les fôrets précèdent les hommes, les déserts les suivent
DIVERS
+ DE 2 ANS
Le 25/07/2014 à 13h16
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Question d'origine :
bonjour,
j'aimerai savoir quelle est le sens de cette citation, et comment la circonscrire aux grands enjeux de notre société actuelle avec la déforestation en Afrique, l'industrialisation et autres
Réponse du Guichet

Bonjour,
Cette citation « les fôrets précèdent les hommes, les déserts les suivent » a souvent été attribuée à Châteaubriand, il a été démontré qu’il n’en était pas l’auteur. (Voir cet article de la revue Socio-logos)
Le sens de cette citation est que l’homme détruit les forêts pour ses besoins et qu’à force de les exploiter, il ne reste à la place que le désert.
C’est le sens que donne Guy Puech à cette citation dans son article « L’homme et la forêt » :
« Dans les sociétés premières, pour sacrifier à la terminologie actuelle, la forêt est reine : elle est inviolée, elle est au coeur des cultures, elle agit même sur les morphologies humaines (l’africain des savanes est très différent de l’africain de la grande forêt).
Aujourd’hui, par contre, la densité humaine est telle (il n’est pas dans mon propos d’aborder ce sujet, oh combien délicat…), la densité humaine est telle que c’est l’homme qui impose sa marque à la forêt : en dehors de quelques exceptions qui ont tendance à se réduire, l’homme pénètre la forêt, la modifie ; elle a largement cédé la place à d’autres utilisations du sol. Vous connaissez la formule choc de Chateaubriand : « la forêt précède l’homme, les déserts le suivent.
I. L’évolution dans le temps des forêts
Notre planète se déboise, disent les médias, avec tous les effets négatifs bien connus de ce déboisement (érosion des sols, modification des microclimats, atteintes aux paysages) ; il faut donc tout faire pour protéger la forêt. L’axiome (notre planète se déboise) n’en est pas un, car c’est à la fois vrai et faux. Il faut nuancer. Il y a en fait deux phénomènes inverses qui accroissent une fois de plus les disparités entre monde développé et monde en développement.
1) Dans les pays en développement l’évolution est souvent dramatique :
La population croit de façon exponentielle, je devrais dire suicidaire. Prenons l’exemple de l’Afrique sub-saharienne. Il y a plus de 600 millions de noirs en Afrique ; leur croissance démographique moyenne est, malgré le sida, de l’ordre de prés de 3% par an, c’est-à-dire que la population double pratiquement tous les 20 ans ; il y a 4 fois plus d’africains maintenant que dans les années 1960, à l’époque des indépendances, ce qui explique bien des choses. Il y aurait, selon les démographes, 40 à 50 000 Africains de plus tous les jours, qu’il faut nourrir. Les surfaces de culture nécessaires, puisqu’il n’y a aucune amélioration des rendements agricoles, croissent également de façon exponentielle au détriment de la forêt dont les surfaces se réduisent de plus en plus, alors que les besoins en bois des populations croissent (les noirs consomment en moyenne 1m3 de bois par personne et par an pour faire cuire leur nourriture). Les forêts voient donc leurs surfaces se réduire, elles sont surexploitées et se dégradent. Le désert avance avec ses vents de sable destructeurs. C’est un scénario catastrophe qui se réalise sous nos yeux ; il y aurait pourtant des remèdes, mais il n’est pas dans mon propos de vous en parler.
2) Par contre dans les pays développés, l’évolution est rigoureusement inverse :
La population est relativement maîtrisée alors que les rendements agricoles ont connu une croissance spectaculaire. Il y a surproduction agricole, mise en jachères et reprise partielle par la forêt, naturellement ou artificiellement, des terrains laissés libres. Malgré l’urbanisation et l’emprise des voies de communication, gros consommateurs d’espaces naturels, les surfaces des forêts croissent dans tous les pays développés à climat tempéré. […]
Les situations sont donc totalement inversées.
Depuis un siècle la déprise agricole est progressive et très forte, et les surfaces forestières n’ont cessé de s’accroître, soit naturellement dans les terres et pâtures abandonnées (le pin sylvestre les envahit), soit par des reboisements artificiels, très importants après la dernière guerre grâce à l’aide du Fonds Forestier National.
