Comment expliquer le cycle de vie complexe du papillon ou de la grenouille ?
Question d'origine :
Pourquoi un oeuf de grenouille ou de papillon donne un tétard ou une larve, plutot qu'un bébé grenouille ou papillon?
Réponse du Guichet

La grenouille et le papillon sont ovipares. C'est à dire qu'ils pondent des oeufs pour se reproduire. Une fois éclos, l'oeuf de la grenouille donne naissance à une larve aquatique nommé tétard. Puis celui-ci se métamorphose et devient une sorte de bébé grenouille. Le papillon quant à lui connaît quatre stades de métamorphoses : l'oeuf, la chenille, la chrysalide (ou nymphe), le papillon adulte (ou imago). Ce processus physiologique serait d'origine embryonnaire contrôlé par des hormones. Les ecdystéroïdes comme l’Ecdysone (appelée « Hormone de mue ») et les Hormones Juvéniles (JH). La taille de la larve est aussi un déclencheur de la mue ainsi que leur bionomie.
Bonjour,
Dans le règne animal il existe différentes manières de donner la vie. On parle alors de modes de reproduction vivipare, ovipare et ovovivipare.
Dans le terme “vivipare”, “vivi” signifie “vivant”. Chez les animaux vivipares, l'embryon se développe à l'intérieur du corps de l'un de ses parents qui est, sauf exception, le parent femelle. Presque tous les mammifères sont vivipares et l’être humain en fait partie.
Dans le terme “ovipare”, “ovi” signifie “œuf”. Les animaux ovipares sont donc des animaux qui pondent des œufs, que ceux-ci soient fécondés ou non : poissons, amphibiens, insectes, oiseaux et de nombreux reptiles sont ovipares.
Le terme “ovovivipare” se construit en combinant “ovo” et “vivi”. En se référant à ce que l’on a dit des deux termes précédents, il est question d'œuf et d'un corps hôte. Il s’agit de cas particuliers d’oviparité : l’œuf se développe dans un corps. C’est le cas des hippocampes, des vipères ou des requins blancs.
Source : Vivipare, ovipare et ovovivipare : quelles différences chez ces animaux ?, Le Mag des animaux, Ouest France
Lire aussi « Vivipare », « ovipare », « ovovivipare » : quelle différence ?, La culture générale.
La grenouille est ovipare (Zoologisye.com). Sur sa page Tout savoir sur la grenouille verte : oeuf, bébé, reproduction, cri, nourriture, le bureau d'études Permaculture Design explique comment elle se reproduit :
Le cycle de vie d’une grenouille est intimement lié à un point d’eau naturelle qu’il soit permanent type mare naturelle ou temporaire.
Ce cycle commence au stade de l’œuf.
Enveloppé d’une substance gélatineuse qui se gorge d’eau dans les 48 h après la ponte, il peut flotter.
Puis, vient l’éclosion.
L’œuf de grenouille donne naissance à une larve aquatique – le têtard – qui respire grâce à des branchies externes, et par sa peau.
D’abord fixé à une herbe grâce à des ventouses, le têtard se nourrit des restes de son œuf, avant d’adopter un régime composé principalement d’algues.
Si par contre, la nourriture se fait rare, le têtard finit par manger ses frères et sœurs. Gloups…
À ce stade, le têtard est un petit animal qui dispose d’une tête prolongée par un corps et une queue, comme les poissons.
[...]
Le rythme de vie des têtards est calé sur l’alternance du jour et de la nuit.
Le jour, ils se rassemblent près des berges à la surface de l’eau pour capter la chaleur du soleil. La nuit, ils descendent au fond de l’eau.
Puis, arrive le jour de la métamorphose.
Le têtard, qui a bien grossi, se transforme alors pour devenir un juvénile, une sorte de bébé grenouille.
Son corps de têtard se transforme : les branchies externes sont remplacées par des branchies internes, avant que n’apparaissent les poumons.
