Question d'origine :
Bonjour, On ma dit que Marie-Curie avait demandé a ce que son nom suive toujours le nom de Pierre-Curie pour les établissements scientifiques... Mais je ne trouve la preuve nulle part. Pouvez-vous m'aider svp Merci Cordialement François
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 20/01/2021 à 16h30
Bonjour,
Tout d’abord, sachez que du fait du télétravail, nous n’avons pas accès à l’intégralité de nos collections physiques, ce qui peut avoir des conséquences sur nos réponses.
En l’occurrence, nous n’avons pas trouvé de source reprenant une citation de Marie Curie en ce sens, même si une telle citation serait tout à fait cohérente avec ce que nous pouvons apprendre sur la relation fusionnelle entre les deux scientifiques.
Une biographie lisible sur le site du Musée Curie, ouvert à l'emplacement du dernier laboratoire parisien de Marie Curie, raconte en effet que très vite après leur mariage en 1897, Pierre abandonna ses travaux personnels pour participer aux recherches de Marie sur ce qu'elle devait plus tard nommer la radioactivité. Ce travail commun semble s'être déroulé dans une passion frénétique de recherche, malgré des conditions matérielles extrêmement difficiles et des locaux plus qu'inconfortables. Il fut couronné de succès, puisque les époux obtinrent le prix Nobel de physique en 1903, ex-aequo avec Henri Becquerel.
Après la mort accidentelle de Pierre en 1906, Marie poursuivit leurs recherches, qui lui valurent un second prix Nobel, de chimie cette fois, en 1911, tout en ayant à élever seule leurs deux filles :
En même temps qu’elle prend soin de l’éducation de ses deux filles, elle se bat pour obtenir un laboratoire où continuer ses recherches et poursuivre leur oeuvre commune, à Pierre Curie et à elle. «Je souhaite que la radioactivité, une science née en France, puisse s’y développer. Nous avons besoin pour cela d’un institut pour les recherches sur la radioactivité et ses applications. Le directeur de l’Institut devra non seulement diriger les recherches scientifiques pures, mais il devra aussi contribuer au développement de l’industrie des substances radioactives, au moyen de relations avec les industriels, comme cela a lieu actuellement. Il devra de plus aider par ses conseils techniques le progrès des recherches biologiques et médicales» (Marie Curie)
Un grand laboratoire pour marie curie
L’Université de Paris et l’Institut Pasteur décident de lui construire un laboratoire en décembre 1909. Marie Curie, dans "Pierre Curie", le livre qu’elle a publié en souvenir de son compagnon de vie et de travail écrit : «Afin d’assurer la continuité de son oeuvre, la Faculté des Sciences de Paris me fit le très grand honneur de le remplacer dans la chaire qu’il occupait.
J’acceptai ce lourd héritage, avec l’espoir de faire édifier un jour, en son souvenir, le laboratoire digne de lui qu’il n’a jamais eu, mais qui profiterait à d’autres pour développer sa pensée. Cet espoir est maintenant en partie réalisé, grâce à l’initiative commune de l’Université et l’Institut Pasteur, qui a abouti à la création d’un Institut du radium, composé de deux laboratoires, Curie et Pasteur, destinés à l’étude physico-chimique et à l’étude biologique des rayons du radium.» (Marie Curie, 1923)
Pour perpétuer la mémoire de son mari et partenaire de recherche Marie Curie a en effet publié en 1924 une biographie émouvante, qu’on peut lire sur Wikisource. Notons que dès 1906, la continuité qu'elle souhaite apporter à son oeuvre est soulignée par le fait qu'elle "reprend le cours de Pierre Curie à la Sorbonne à l’endroit même où il l’a interrompu", devenant la première femme à enseigner au sein de la glorieuse université française.
La reconnaissance des femmes scientifiques était loin d'être acquise à l'époque. À ce sujet, un article de Karin Blanc, "Le couple Curie et les prix Nobel", consultable sur OpenEdition, nous apprend qu'en 1903, Pierre Curie, ayant eu vent de sa nomination pour le Nobel, avait dû se battre pour que sa femme y soit associée. Voici ce qu'il écrivit au mathématicien Gösta Mittag-Lefflerreçoit :
Vous avez été assez aimable pour m’informer qu’il avait été question de moi pour le prix Nobel. Je ne sais si ce bruit a beaucoup de consistance, mais dans le cas où il serait vrai que l’on songe sérieusement à moi, je désirerais beaucoup que l’on me considère comme solidaire avec Mme Curie dans nos recherches sur les corps radioactifs. C’est, en effet, son premier travail qui a déterminé la découverte des nouveaux corps et sa part est très grande dans cette découverte (elle a aussi déterminé le poids atomique du radium). Je crois que si nous étions disjoints en cette circonstance, cela étonnerait beaucoup de gens. Puis ne trouvez-vous pas que ce serait plus joli au point de vue artistique [souligné par l’auteur] de nous laisser ainsi associés ?