En 1800 la forêt française couvrait 8 à 9 millions d’hectares surexploités ; aujourd’hui elle a pratiquement doublé de surface ; elle couvre 15 à 16 millions d’hectares, soit 28% du territoire et ces 15 à 16 millions d’hectares sont très sous-exploités (j’y reviendrai).
Revenons à des problèmes plus généraux.
Si nous comparons l’évolution de la France et de l’Afrique subsaharienne, nous constatons, d’un point de vue historique, et cela me parait intéressant, que la situation du binôme «agricultureforêt» était la même au XVIIIème en France et aujourd’hui en Afrique : augmentation de la population et rendements agricoles stagnants avec comme conséquence la destruction progressive de la forêt par l’agriculture. La tendance n’a pu s’inverser en France (et de façon plus générale dans tous les pays développés) que par des mécanismes à base culturelle ; la révolution agricole a précédé et permis le développement industriel et économique. Qu’en sera-t-il de l’Afrique ? Son développement devrait démarrer par une révolution agricole qui permettrait de respecter la nature et la forêt…Vaste problème.»
A la suite, les problèmes que rencontrent les forêts face aux changements climatiques et à l’influence de l’être humain sont développés ainsi que les problématiques rencontrées et les solutions possibles à y apporter.
Vous pouvez consulter les articles ci-dessous pour approfondir votre réflexion :
- Les forêts du monde sur l’ONF.
- Yacouba, le burkinabé qui arrête le désert.
- Contre le réchauffement, plantons des forêts dans les déserts sur Futura-sciences.
- Des forêts et des hommes sur l’IRD.
Pour finir, quelques ouvrages disponibles à la bibliothèque :
- Mieux intégrer la biodiversité dans la gestion forestière de Marion Gosselin et Yoan Paillet.
- Agroforesterie : des arbres et des cultures de Christian Dupraz et Fabien Liagre.
- La vie de la forêt de Bernard Fisschener.
- Le ciel ne va pas nous tomber sur la tête : 15 grands scientifiques géographes nous rassurent sur notre avenir.
- La société des arbres réal. et scénario de Delphine Moreau. (DVD)
Bonne journée.
Cette citation « les fôrets précèdent les hommes, les déserts les suivent » a souvent été attribuée à Châteaubriand, il a été démontré qu’il n’en était pas l’auteur. (Voir cet article de la revue Socio-logos)
Le sens de cette citation est que l’homme détruit les forêts pour ses besoins et qu’à force de les exploiter, il ne reste à la place que le désert.
C’est le sens que donne Guy Puech à cette citation dans son article « L’homme et la forêt » :
« Dans les sociétés premières, pour sacrifier à la terminologie actuelle, la forêt est reine : elle est inviolée, elle est au coeur des cultures, elle agit même sur les morphologies humaines (l’africain des savanes est très différent de l’africain de la grande forêt).
Aujourd’hui, par contre, la densité humaine est telle (il n’est pas dans mon propos d’aborder ce sujet, oh combien délicat…), la densité humaine est telle que c’est l’homme qui impose sa marque à la forêt : en dehors de quelques exceptions qui ont tendance à se réduire, l’homme pénètre la forêt, la modifie ; elle a largement cédé la place à d’autres utilisations du sol. Vous connaissez la formule choc de Chateaubriand : « la forêt précède l’homme, les déserts le suivent.
I. L’évolution dans le temps des forêts
Notre planète se déboise, disent les médias, avec tous les effets négatifs bien connus de ce déboisement (érosion des sols, modification des microclimats, atteintes aux paysages) ; il faut donc tout faire pour protéger la forêt. L’axiome (notre planète se déboise) n’en est pas un, car c’est à la fois vrai et faux. Il faut nuancer. Il y a en fait deux phénomènes inverses qui accroissent une fois de plus les disparités entre monde développé et monde en développement.
