Qu'est-ce qui motive le rassemblement des boutiques similaires à Lyon ?
LYON, MÉTROPOLE ET RÉGION
+ DE 2 ANS
Le 20/08/2021 à 20h40
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Question d'origine :
Bonjour, savez vous si le rassemblement de boutiques de même activité (cuisinistes, magasins de peinture et boutiques d’ameublement à différents niveaux du cours de la Liberté et magasins d’équipement moto avenue du Maréchal de Saxe par exemple) sont motivés par une volonté d’urbanisme / une raison / une histoire particulière ? Merci beaucoup
Réponse du Guichet

Bonjour,
Le regroupement de commerces similaires en ville n'est pas rare, et ne constitue pas une spécificité lyonnaise. En réalité, il s'agit même d'une stratégie commerciale bien identifiée, alternative tout aussi légitime (d'un point de vue commercial) que l'évitement.
L’agglomération géographique est réductrice d’incertitude tant pour les firmes que pour les consommateurs (Weber, 1972). Pour les entreprises, le regroupement des commerces fournit, pour les entrants les plus récents, des informations sur la faisabilité de leur projet et sur l’existence de la demande par l’observation des firmes établies. Le regroupement géographique permet également de réduire le coût de recherche d’informations pour le consommateur. Du fait du principe de l’effort minimum (Zipf, 1949), les consommateurs vont privilégier les zones où l’offre est concentrée. Les individus peuvent également regrouper leur visite et se déplacer qu’une fois afin de minimiser leur coût de transport par achat (Jones et Simmons, 1993).
Il existe des externalités positives intermagasins (parfois appelées externalités de demande) qui permettent un accroissement du chiffre d’affaires (Fujita et Thisse, 2002). Le regroupement commercial génère une consommation plus importante qui se répercute sur l’ensemble des magasins. Nelson (1958) est le premier à avoir mis en évidence une relation entre le principe de l’attraction cumulative et la localisation des commerces. source : Quelles stratégies d'implantation vis-à-vis de la concurrence ?
Il n'est guère surprenant de ce fait de voir dans les centres-villes des commerces s'installer dans des quartiers où d'autres commerces du même type existent déjà, surtout dans le cas de commerces spécifiques ; plus une zone commerciale est identifiée par un type de commerces, plus il devient avantageux - en terme de visibilité notamment - pour un commerce du même type de s'y installer, ce qui provoque des effets d'attraction.
Est-il possible cependant d'imaginer derrière ces regroupements une volonté municipale ? Et d'abord, quelles sont les compétences de la municipalité dans l'implantation des commerces en centre-ville ?
Dans le cadre de l'urbanisme, le principal levier d'action publique passe par un Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT), fixant collectivement les règles générales des projets à mener sur les territoires. Plus spécifiquement, dans le SCOT, c'est le document d’aménagement artisanal et commercial (DAAC) qui va déterminer éventuellement les conditions d’implantation des équipements commerciaux :
Le DAAC détermine les conditions d’implantation des équipements commerciaux qui, du fait de leur importance, sont susceptibles d’avoir un impact significatif sur l’aménagement du territoire, le commerce de centre-ville et le développement durable ; Ces conditions sont liées à la consommation économe de l’espace (notamment en entrée de ville, par la compacité des formes bâties), l’utilisation prioritaire des surfaces commerciales vacantes et l’optimisation des surfaces dédiées au stationnement. Les conditions portent également sur la desserte par les transports collectifs et leur accessibilité aux piétons et aux cyclistes ainsi que sur la qualité environnementale, architecturale et paysagère (notamment au regard de la performance énergétique et de la gestion des eaux) des équipements commerciaux.
Le DAAC localise les secteurs d’implantation périphérique ainsi que les centralités urbaines dans lesquels se posent des enjeux spécifiques (revitalisation des centres-villes, maintien d’une offre commerciale diversifiée de proximité, cohérence de localisation des équipements et maîtrise des flux, consommation économe de l’espace et préservation des paysages...). Il prévoit les conditions d’implantation, le type d’activité et la surface de vente maximale des équipements commerciaux spécifiques à ces secteurs source : Le cadre légal de l'urbanisme commercial
L’implantation d’un commerce, quelle que soit sa taille, dépend depuis longtemps d’un certain nombre d’autorisations administratives délivrées par la commune : permis de construire, autorisation de travaux. Celle-ci peut également instaurer des règles plus restrictives que la réglementation nationale relative à la publicité et aux enseignes. Mais, depuis les années 2000, les marges de manœuvre des collectivités locales se sont progressivement renforcées. À la suite de plusieurs évolutions législatives, de nouveaux outils sont apparus (Fabre, 2010 ; Moreno, 2014) : meilleure intégration du commerce dans les documents de planification (SCOT et PLU), instauration d’un droit de préemption sur les baux commerciaux, les fonds artisanaux et les fonds de commerce dans le cadre de périmètres de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité, et, plus récemment, possibilité de créer des sociétés foncières. Tandis qu’à l’origine, il s’agissait de réglementer l’implantation des grandes surfaces en veillant à l’application des règles de concurrence à l’échelle de la ville (Mérenne-Schoumaker, 1994), les pouvoirs publics peuvent désormais intervenir directement sur l’ensemble du tissu commercial, dans le cadre d’une pensée de la ville durable qui articule les enjeux commerciaux avec des enjeux économiques, sociaux ou environnementaux (Moreno, 2014). source : Commerce et politiques publiques dans les quartiers populaires.
On voit que si la municipalité possède certaines latitudes concernant l'implantation des commerces, le regroupement de commerces n'est pas un objectif essentiel de ses compétences en la matière.
Pour approfondir le sujet, il peut être intéressant de consulter les comptes-rendus du conseil municipal pour comprendre les leviers d'action d'une municipalité dans l'organisation commerciale d'un quartier.
Depuis janvier 2007, le 4e arrondissement est inscrit dans un dispositif d’opération urbaine visant à structurer et développer le tissu commercial et artisanal. Les partenaires, à savoir : l’Etat, la Ville de Lyon, la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon, la Chambre de Métiers et de l’Artisanat du Rhône, l’Association des commerçants et artisans Lyon Côté Croix-Rousse et l’Association Lyon Croix-Rousse Métiers d’Art ont travaillé en cohérence avec le Schéma Directeur d'Urbanisme Commercial (SDUC) de l'agglomération lyonnaise, pour répondre aux enjeux suivants :
- renforcer l’attractivité du plateau de la Croix-Rousse ;
- favoriser la venue de nouveaux acteurs économiques ;
- faire de la Croix-Rousse un pôle commercial majeur ;
- drainer une zone de chalandise plus large ;
- freiner l’évasion commerciale.source: compte rendu du conseil municipal du 19 act. 2009
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