Quel est le sens du mot "éphémère" dans ce vers d'Aragon ?
Question d'origine :
Bonjour! Quel est le sens de "éphémère" dans les vers d'Aragon "J’ai pris la main d’une éphémère /
Qui m’a suivi dans ma maison" (L’étrangère, in Le roman inachevé, 1956)?
Réponse du Guichet

Dans son poème 'Après l'amour", Aragon utilise pour ces vers un procédé de substantivation, l'adjectif "éphémère" étant ici employé pour désigner une femme et plus largement, leur relation.
Bonjour,
Dans le poème Après L'amour, Louis Aragon mentionne effectivement une "éphémère" avec les vers : "J’ai pris la main d’une éphémère / Qui m’a suivi dans ma maison".
Lorsqu'on lit le texte intégralement, on comprend qu'il s'agit d'une femme, probablement une amante passagère avec laquelle il aurait eu une relation. Ici, l'auteur procède à une substantivation, puisqu'un adjectif est utilisé comme un nom. C'est aussi une forme de métonymie où une partie (la qualité) est utilisée pour représenter le tout (la personne ou l'entité). Cette femme est ici essentialisée en une propriété, à savoir la durée et/ou la frivolité (non dénuée de charmes toutefois) de cette liaison.
Ces vers contrastent avec ceux, un peu plus haut dans le poème, où le poète dévoile son coeur et confie son chagrin au sujet de sa précédente relation amoureuse. Avec le mot "éphémère", un parallèle est dressé avec l'intensité et la peine causée par sa précédente relation avec une personne qu'il semble encore aimer :
J'avais ma peine et ma valise
Et celle qui m'avait blessé
Riait-elle encore à Venise
Moi j'étais déjà son passé
Et voici comment se termine la strophe des vers qui vous intéressent et comment commence la suivante :
J'ai pris la main d'une éphémère
Qui m'a suivi dans ma maison
Elle avait les yeux d'outre-mer
Elle en montrait la déraison
Elle avait la marche légère
Et de longues jambes de faon
J'aimais déjà les étrangères
Quand j'étais un petit enfant
Si vous souhaitez comprendre toutes les nuances du mot "éphémère", nous vous invitons à lire la notice du CNTRL. Mais qu'il s'agisse de l'adjectif ou de l'insecte, les propriétés de ce terme restent les mêmes et renvoient toujours à quelque chose qui ne dure que peu de temps, qui est transitoire ou qui s'échappe... Et donc, nous ne voyons pas d'autre façon d'interpréter ce mot d'Aragon, dont le poème indique clairement qu'il s'agit d'une femme.
Nous avons pour cette question utilisé cette édition : Le Roman inachevé / Aragon ; préface d'Etiemble (Gallimard, 1988)
Bonne journée,