Peut-on ranger les romans historiques, policiers et fantastiques sous une même signalétique ?

Bonjour, 

Il est tout à fait possible de "mélanger" des genres littéraires comme le roman historique, le roman fantastique ou le roman policier dans une même section d'une bibliothèque de lecture publique. Il n'existe pas de plan de classement national qui imposerait aux bibliothécaires de structurer leurs fonds en sous-catégories romanesques. Une approche du roman par genres puis par subdivisions peut s'avérer pertinente, mais d'autres manières de faire existent sans que l'une ne prenne nécessairement le dessus sur l'autre. Disons que le choix dépend des besoins de votre public, de la taille de votre collection et des moyens disponibles pour la signalétique et l’organisation.

D'ailleurs, chaque entreprise de catégorisation fera face à ses propres limites et aucune n'échappera à ce que Bertrand Calenge appelle ces "cailloux dans la chaussure", à savoir ces ovnis littéraires qui dépasseront systématiquement les étiquettes qui tentent de les englober. L'excellent article de Marianne Pernoo de l'ENSSIB Quelles classifications et quels classements pour les œuvres de fiction dans les bibliothèques ? (bien que daté de 2001) fait très bien le tour de la question et désarçonne jusqu'à interroger le roman comme forme littéraire identifiable et catégorisable, citant pour ce faire Marthe Robert, critique littéraire française, qui écrivait  au sujet du roman que « rien ne l’empêche d’utiliser à ses propres fins la description , la narration, le drame, l'essai, le commentaire, le monologue, le discours ; ni d’être à son gré tour à tour ou simultanément, fable, histoire, apologue, idylle, chronique, conte, épopée ». (p. 50)

En bref plus on s'intéresse au sujet, plus on s’aperçoit que les cloisons qui séparent les catégories sont fragiles et qu'il est toujours possible de les rediscuter, les remettre en question et les améliorer. 

La bibliothèque départementale de la Sarthe indique dans un document "boite à outils", "Le classement des livres en bibliothèques" : "Les romans sont classés sur les rayonnages en suivant l’ordre alphabétique de leurs auteurs. Il est possible de constituer une étagère différente pour les genres suivants : « Romans policiers », « Romans de science-fiction », « Romans Gros caractères »." 

Le guide de cotation des livres de la bibliothèque de prêt Dordogne Périgord semble aussi utiliser une formule englobante qui regroupe les romans en une seule et même catégorie indépendamment de leur genre : 

• Le premier élément de la cote est constitué des 3 premières lettres du nom de l’auteur (choisir le premier par ordre d'apparition sur la page de titre) (ou vedette de forme pour les anonymes et les œuvres collectives) tant pour ses propres écrits que pour les ouvrages traitant de lui et/ou de son œuvre.

• Le deuxième élément détermine le genre au moyen d’une lettre.

Biographie, mémoires, critique de l’œuvre, journaux, correspondance discours d’un “auteur-littérateur”, histoire de la littérature…

Poésie (recueils de poèmes, anthologies…). Les études sur les poètes et la poésie sont classées en B.

Romans (policiers, science-fiction, sentimentaux…), nouvelles, essais, Humour, contes. Les études sur le roman, la littérature romanesque, etc. sont classées en B.

Théâtre (pièces). Les études sur le théâtre d’un point de vue littéraire sont classées en B. •

• Le troisième élément est constitué de la première lettre du titre de l’ouvrage ou de la suite. 

Même si cette catégorisation pourrait faire sourciller certains, nous soutenons que toute guerre de chapelle est inutile et que chaque collection doit obtenir une réponse localisée qui satisfasse les besoins des lecteurs et les impératifs de valorisation des fonds. 

Un modèle hybride est aussi possible, vous pouvez par exemple mélanger les genres sur les mêmes rayonnages en utilisant des cotes distinctes pour chaque genre. 

La résilience des plans de classement se manifeste à l'intérieur même des bibliothèques et des départements de la BmL. Pour vous en rendre compte, nous vous invitons à lire cette précédente réponse du Guichet du Savoir :

La BmL est un réseau de 16 bibliothèques et un bibliobus. Chacune de ces structures construit sa collection en accord avec notre charte documentaire, mais également selon sa taille, son budget, le quartier où elle est placée, la proximité d'autres bibliothèques... et d'innombrables critères qui font qu'une collection est un organisme vivant, en constante mutation. De ce fait, le classement ne fait l'objet d'aucune harmonisation à l'échelle du réseau. Chaque bibliothèque - et chaque département de la Part-Dieu - élabore donc son propre plan de classement. Certains de ces plans de classement suivent plus ou moins la classification décimale Dewey (par exemple le département Sciences, à la Part-Dieu), d'autres ont adopté un classement plus "intuitif" pour les lecteurs (département Société, à la Part-Dieu, où les documents sont classés sous des rubriques thématiques telles que "Société", "Droit", "Monde"...). Certaines bibliothèques ont abandonné le cloisonnement entre les départements adulte et jeunesse (bibliothèque du 2ème arrondissement) ou ont créé des plans de classement tout à fait inédits, comme à la bibliothèque de Lacassagne.

Source : Plan de classement, Guichet du Savoir (2021). 

Bonne journée,