Puis, sa queue qui contient une réserve de graisses régresse, et laisse la place aux pattes avant puis arrière.
Enfin, la tête se forme. 2 à 3 mois après la métamorphose, cette petite grenouille verte quitte le milieu aquatique.
Il lui faudra 2 à 3 ans pour atteindre la maturité sexuelle et le stade adulte.
Le tétard est donc une larve aquatique qui, en se transformant, va devenir un "bébé grenouille" puis une grenouille adulte au bout de 2 ou 3 ans.
Mais, il est intéressant de savoir que, selon l'article de France info, Plutôt que de pondre des œufs, une grenouille donne naissance à des têtards, il existe des grenouilles qui donnent naissance à des tétards sans passer par l'étape de l'oeuf. Il s'agit d'une espèce d'amphibiens de la famille des Dicroglossidae nommée limnonectes larvaepartus.
Elle est l'une des rares espèces d'amphibiens à pratiquer la fécondation interne, et la seule espèce connue de grenouille à donner naissance à des têtards vivants. La douzaine d'autres espèces de grenouilles ovovivipares connues donnent quant à elles naissance à de petites grenouilles déjà formées.
Source : Limnonectes larvaepartus, Wikipédia
Le papillon est aussi ovipare puisqu'il pond des oeufs. Avant de devenir adulte il passe par quatre stades biologiques :
- L'oeuf
- La chenille
- La chrysalide (ou nymphe)
- Le papillon adulte (ou imago)
La durée de chaque stade est variable selon les espèces. Le passage d'un stade à un autre constitue une métamorphose.
Source : Biologie des lépidoptères, Université de Bordeaux
Les oeufs des papillons sont très différents selon l'espèce ou la famille. Regardez comme la nature est belle :
Oeuf d’Antocharis cardamines (Domaine public )
Oeuf d’Euthalia aconthea (Domaine public )
Oeuf d’Hypolimnas bolina (Domaine public)
Une fois développés, les oeufs éclosent et l'embryon devient une chenille puis celle-ci passe au stade de la chysalide avant de devenir imago.
2. Le second stade : la chenille
[...] Au cours de son développement, la chenille va grandir. Elle va passée par plusieurs stades larvaires entrecoupés de mues nécessaires à sa croissance. Le nombre de mues varie selon les espèces de 4 à 5 fois (jusqu'à 10 fois). Lors de la mue, la vieille peau (l'exuvie) se déchire et la chenille se dégage. La nouvelle peau déjà formée peut avoir des couleurs et des motifs différents de l'ancienne. Après la mue, l'exuvie est souvent dévorée par la chenille. Après la dernière mue, la chenille est adulte.
3. Le troisième stade : la chrysalide
Durant la phase de croissance, l'intérieur de la chenille subit des transformations et certains organes de l'imago se sont formés (les ailes, les antennes, les yeux à facettes...). Afin d'accomplir le reste de sont développement, la chenille adulte va se métamorphoser en chrysalide (la chrysalidation). C'est la dernière mue de la chenille. Les préparatifs de la chrysalidation sont différents selon les espèces. La plupart des chenilles s'enferment dans un cocon, d'autres confectionnent un réseaux de fils soyeux, certaines pratiques une cavité dans la terre et la tapissent de soie.
Quand la chenille est prête, la peau se fend au niveau de la nuque et sera repoussée vers la région anale par des mouvements rythmiques. La chenille est maintenant devenue une chrysalide. Ce stade dure quelques jours chez certains papillons. D'autres papillons hivernent sous forme de chrysalide.
4. Le quatrième et dernier stade : l'imago
Quand le papillon est complètement développé, il fait éclaté l'enveloppe de la chrysalide et se met en position favorable près du lieu de "l'éclosion" pour déployer ses ailes. Cette phase dure en général 15 min. Le papillon est prêt alors à prendre son envol.
