente de définir les critères d'une collection de qualité : Une collection de qualité ?
N'hésitez pas à consulter les documents suivants pour en savoir plus :
- La politique d’acquisition en 12 points de l’ABF
- Pour un fonds raisonné : la politique d’acquisition de Marina Dinet
- Pratiques et politiques d'acquisition de Jérôme Pouchol dans le BBF
- Co-construire les collections avec les usagers de Elise Breton
- Les collections en devenir : typologie des documents, politique et traitement documentaires, Adrienne Cazenobe
- Une politique d'acquisition pour une bibliothèque d'étude et de recherche, Valérie Travier
- Bibliothèques et politiques documentaires à l'heure d'Internet, Bertrand Calenge
- Pour une politique documentaire durable / Nadia Brandt-dit-Grieurin, Agnès Küpfer
Bonne journée.
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Pour ma formation ABF, pouvez-vous me donner des exemples...