Question d'origine :
Bonjour, la médiathèque souhaite faire réaliser une fresque par une artiste locale en reprenant des personnages récents jeunesse et adulte. Les maisons d'éditions sont consultées pour obtenir l'autorisation. Sans réponse de leur part doit-on annuler le projet? Merci d'avance Bien cordialement
Réponse du Guichet
gds_ctp
- Département : Equipe du Guichet du Savoir
Le 20/08/2021 à 08h06
Bonjour,
Tout d'abord, nous vous rappelons qu'en tant que bibliothécaires généralistes, nos réponses n'ont pas de valeur juridique. Cependant, les nombreuses sources que nous avons trouvées sont assez unanimes pour dire que, malheureusement,une absence de réponse des titulaires des droits ne vaut pas comme autorisation tacite .
Le blog du cabinet d'Emmanuel Pierrat, avocat spécialisé dans le droit de l'édition, dit ainsi :
Le droit d’auteur protège les œuvres littéraires et graphiques, peu importe le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination. Il apparaît ainsi que les personnages de fiction peuvent être protégés par le droit d’auteur. En revanche, pour bénéficier de cette protection, le personnage doit s’incarner à travers une forme tangible – notamment par le dessin – mais également être original, c’est-à-dire refléter l’empreinte de la personnalité de son auteur. C’est ainsi que, répondant à ces conditions, les personnages de Maya l’Abeille, Goldorak et la Panthère rose ont été protégés par le droit d’auteur en tant qu’œuvres de l’esprit.
Les personnages dessinés ou tirés d’une œuvre audiovisuelle ne sont pas les seuls à faire l’objet de cette protection ; les personnages littéraires peuvent également faire l’objet d’une protection être protégés par le droit d’auteur. Dès lors que les caractéristiques physiques et morales d’un personnage issu d’un roman sont suffisamment précises et étoffées par son auteur pour « donner naissance à une personne individualisable », les juges considèrent que le personnage a une consistance suffisante pour être protégé par le droit d’auteur. Dans ce sens, il a été jugé que Tarzan, mais également Jane sa compagne et Chita la guenon, constituaient des oeuvres originales protégées par le droit d’auteur.
En l'occurrence, si les personnages que vous souhaitez faire représenter sur votre fresque sont de création récente, ils ne risquent pas d'être tombés dans le domaine public.
D'après un billet du service Questions ? Réponses ! de l'Enssib, ce principe s'applique même aux oeuvres dont les auteurs n'ont pas pu être identifiés... et une de nos précédentes réponses sur un sujet proche citant le Guide pratique du droit d'auteur d'Anne-Laure Sterin, précisait : "Toute utilisation non expressément autorisée par l'auteur est interdite ".
Nous vous renvoyons également au document du Ministère de l'économie Droit d'auteur, droit à l'image : les étapes essentielles pour utiliser un contenu.
Le détournement et la parodie font toutefois exception. Comme l'explique assez clairement un post du site droit-creation.fr," Lorsque le détournement a pour objet une œuvre protégée par le droit d’auteur (par exemple, le détournement d’un tableau, d’une photographie, d’un personnage de fiction), l’auteur du détournement peut bénéficier de ce que l’on appelle l’exception de « parodie »", en vertu de l’article L 122-5 du Code de la propriété intellectuelle :
A l’instar de Marcel Duchamp en 1919 qui affubla la Joconde de Vinci d’une moustache et d’un bouc et qui apposa les lettres « L.H.O.O.Q. » (signifiant « elle a chaud au cul ») sur cette reproduction de la Joconde, il est donc possible de réaliser une parodie d’une œuvre préexistante sans avoir à solliciter l’autorisation de l’auteur de l’œuvre originale.
En principe,il n’est pas nécessaire de solliciter l’autorisation de l’auteur pour une parodie, qu’elle soit réalisée ou non dans un but commercial (le texte de loi ne fait pas la différence).
Pour être licite, la parodie doit être humoristique et se distinguer nettement de l’œuvre parodiée.
Cependant, comme toujours en matière de droit d’auteur, il convient de veiller au respect dudroit moral de l’auteur. Ainsi, si la parodie est considérée comme portant atteinte à l’intégrité de l’œuvre (par exemple des détournements dégradants, comme ceux du personnage enfantin de « Martine »), l’artiste pourrait se plaindre d’une atteinte à son droit moral afin de la faire sanctionner.
Ledroit moral , par ailleurs, contrairement au droit patrimonial, n'est pas limité dans le temps (voir cette page de la SACD).
Vous pourriez donc imaginer de donner des versions parodiques - non dégradantes, mais comme il s'agit d'un projet destiné à une médiathèque, nous n'en doutons pas - de personnages connus...sauf si ceux-ci ont été déposés comme marques :
Mais souvent,lorsque ce personnage célèbre a fait l’objet d’un développement commercial, il peut également être déposé comme marque (c’est le cas notamment des personnages Disney par exemple). Or, le droit des marques régit ces pratiques d’une manière différente.