L'activité de l'imago consistera alors à se nourrir du nectar des fleurs (en participant ainsi à la pollinisation) et à chercher un partenaire sexuel pour s'accoupler. La femelle pond ensuite ses oeufs sur la plante hôte (plante nourricière) spécifique de la chenille.La durée de vie de l'imago est très variable selon les espèces. Elle est de 3 à 5 semaines pour la génération estivale. Certains papillons hivernent sous la forme d'imago - le Citron (Gonepteryx rhamni) vit ainsi 11 mois !
Source : Biologie des lépidoptères, Université de Bordeaux
S'il y a donc bien des "bébés grenouilles", les tétards, ont ne peut pas à proprement parler de "bébés papillons" sauf à considérer que la chenille est celui-ci. Mais pourquoi le papillon connaît-il tant de métamorphoses ?
Dans son article Origine de la métamorphose chez les insectes, Benoît GILLES, entomologiste, nous explique :
La métamorphose est l’une des stratégies de vie les plus répandues chez les animaux. Les fortes différences morphologiques et physiologiques entre les formes larvaires et adultes impliquent l’exploitation d’habitats et de ressources alimentaires différentes, induisant des adaptations extrêmes pour des fonctions spécifiques telle que la dispersion.
Chez les amphibiens et de nombreux invertébrés marins, la métamorphose constitue une phase ancestrale du cycle de développement, trouvant son origine dans les profondeurs de l’histoire évolutive de ces groupes. A l’inverse, chez les insectes, la métamorphose est apparue au cours de leur évolution.
[...]
Les insectes arborent trois types de développement :
- Amétabole : développement se déroulant sans métamorphose, constituant la forme la plus ancienne. Aujourd’hui, ce groupe est représenté par les Ordres des Archéognathes (anciennement Thysanoures) et la famille des Lepismatidae (Ordre des Zygentomes), également appelés « poisson d’argent » ou lépisme. Le développement des amétaboles se composent de plusieurs mues successives où les jeunes sont semblables aux adultes, excepté les organes sexuels et génitaux qui apparaissent en fin de développement.
- Hémimétabole : également appelée métamorphose incomplète, elle représente une forme intermédiaire. Les jeunes, aussi nommés juvéniles, sont similaires aux adultes hormis les espèces ailées qui possèdent des bourgeons alaires repliés sur le dos, se transformant au stade adulte en ailes articulées fonctionnelles. Les hémimétaboles constituent un groupe paraphylétique (pas d’ancêtre commun vs monophylétique) incluant par exemple les Odonates (libellules), les Orthoptères (grillons, sauterelles, criquets), les Blattodea (blattes et termites), les Mantodea (mantes) et les Hétéroptères (punaises, pucerons, cigales…).
- Holométabole : désignant les insectes réalisant une métamorphose dite complète, les jeunes, appelés également larves, sont totalement différents de l’adulte tant morphologiquement que physiologiquement. La métamorphose se déroule durant une phase spécifique à l’intérieur d’une pupe (nymphe ou chrysalide) d’où émergera l’adulte. L’holométabolie apparaît durant le Permien (-300 à -250Ma) et constitue un groupe monophylétique (un même ancêtre commun vs paraphylétique) composé des Diptères (mouches), des Coléoptères, des Lépidoptères (papillons) et des Hyménoptères (abeilles, fourmis, guêpes).
Il y aurait une origine embryonnaire de la métamorphose. Attention, là ça devient très technique :
Contrôle du développement post-embryonnaire
Les américains James W. Truman et Lynn M. Riddiford (1999) (Université de Washington – Seattle) ont mené des études endocrinologiques embryonnaires et post-embryonnaires sur plusieurs espèces d’insectes, leurs résultats appuient l’hypothèse de Berlese : la larve des holométaboles correspondrait au stade pronymphe des hémimétaboles.
Les processus de la mue et de la métamorphose sont gouvernés par 2 familles d’hormones : les ecdystéroïdes comme l’Ecdysone (appelée « Hormone de mue ») et les Hormones Juvéniles (JH).