Il serait extrêmement peu convenable de ma part de faire une démarche quelconque auprès des membres de la commission. Mais si, cependant, vous trouviez une occasion de leur faire savoir mon opinion sur ce point particulier, cela me ferait plaisir. J’ai envoyé en Suède la thèse de Mme Curie [soutenue à Paris le 26 juin 1903] et je pense qu’ils verront eux-mêmes que sa part est aussi grande que la mienne dans ce travail.
Quoi qu'il en soit, nous ne manquerons pas de consulter les ouvrages de nos collections sur les Curie dès que nous en aurons la possibilité. En attendant, nous avons contacté l'équipe du Musée Curie pour lui demander de nous transmettre tout élément qui pourrait répondre à votre question, et nous vous transmettrons évidemment sa réponse éventuelle.
Pour aller plus loin :
- Marie Curie [Livre] : la scientifique aux deux prix Nobel / scénario, Céka ; dessin et couleurs, Yigaël
- Marie Curie [Livre] / Janine Trotereau
- Marie Curie [Livre] / Susan Quinn ; trad. de l'anglais par Laurent Muhleisen
- Marie Curie et son laboratoire [Livre] : sciences et industrie de la radioactivité en France / Soraya Boudia ; préf. Dominique Pestre
- Marie Curie [Livre] : une femme dans son siècle / Musée Curie, Marion Augustin ; introduction de Hélène Langevin-Joliot ; avec la collaboration de Nathalie Pigeard-Micault
- Lettres [Livre] / Marie Curie et ses filles ; édition réalisée par Hélène Langevin-Joliot et Monique Bordry
- Dans les pas de Marie Curie [D.V.D.]/ / réal. de Krzysztof Rogulski$
Bonne journée.
Tout d’abord, sachez que du fait du télétravail, nous n’avons pas accès à l’intégralité de nos collections physiques, ce qui peut avoir des conséquences sur nos réponses.
En l’occurrence, nous n’avons pas trouvé de source reprenant une citation de Marie Curie en ce sens, même si une telle citation serait tout à fait cohérente avec ce que nous pouvons apprendre sur la relation fusionnelle entre les deux scientifiques.
Une biographie lisible sur le site du Musée Curie, ouvert à l'emplacement du dernier laboratoire parisien de Marie Curie, raconte en effet que très vite après leur mariage en 1897, Pierre abandonna ses travaux personnels pour participer aux recherches de Marie sur ce qu'elle devait plus tard nommer la radioactivité. Ce travail commun semble s'être déroulé dans une passion frénétique de recherche, malgré des conditions matérielles extrêmement difficiles et des locaux plus qu'inconfortables. Il fut couronné de succès, puisque les époux obtinrent le prix Nobel de physique en 1903, ex-aequo avec Henri Becquerel.
Après la mort accidentelle de Pierre en 1906, Marie poursuivit leurs recherches, qui lui valurent un second prix Nobel, de chimie cette fois, en 1911, tout en ayant à élever seule leurs deux filles :
En même temps qu’elle prend soin de l’éducation de ses deux filles, elle se bat pour obtenir un laboratoire où continuer ses recherches et poursuivre leur oeuvre commune, à Pierre Curie et à elle. «Je souhaite que la radioactivité, une science née en France, puisse s’y développer. Nous avons besoin pour cela d’un institut pour les recherches sur la radioactivité et ses applications. Le directeur de l’Institut devra non seulement diriger les recherches scientifiques pures, mais il devra aussi contribuer au développement de l’industrie des substances radioactives, au moyen de relations avec les industriels, comme cela a lieu actuellement. Il devra de plus aider par ses conseils techniques le progrès des recherches biologiques et médicales» (Marie Curie)
L’Université de Paris et l’Institut Pasteur décident de lui construire un laboratoire en décembre 1909. Marie Curie, dans "Pierre Curie", le livre qu’elle a publié en souvenir de son compagnon de vie et de travail écrit : «Afin d’assurer la continuité de son oeuvre, la Faculté des Sciences de Paris me fit le très grand honneur de le remplacer dans la chaire qu’il occupait.
J’acceptai ce lourd héritage, avec l’espoir de faire édifier un jour, en son souvenir, le laboratoire digne de lui qu’il n’a jamais eu, mais qui profiterait à d’autres pour développer sa pensée. Cet espoir est maintenant en partie réalisé, grâce à l’initiative commune de l’Université et l’Institut Pasteur, qui a abouti à la création d’un Institut du radium, composé de deux laboratoires, Curie et Pasteur, destinés à l’étude physico-chimique et à l’étude biologique des rayons du radium.» (Marie Curie, 1923)
Pour perpétuer la mémoire de son mari et partenaire de recherche Marie Curie a en effet publié en 1924 une biographie émouvante, qu’on peut lire sur Wikisource. Notons que dès 1906, la continuité qu'elle souhaite apporter à son oeuvre est soulignée par le fait qu'elle "reprend le cours de Pierre Curie à la Sorbonne à l’endroit même où il l’a interrompu", devenant la première femme à enseigner au sein de la glorieuse université française.
