Où faisaient leur service militaire les appelés corses à la fin XIXe-début XXè siècle ?
Question d'origine :
Bonjour,
j'aimerais savoir où faisaient leur service militaire les appelés corses fin XIXè-début XXè siècle. Sur le continent (et alors où ?) ou en Corse ?
Merci !
Réponse du Guichet

Nous n'avons pas pu trouver de statistiques précises portant sur les affectations des conscrits corses à la fin du XIXe et au début du XXe. Il semblerait qu'ils aient été affectés dans des régiments corses mais pas seulement. On en retrouve dans tout l'hexagone et dans les colonies françaises.
Bonjour,
Aux XIXe et XXe siècles, les conscrits corses ont été affectés dans divers régiments de l'Ile de Beauté mais aussi en métropole. Comme l'ensemble des conscrits français, ils pouvaient parfois quitter leur région natale. Vous connaissez probablement l'expression : l’armée fait voir du pays !
Quelques éléments d'histoire :
La conscription est institutionnalisée en France en 1798 à l'initiative du général Jourdan.
De 1804 à 1903, les appelés sont convoqués pour connaître leur affectation à l'issue d'un tirage au sort. Dans un premier temps, le tirage au sort détermine qui part et qui ne part pas, les numéros les plus bas étant réputés « bons pour le service ».
En 1872, la fonction du tirage est changée : les numéros les plus bas font un service de cinq ans, les autres d'un an seulement.
En 1889, la durée du service est fixée pour tous à trois ans, les numéros servant désormais à déterminer l'arme d'affectation.
source : La conscription au XIXe siècle / Frédéric Maguet
Comment décidait-on de leur affectation ? Si le numéro tiré au sort a pu décider de l'affectation des soldats, la stature ou la profession ont été des critères déterminants :
Peu de temps après le conseil de recrutement, les conscrits désignés pour marcher doivent se rendre au chef-lieu du département pour la revue de départ qui va déterminer les affectations. La taille, la vigueur physique, la profession sont autant de critères qui désignent les jeunes hommes pour l’infanterie, la cavalerie, l’artillerie ou un corps d’élite. La cavalerie est réservée aux plus grands (1,65 à 1,76 m), tandis que ceux qui n’atteignent pas ces tailles – une bonne majorité – sont dirigés vers l’infanterie ou l’artillerie. Les jeunes hommes connaissent désormais leur régiment d’affectation et reçoivent leur feuille de route. Seuls mais souvent en contingents escortés par des officiers et des gendarmes, ils entament leur voyage vers leurs unités d’affectation. Entre leur domicile et le régiment d’affectation, c’est un long, voire un très long, voyage: les conscrits des départements belges ou bretons peuvent être affectés par exemple en Italie, en Allemagne ou en Espagne.
source : Du village à la caserne : les étapes de la conscription sous le Consulat et l’Empire / HOUDECEK François
Toutefois, une majorité des conscrits semblent être affectés dans leur région d'origine.
Dans son ouvrage intitulé Armée, guerre, société : soldats languedociens (1889-1919), Jules Maurin, qui a étudié les affectations des soldats languedociens dans le détail (entre 1889 et 1919), indique :
L'affectation dans les différentes armes est d'une belle logique. Elle découle de la combinaison de plusieurs facteurs. Certes les facteurs externes, les décisions et recommandations ministérielles jouent leur rôle, mais globalement. Au plan individuel, les critères personnels sont essentiels. La stature apparaît fondamentale. La forte prépondérance de l'infanterie va de pair avec la relative faiblesse de la taille moyenne des jeunes gens. De plus, à la progression de la taille moyenne par classe correspond la progression constatée des affectations dans l'artillerie et la cavalerie. Mais si la taille est fondamentale, elle n'est point isolée. La délinquance, dès qu'elle est grave, expédie aux bataillons d'infanterie légère d'Afrique.
Toutefois, ce sont les critères socio-professionnels qui complètent le mieux les facteurs anthropologiques : les professions de l'artisanat et des transports fournissent proportionnellement moins de fantassins que l'agriculture ou le commerce. Mais ces deux dernières catégories sont aussi plus riches en tailles moyennes-petites que les deux autres qui, inversement comptent plus de moyens-grands et de grands. Les critères familiaux tendent à renforcer les nombreuses affectations dans l'infanterie parce que les souhaits des soutiens de famille vont dans ce sens. Cela contribue à maintenir des affectations dans les régiments locaux, dont l'importance - un tiers des affectations des fantassins - n'égale pas celles des régiments de la région militaire qui atteignent, selon les armes, 80 à 90 % des incorporés. C'est donc au niveau régional que s'opère le brassage du service militaire, une petite minorité allant, cependant au-dehors. Ces affectations plus ou moins proches ou lointaines peuvent influer sur les événements qui ponctuent le passage au service militaire du soldat.
(voir les pages 291 à 309 pour en savoir plus)
L'extrait de l'ouvrage intitulé Deux soldats corses dans la Grande guerre: Vosges, Somme et Balkans de Dominique Camusso montre bien la diversité des affectations des jeunes conscrits corses même si la majorité d'entre-eux étaient affectés au 163e RI de Corse.
Vous pourrez établir quelques statistiques en vous penchant sur les registres matricules consultables sur le site des archives de Corse.
Quelques recherches que nous avons menées au hasard ont démontré une diversité d'affectations, même s'il est vrai que beaucoup de conscrits étaient affectés dans des régiments corses.
Quelques informations complémentaires : La Corse et son recrutement : études historiques, statistiques et médicales / François Marie Costa de Bastelica
Bonne journée