De nombreux processus physiologiques sont régulés par la JH. Elle a d’abord un rôle de maintien du statu quo ; c’est-à-dire que, de par sa présence dans l’hémolymphe au cours de la mue, elle maintient les caractères larvaires de l’insecte. L’insecte s’extirpe de son ancienne cuticule et gagne en volume par l’extension de la nouvelle encore flexible.
L’Ecdysone, qui est responsable du phénomène de mue, répète l’état de développement précédent et une mue larvaire est réalisée. En revanche, si la JH est absente, l’Ecdysone permet la métamorphose, ou mue imaginale, aboutissant à un individu adulte avec apparition des organes reproducteurs et des ailes pour les espèces ailées.
La JH inhibe donc le processus de métamorphose.
Elle joue également un rôle dans la différenciation des castes chez les insectes sociaux (ouvriers et soldats par exemple chez les termites). Chez l’adulte, elle intervient dans la régulation de l’ovogenèse et le comportement sexuel.
Chez les Holométaboles, les interactions endocriniennes sont plus complexes. Le processus de la mue est induit par un pic de sécrétion d’ecdystéroïdes (appelé pic d’engagement) et une diminution du taux de JH dans l’hémolymphe. Le pic d’engagement déclenche alors un processus irréversible engageant la larve vers la métamorphose. Un second pic d’ecdystéroïdes apparaît dans les heures suivant le premier, pouvant être 10 fois plus important que le pic d’engagement, (temps variable selon les espèces et les taxons) déclenchant la sécrétion de la cuticule de la pupe (figure 4).
La synthèse ou non de JH entraîne une réaction en chaîne aboutissant à l’activation et à l’expression de cortèges de gènes différents à l’origine des mécanismes de la mue et de la métamorphose.
Des caractéristiques morphologiques viennent également conforter cette hypothèse : absence de bourgeons alaires chez les pronymphes hémimétaboles et les larves holométaboles, la similitude du développement intermédiaire des pattes entre la larve holométabole et la forme adulte et la pronymphe hémimétabole.
Initiation de la mue et de la métamorphose
Les facteurs responsables de l’initiation de la mue ne sont pas encore bien décrits. La métamorphose est toutefois induite lorsque les ecdystéroïdes sont synthétisées en l’absence de JH.
Ce qui est admis est que la mue est déclenchée lorsque la larve atteint une taille seuil, bien que ce critère soit subjectif.
Par exemple, chez la punaise hématophage Rhodnius, le processus de mue est induit à la suite de la prise d’un très grand volume de sang, où l’extension des organes abdominaux stimule les récepteurs hormonaux ventraux. Chez le sphinx du tabac (Manduca sexta – Sphingidae), la mue est initiée lorsque la chenille atteint une certaine masse. Les mécanismes permettant à la chenille d’évaluer sa masse ne sont pas encore connus, l’étirement de la paroi corporelle se semblerait pas impliqué. Cependant, la métamorphose serait liée à la taille de la tête au début du stade larvaire. Si la largeur de la tête est inférieure à 5mm, la production de JH se poursuit et la larve engage un nouveau stade larvaire. Si la tête dépasse 5mm, la larve (d’une masse supérieure à 5g) s’engage alors dans le stade pupe (= nymphe) à la mue suivante.
Chez d’autres espèces, la masse n’intervient pas dans le processus de mue. Chez certaines espèces de Coléoptères ou de Lépidoptères où les larves s’alimentent de produits stockés comme la farine ou les graines, les larves muent lorsqu’elles sont affamées et deviennent, étrangement, plus petites.
Evolution de la métamorphose
L’apparition et l’évolution de la métamorphose chez les insectes s’explique également par leur écologie. L’avantage que procure la ponte des œufs dans des endroits protégés (sol, écorce) des conditions environnementales et de la prédation, aurait sélectionné ce comportement chez des espèces ancestrales.
Bonne journée