Le détournement de marques
Les choses se compliquent lorsque l’objet du détournement est une marque déposée. Il peut s’agir d’un détournement du nom de la marque (par exemple « Tricard » au lieu de « Ricard ») ou encore du logo de la marque, ce qui est le plus fréquent.
En droit des marques, il n’existe pas d’exception de parodie.
La sanction d’un détournement d’un nom ou d’un logo sur le fondement du droit des marques est complexe, mais plus la marque est connue (marque renommée) plus celui-ci risque d’être sanctionné en justice. Cela a été le cas par exemple dans l’affaire RICARD où la Cour d’appel de Paris a considéré que les tee-shirts affichant les mots « SMICARD » ou « TRICAR », avec détournement du logo de la marque, tendaient à « avilir l’image de la marque « RICARD » et à compromettre les efforts de publicité de la marque » (Cour d’appel de Paris, 11 mai 2007, PIBD 2007, III, p. 539).
Il nous semble donc que le mieux que vous puissiez faire serait derelancer les éditeurs encore et encore, en leur faisant peut-être valoir que la reproduction respectueuse de leurs personnages sur un mur de médiathèque ne peut qu'être bénéfique au rayonnement de leur catalogue... ou modifier le projet en fonction des réponses que vous recevez.
Bonne journée.
Tout d'abord, nous vous rappelons qu'en tant que bibliothécaires généralistes, nos réponses n'ont pas de valeur juridique. Cependant, les nombreuses sources que nous avons trouvées sont assez unanimes pour dire que, malheureusement,
Le blog du cabinet d'Emmanuel Pierrat, avocat spécialisé dans le droit de l'édition, dit ainsi :
Les personnages dessinés ou tirés d’une œuvre audiovisuelle ne sont pas les seuls à faire l’objet de cette protection ; les personnages littéraires peuvent également faire l’objet d’une protection être protégés par le droit d’auteur. Dès lors que les caractéristiques physiques et morales d’un personnage issu d’un roman sont suffisamment précises et étoffées par son auteur pour « donner naissance à une personne individualisable », les juges considèrent que le personnage a une consistance suffisante pour être protégé par le droit d’auteur. Dans ce sens, il a été jugé que Tarzan, mais également Jane sa compagne et Chita la guenon, constituaient des oeuvres originales protégées par le droit d’auteur.
En l'occurrence, si les personnages que vous souhaitez faire représenter sur votre fresque sont de création récente, ils ne risquent pas d'être tombés dans le domaine public.
D'après un billet du service Questions ? Réponses ! de l'Enssib, ce principe s'applique même aux oeuvres dont les auteurs n'ont pas pu être identifiés... et une de nos précédentes réponses sur un sujet proche citant le Guide pratique du droit d'auteur d'Anne-Laure Sterin, précisait : "
Nous vous renvoyons également au document du Ministère de l'économie Droit d'auteur, droit à l'image : les étapes essentielles pour utiliser un contenu.
A l’instar de Marcel Duchamp en 1919 qui affubla la Joconde de Vinci d’une moustache et d’un bouc et qui apposa les lettres « L.H.O.O.Q. » (signifiant « elle a chaud au cul ») sur cette reproduction de la Joconde, il est donc possible de réaliser une parodie d’une œuvre préexistante sans avoir à solliciter l’autorisation de l’auteur de l’œuvre originale.
En principe,
Pour être licite, la parodie doit être humoristique et se distinguer nettement de l’œuvre parodiée.
Cependant, comme toujours en matière de droit d’auteur, il convient de veiller au respect du
Le
Vous pourriez donc imaginer de donner des versions parodiques - non dégradantes, mais comme il s'agit d'un projet destiné à une médiathèque, nous n'en doutons pas - de personnages connus...
Mais souvent,
Le détournement de marques
Les choses se compliquent lorsque l’objet du détournement est une marque déposée. Il peut s’agir d’un détournement du nom de la marque (par exemple « Tricard » au lieu de « Ricard ») ou encore du logo de la marque, ce qui est le plus fréquent.
La sanction d’un détournement d’un nom ou d’un logo sur le fondement du droit des marques est complexe, mais plus la marque est connue (marque renommée) plus celui-ci risque d’être sanctionné en justice. Cela a été le cas par exemple dans l’affaire RICARD où la Cour d’appel de Paris a considéré que les tee-shirts affichant les mots « SMICARD » ou « TRICAR », avec détournement du logo de la marque, tendaient à « avilir l’image de la marque « RICARD » et à compromettre les efforts de publicité de la marque » (Cour d’appel de Paris, 11 mai 2007, PIBD 2007, III, p. 539).
Il nous semble donc que le mieux que vous puissiez faire serait de
Bonne journée.
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