Question d'origine :
Bonjour,
Hier je regardais une émission sur le peuple Jarawa vivant sur l'archipel Adaman au sud du Bengal.
Certains anthropologues les considèrent comme les premiers humains ayant quitté l'Afrique et, d'après les tests ADN, leurs plus proches parents seraient les Bochimans du désert du Kalahari (Afrique australe).
Je me demande comment a pu se passer leur migration d'Afrique Australe vers une île si éloignées (tout prêt de la Thaïlande). Comment est-ce possible?
D'une manière générale comment les peuples primitifs ont réussi à peupler les îles?
Et d'une manière générale où pourrais-je trouver des informations sur les migrations ancestrales?
Je vous remercie pour votre réponse,
MiMa
Réponse du Guichet

Bonjour,
Jarawa : Le nom générique de "Négritos" vient de leur apparence physique. Leur physionomie est nettement distincte de celles des peuples asiatiques qui les entourent ; plus petits, avec une peau très foncée, les Jarawa par exemple ont des cheveux noirs crépus. Ils se seraient séparés des autres populations il y a environ 60 000 ans (d'après les études sur leurs divergences génétiques).
Article Wikipedia
La certaine parentalité entre les Jarawa et les Bochimans du désert du Kalahari remonterait à la préhistoire, ainsi dans l’ouvrage Les peuples premiers: des mémoires en danger, de Jérôme Bimbenet, on peut lire que:
« Entre -200 000 et -100 000 ans, l’homme moderne (homo sapiens) se répand sur la continent africain avant de se lancer à la conquête du monde par vagues successives. Franchisant la mer Rouge, il arriva au Proche-Orient et continua vers l’Europe ou l’Asie. Les chasseurs-cueilleurs se déplaçaient au rythme du gibier, en quête de ressources nouvelles. L’expansion depuis l’Afrique jusqu’au continent américain s’étendit sur une période de 80 000 ans. Aucun espace n’a résisté à l’occupation de l’homme, y compris les zones les plus extrêmes même s’il est vrai que le climat a évolué : ainsi vers -8000 ans, le Sahara était une immense savane où abondait le gibier. Pendant la première glaciation, au paléolithique, les détroits vers le Japon, l’Australie ou l’Amérique furent franchis (entre -35 000 et -18 000 ans) : le niveau de la mer avait baissé de 120m, l’eau étant retenue au nord sous forme d’immenses glaciers continentaux. […]. »
L’Atlas historique de l'humanité expose les différentes étapes de peuplement des continents et pour l’Asie du Sud-est, la chronologie est :
« -16 000 à -12 000 : début de la transgression flandrienne : Asie des moussons: Elle se présente comme un conservatoire de traditions archaïques dont les populations indigènes mélanodermes (noires) se replient progressivement vers l’Océanie.
-8000 à -6000 : et Australie : la péninsule et les îles sont le domaine de populations mélanodermes (noires).
-3000 à -2500 : deux vagues d’Austronésiens apportent l’industrie microlithique et l’agriculture.
-2500 à -2000 : migrations des indonésiens qui atteignent l’archipel et font pression sur les Mélanésiens de la vague précédente.
-2000 à -1500 : les migrations austro-asiatiques atteignent l’Indochine, la Birmanie et bientôt les Indes.
-900 à -800 : Elle reste le domaine de villages d’agriculteurs primitifs, malgré les apports du monde plus développé. L’émergence d’une culture autonome se concrétise néanmoins avec l’apparition d’objets culturels particuliers.
-400 à -300 : Contacts avec la Chine et l’Inde.
p.64 : carte représentant la colonisation du Pacifique, les îles Andaman sont entourées de terres exondées qui les rattachent au continent asiatique, ce qui a permis aux populations d’accéder à cet archipel.»
