Comment les bibliothèques s'adaptent aux personnes atteintes de troubles psy ?
Question d'origine :
Bonjour,
Pourriez-vous me donner des exemples d'aménagements concrets (espaces physiques adaptés, accueil spécifique, formation des équipes, actions culturelles, partenariats) réalisés récemment en bibliothèque publique à destination des personnes atteintes de troubles psy ?
Merci.
Réponse du Guichet

Nous vous transmettons cette série de ressources permettant de faire un premier état des lieux non exhaustif sur les modalités d'accueil en bibliothèque des personnes à handicaps mental et psychique. La palette d'obstacles physiques et cognitifs est vaste et doit s'ajuster à un large éventail de situations. Une série de mesures peut toutefois être envisagée : des fonds adaptés, des horaires d'accueil spécifiques, des partenariats avec des centres médico-psychologiques, des espaces de lecture mieux pensés (éclairages, bruits etc.), des affichages et procédures sur-mesure ou des formations ciblées dispensées aux personnels font partie des principales initiatives déployées en bibliothèque de lecture publique.
Bonjour,
Le mémoire de fin d'étude d'Albane Feugere des Forts à l'ENSSIB s'intitule "L’accueil des personnes à handicap mental et psychique en bibliothèque" (2022). C'est un document qui pourrait vous intéresser puisqu'il fait un état des lieux de la situation de l'accueil des personnes présentant des troubles mentaux et psychiques en bibliothèques en France et émet des propositions concrètes pour améliorer l'accueil de ces publics au sein du réseau de lecture publique.
Les résultats des questionnaires ayant servi de matière à l'enquête révèlent certes de nombreuses carences, mais aussi de belles initiatives qui fonctionnent, comme par exemple :
- La mise en place de fonds "Facile à lire", dont l'idée reprise par l'ABF et le ministère de la Culture a fait germer de nombreuses initiatives en bibliothèques. Un emplacement bien réfléchi, une signalétique claire, des documents adaptés etc.
- Le questionnaire révèle un goût des personnes en situation de handicap psychique pour les livres en lien avec leur propre maladie. Ces ouvrages spécifiques sont perçus comme des outils pour avancer, les témoignages ou bandes dessinées sur leur pathologie sont aussi des ressources appréciées, de véritables objets de réconfort. L'accessibilité de ces documents est donc un véritable enjeu sur lequel travailler. Mais encore faut-il que les personnes concernées puissent lire ces ouvrages spécialisés. En ce sens, A. Feugere des Forts cite notamment les livres de la collection Mieux vivre avec publié aux éditions Dunod, qui traitent de différentes pathologies psychiatriques dans un langage adapté.
-En matière d'animation, est cité p. 46 le travail d'une bibliothécaire qui propose la lecture de contes oraux à des personnes à handicap psychique et mental, alternant déplacements en structures et accueils en bibliothèques.
-Sur le développement de ce partenariat, nous pouvons lire un peu plus loin aux p. 50 - 51 : "La bibliothécaire qui s’occupe du conte travaille en lien avec des structures accueillant des personnes en situation de handicap mental ou psychique. C’est elle qui a été contactée par les structures pour organiser ces activités ; l’origine vient de l’Adapei, (association qui accompagne les personnes en situation de handicap mental au sein d’établissements et de services spécialisés), qui a demandé que cette bibliothèque ouvre à certaines heures pour ce public. Par la suite, la bibliothécaire a assuré des contes avec plusieurs structures. Ces animations ont lieu soit à la bibliothèque, soit dans la structure, où la bibliothécaire se déplace. Par cet exemple, nous pouvons voir que la collaboration prend la forme d’une animation, à savoir une histoire contée aux usagers, dont le choix a été adapté pour ce public."
Ce qui lui permet d'insister sur ces points qui lui semblent fondamentaux pour améliorer l'accueil de ces publics en bibliothèque:
Une formation du personnel en premiers secours en santé mentale, ou en communication non violente.
Des horaires d'ouverture spécifiques, uniquement pour ces usagers.
Développer des fonds documentaires spécialement adaptés pour ces publics.
Des partenariats avec des associations d'aide aux personnes handicapées, les établissements d'accueil et les centres médico-psychologiques.
Vous trouverez aussi de nombreuses recommandations pour accueillir au mieux en bibliothèque universitaire les publics avec un trouble du neurodéveloppement dans cet article du Bulletin des Bibliothèques de France. En voici un petit florilège :
Pour réduire le bruit et l'agitation : "l’installation de cloisons acoustiques ou de panneaux muraux absorbants entre les zones de travail individuel peut significativement lisser les bruits et donner l’impression d’un fond sonore continu acceptable en réduisant la réverbération du son".
Sur l'éclairage et les stimuli visuels : "En complément d’un éclairage plus tamisé et davantage chaleureux, si possible individuel et correctement orienté (la source lumineuse n’est pas orientée vers les yeux du lecteur), les espaces d’affichage peuvent être restreints à un certain lieu, si possible hors de la BU ou dans un espace de passage et non de travail, bien délimité et régulièrement actualisé. Ces zones de passage peuvent aussi être séparées des lieux d’étude par des collections, des cloisons ou des rideaux, afin de minimiser les distractions visuelles."
Sur la signalétique et le repérage dans l'espace : "Pour renforcer l’accessibilité de la signalétique, il peut être judicieux de proposer un plan didactique imprimé de la BU et, si possible, de développer une application mobile indiquant pas à pas le cheminement vers un rayon ou espace spécifique."
Une simplification des affichages et des procédures : "Par ailleurs, le format FALC (Facile à lire et à comprendre) pourrait être un excellent support pour la communication de modes d’emplois des services proposés par la BU, de guides liés à la circulation dans celle-ci, et ce, non seulement pour les étudiants en situation de handicap, mais aussi pour les étudiants non francophones ou en difficulté face à des textes trop denses. Pour limiter le nombre de manipulations manuelles et d’opérations cognitives, l’interface des écrans tactiles peut être simplifiée en affichant des raccourcis pour certaines opérations courantes (recharger sa carte d’impression, réserver un document, etc.)."
Nous vous invitons à regarder également ce film de la journée d'étude "Santé mentale et bibliothèques : quels enjeux et quelles pratiques ?" organisée à Nancy en novembre 2024. Parmi les exemples concrets donnés par les intervenants pour accueillir les personnes présentant des troubles psychiques en bibliothèque nous pouvons citer des ateliers de médiation, de la bibliothérapie, des fonds « développement personnel » et la formation d’agents aux Premiers Secours en Santé Mentale (PSSM).
Mais surtout, nous vous redirigeons vers cette précédente réponse du Guichet du Savoir qui n'a que quelques semaines et qui fait un état des lieux assez complet sur les conditions techniques d'accueil des personnes neurodivergentes en bibliothèque de lecture publique : Comment proposer un espace sensoriel adapté aux personnes neurodivergentes en bibliothèque ?. L'exemple des espaces Snoezelen ou inspirés de ces derniers, comme les bulles sensorielles de la bibliothèque du Finistère, sont autant d'exemples concrets que vous pourrez mobiliser. Énormément de ressource supplémentaires sont à retrouver dans le corps de la question.
Certes un peu plus anciennes, nous pouvons aussi vous suggérer de lire ces réponses :
Et cette fiche pratique de l'ENSSIB, Accueillir en bibliothèque des publics en situation de handicap mental, qui date de 2015, mais qui est remplie de ressources encore pertinentes aujourd'hui.
Bonne journée,