La reconnaissance des femmes scientifiques était loin d'être acquise à l'époque. À ce sujet, un article de Karin Blanc, "Le couple Curie et les prix Nobel", consultable sur OpenEdition, nous apprend qu'en 1903, Pierre Curie, ayant eu vent de sa nomination pour le Nobel, avait dû se battre pour que sa femme y soit associée. Voici ce qu'il écrivit au mathématicien Gösta Mittag-Lefflerreçoit :
Vous avez été assez aimable pour m’informer qu’il avait été question de moi pour le prix Nobel. Je ne sais si ce bruit a beaucoup de consistance, mais dans le cas où il serait vrai que l’on songe sérieusement à moi, je désirerais beaucoup que l’on me considère comme solidaire avec Mme Curie dans nos recherches sur les corps radioactifs. C’est, en effet, son premier travail qui a déterminé la découverte des nouveaux corps et sa part est très grande dans cette découverte (elle a aussi déterminé le poids atomique du radium). Je crois que si nous étions disjoints en cette circonstance, cela étonnerait beaucoup de gens. Puis ne trouvez-vous pas que ce serait plus joli au point de vue artistique [souligné par l’auteur] de nous laisser ainsi associés ?
Il serait extrêmement peu convenable de ma part de faire une démarche quelconque auprès des membres de la commission. Mais si, cependant, vous trouviez une occasion de leur faire savoir mon opinion sur ce point particulier, cela me ferait plaisir. J’ai envoyé en Suède la thèse de Mme Curie [soutenue à Paris le 26 juin 1903] et je pense qu’ils verront eux-mêmes que sa part est aussi grande que la mienne dans ce travail.
Quoi qu'il en soit, nous ne manquerons pas de consulter les ouvrages de nos collections sur les Curie dès que nous en aurons la possibilité. En attendant, nous avons contacté l'équipe du Musée Curie pour lui demander de nous transmettre tout élément qui pourrait répondre à votre question, et nous vous transmettrons évidemment sa réponse éventuelle.
- Marie Curie [Livre] : la scientifique aux deux prix Nobel / scénario, Céka ; dessin et couleurs, Yigaël
- Marie Curie [Livre] / Janine Trotereau
- Marie Curie [Livre] / Susan Quinn ; trad. de l'anglais par Laurent Muhleisen
- Marie Curie et son laboratoire [Livre] : sciences et industrie de la radioactivité en France / Soraya Boudia ; préf. Dominique Pestre
- Marie Curie [Livre] : une femme dans son siècle / Musée Curie, Marion Augustin ; introduction de Hélène Langevin-Joliot ; avec la collaboration de Nathalie Pigeard-Micault
- Lettres [Livre] / Marie Curie et ses filles ; édition réalisée par Hélène Langevin-Joliot et Monique Bordry
- Dans les pas de Marie Curie [D.V.D.]/ / réal. de Krzysztof Rogulski$
Bonne journée.
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 21/01/2021 à 13h30
Bonjour,
Suite à notre sollicitation d'hier, MmeNatalie Pigeard-Micault , historienne et responsable des ressources historiques du Musée Curie , nous fait cette réponse :
"Il est dit que, si Le Pavillon Curie de l'Institut du radium; si la Fondation Curie ou la rue Pierre Curie s'appellent ainsi, c'est à la mémoire de Pierre Curie, (soit à la demande de Marie Curie soit avec seulement son assentiment).
Cependant, jusqu'à présent, je n'ai pu vérifier cette assertion par quelque écrit que ce soit . En ce qui concerne la Fondation Curie, sur laquelle j'ai travaillé, son nom s'est imposé de lui-même notamment parce que le nom Curie (très connu) permettait une communication efficace en matière de collecte de fonds. Le fait qu'à l'origine il s'agissait de la "Fondation Pierre Curie" n'a jamais été validé par les archives.
En tout état de cause, la dénomination Curie, dans le nom de ces institutions, ne pouvait pas explicitement renvoyer à Marie Curie seule.
Ne pas inscrire clairement "Pierre Curie" (sauf pour la rue) mais simplement Curie, semble noter une association des deux dans le nom comme dans la découverte."
Nous la remercions chaleureusement.
Bonne journée.
Suite à notre sollicitation d'hier, Mme
"Il est dit que, si Le Pavillon Curie de l'Institut du radium; si la Fondation Curie ou la rue Pierre Curie s'appellent ainsi, c'est à la mémoire de Pierre Curie, (soit à la demande de Marie Curie soit avec seulement son assentiment).
Cependant, jusqu'à présent,
En tout état de cause, la dénomination Curie, dans le nom de ces institutions, ne pouvait pas explicitement renvoyer à Marie Curie seule.
Ne pas inscrire clairement "Pierre Curie" (sauf pour la rue) mais simplement Curie, semble noter une association des deux dans le nom comme dans la découverte."
Nous la remercions chaleureusement.
Bonne journée.
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