1) Dans les pays en développement l’évolution est souvent dramatique :
La population croit de façon exponentielle, je devrais dire suicidaire. Prenons l’exemple de l’Afrique sub-saharienne. Il y a plus de 600 millions de noirs en Afrique ; leur croissance démographique moyenne est, malgré le sida, de l’ordre de prés de 3% par an, c’est-à-dire que la population double pratiquement tous les 20 ans ; il y a 4 fois plus d’africains maintenant que dans les années 1960, à l’époque des indépendances, ce qui explique bien des choses. Il y aurait, selon les démographes, 40 à 50 000 Africains de plus tous les jours, qu’il faut nourrir. Les surfaces de culture nécessaires, puisqu’il n’y a aucune amélioration des rendements agricoles, croissent également de façon exponentielle au détriment de la forêt dont les surfaces se réduisent de plus en plus, alors que les besoins en bois des populations croissent (les noirs consomment en moyenne 1m3 de bois par personne et par an pour faire cuire leur nourriture). Les forêts voient donc leurs surfaces se réduire, elles sont surexploitées et se dégradent. Le désert avance avec ses vents de sable destructeurs. C’est un scénario catastrophe qui se réalise sous nos yeux ; il y aurait pourtant des remèdes, mais il n’est pas dans mon propos de vous en parler.
2) Par contre dans les pays développés, l’évolution est rigoureusement inverse :
La population est relativement maîtrisée alors que les rendements agricoles ont connu une croissance spectaculaire. Il y a surproduction agricole, mise en jachères et reprise partielle par la forêt, naturellement ou artificiellement, des terrains laissés libres. Malgré l’urbanisation et l’emprise des voies de communication, gros consommateurs d’espaces naturels, les surfaces des forêts croissent dans tous les pays développés à climat tempéré. […]
Les situations sont donc totalement inversées.
Depuis un siècle la déprise agricole est progressive et très forte, et les surfaces forestières n’ont cessé de s’accroître, soit naturellement dans les terres et pâtures abandonnées (le pin sylvestre les envahit), soit par des reboisements artificiels, très importants après la dernière guerre grâce à l’aide du Fonds Forestier National.
En 1800 la forêt française couvrait 8 à 9 millions d’hectares surexploités ; aujourd’hui elle a pratiquement doublé de surface ; elle couvre 15 à 16 millions d’hectares, soit 28% du territoire et ces 15 à 16 millions d’hectares sont très sous-exploités (j’y reviendrai).
Revenons à des problèmes plus généraux.
Si nous comparons l’évolution de la France et de l’Afrique subsaharienne, nous constatons, d’un point de vue historique, et cela me parait intéressant, que la situation du binôme «agricultureforêt» était la même au XVIIIème en France et aujourd’hui en Afrique : augmentation de la population et rendements agricoles stagnants avec comme conséquence la destruction progressive de la forêt par l’agriculture. La tendance n’a pu s’inverser en France (et de façon plus générale dans tous les pays développés) que par des mécanismes à base culturelle ; la révolution agricole a précédé et permis le développement industriel et économique. Qu’en sera-t-il de l’Afrique ? Son développement devrait démarrer par une révolution agricole qui permettrait de respecter la nature et la forêt…Vaste problème.»
A la suite, les problèmes que rencontrent les forêts face aux changements climatiques et à l’influence de l’être humain sont développés ainsi que les problématiques rencontrées et les solutions possibles à y apporter.
Vous pouvez consulter les articles ci-dessous pour approfondir votre réflexion :
- Les forêts du monde sur l’ONF.
- Yacouba, le burkinabé qui arrête le désert.
- Contre le réchauffement, plantons des forêts dans les déserts sur Futura-sciences.
- Des forêts et des hommes sur l’IRD.
Pour finir, quelques ouvrages disponibles à la bibliothèque :
- Mieux intégrer la biodiversité dans la gestion forestière de Marion Gosselin et Yoan Paillet.
- Agroforesterie : des arbres et des cultures de Christian Dupraz et Fabien Liagre.
- La vie de la forêt de Bernard Fisschener.
- Le ciel ne va pas nous tomber sur la tête : 15 grands scientifiques géographes nous rassurent sur notre avenir.
- La société des arbres réal. et scénario de Delphine Moreau. (DVD)
Bonne journée.
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