Bruno Judic dans son livre, L’océan indien au Moyen-âge donne une version similaire :
« Les étapes anciennes du peuplement de l’Asie du Sud-est semblent marquées par un phénomène de glissement progressif du nord vers le sud. A des populations négritiques ou mélanésiennes, succèdent des populations austronésiennes. Les populations austronésiennes sont caractérisées en tant que groupe linguistique depuis Hawaï et l’île de Pâques jusqu’à Madagascar en passant par Taïwan, le Cambodge, la Malaisie et l’Indonésie. Ces austronésiens sont à leur tour recouverts par des populations mongoloïdes et tibéto-birmanes représentés aujourd’hui par les Vietnamiens, les Thaïlandais et les Birmans. Ce processus a commencé à une époque préhistorique et se poursuit jusqu’au XIVème et XVème siècle. »
On peut donc supposer que les migrations de populations venues d’Asie centrale seraient à l’origine d’un métissage qui expliquerait que les populations négritiques de la péninsule d’Asie du Sud-Est, ont au fil du temps, perdu certains caractères physiques dont leur pigmentation. Les Jarawa s’étant retirés sur une île et vivant en autarcie, il est probable qu’il n’y ait pas eu de métissage et qu’ils aient gardé un ADN très proche de l’originel.
Pour les autres îles, les voies maritimes ont permis leur peuplement :
Les peuples premiers: des mémoires en danger:
« Au Paléolithique, la Nouvelle-Guinée, l’Australie et la Tasmanie étaient soudées et formaient le continent du Sahul, séparé de l’Asie par des détroits peu profonds qui facilitèrent l’arrivée sur son sol de flux migratoires. Entre -40 000 et -10 000 ans, les populations de type négrito s’installèrent en Nouvelle-Guinée et en Australie. Le Sahul se morcela ensuite en de multiples fragments insulaires, avec la montée des eaux à la fin des glaciations. L’Australie et la Nouvelle-Guinée se séparèrent, avec des populations négritos totalement isolées. Au même moment, venant d’Asie du Sud-est, de petits groupes mélanésiens peuplèrent peu à peu les îles de Polynésie. Ils traversèrent l’océan sur des pirogues à double coque, capables d’embarquer jusqu’à 60 personnes (au début des migrations la pirogue était creusée dans un tronc d’arbre), et précédées de pirogues à balancier plus légères. Ainsi furent progressivement colonisées la Micronésie, la Mélanésie (îles Fidji, Nouvelle-Calédonie, archipel des Vanuatu) et la Polynésie (îles Tonga, Samoa, Hawaï, de Pâques). A la fin de ces vagues de migrations originaires de Mélanésie, des Maoris venus des îles de la Société s’installèrent en Nouvelle-Zélande, d’abord vers l’an mille de notre ère, puis en une seconde vague au XVIème siècle, peu avant la venue des Européens. »
L’île de Madagascar a, elle aussi, été peuplée en plusieurs étapes :
« Les musulmans trouvèrent l’île déjà peuplée par des Africains (Bantous) primitifs auxquels s’étaient ajoutés, du IIème au IVème siècle de notre ère, des Indonésiens plus évolués venus probablement de Sumatra. On ignore aussi quelles voies ces populations empruntèrent. Selon l’hypothèse la plus vraisemblable, elles durent s’effectuer grâce aux moussons qui rendent possible le passage de l’Indonésie vers Ceylan, puis, de là, vers Madagascar, soit par la côte orientale d’Afrique. Les navires utilisés étaient sans doute des pirogues à balancier. » Histoire de l'océan Indien, Auguste Toussaint
Le peuplement des îles s’est donc fait principalement depuis l’Asie et les analyses ADN effectuées récemment ont étayé cette donnée. D’autres hypothèses ont néanmoins été développées, ainsi pour l’anthropologue norvégien Thor Heyerdahl le peuplement des îles du Pacifique se serait fait depuis l’Amérique du Sud et non depuis l’Asie, il étaya son hypothèse avec l’expédition du Kon-Tiki.
Parmi tous ces ouvrages, le plus complet pour appréhender le peuplement des îles et continents est L’Atlas historique de l'humanité. Il est illustré de nombreuses cartes couvrant l’évolution des peuplements et des populations depuis la naissance de l’humanité jusqu’à nos jours.

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