Pourquoi une rue d'Orléans porte-t-elle le nom de "rue des sept dormants" ?
Question d'origine :
Bonjour,
en dehors de la légende lisible dans le Coran (Sourate de la caverne) et dans la Légende Dorée, quelles peuvent être les raisons qui ont fait qu'une rue d'Orléans porte le nom de "rue des sept dormants".
Merci de votre réponse.
P. H.
Réponse du Guichet
Au temps des croisades, des prisonniers musulmans ont été transférés à Orléans et y pratiquaient leurs dévotions. "La rue des Sept dormant, faisant suite à la rue de la Musique ronde devenue rue des Africains, peut laisser penser que ce sont bien les Musulmans installés dans ce quartier qui sont également à l’origine de cette dénomination. Rien dans l’histoire chrétienne d’Orléans ne signale le culte des sept dormants. Tandis qu’il est certain que dans la religion musulmane il tient une très grande place. La 18e sourate du Coran fait obligation aux musulmans de rappeler l’histoire des sept enfants d’Éphèse à la prière du vendredi".
Bonjour,
Voici ce qu'indique le site internet LoiretSecret - Blog de la Bibliothèque diocésaine d'Orléans, extrait auquel nous avons ajouté quelques liens vers les documents cités :
La Rue des Sept-Dormants est une rue très ancienne de la 1ère enceinte.
Elle commence au cloître Saint Pierre le Puellier et aboutit par son joli carrefour à la rue de la Charpenterie.Elle porte déjà ce nom sur le plan de Fleury (1640) et le portait déjà en 1543 dans la liste des rues d’Orléans à cette époque (cf : « inv.som. des arch. De Loiret A 1857, paroisse Saint Pierre le Puellier)
Le nom évoque la légende des sept-dormants d’Ephèse :
Entre 250 et 253, sept jeunes hommes de la bonne société d’Éphèse refusent de sacrifier au culte de l’empereur Dèce et à ses idoles : ils se sont secrètement convertis au christianisme. Arrêtés et interrogés, ils acceptent de renoncer à tous leurs biens et aux honneurs liés à leur rang mais n’en sont pas moins emprisonnés. Par chance, ils parviennent à s’enfuir et à se réfugier dans une caverne sur une hauteur de la ville où ils s’endorment.
Hélas, leur cachette est découverte et, sur ordre de l’empereur, murée par des soldats. Selon la tradition chrétienne, les jeunes hommes se seraient réveillés environ deux cents ans plus tard – au Ve siècle donc – avec l’impression de n’avoir dormi qu’une nuit. Témoignant par là d’une possible résurrection de la chair – contestée à cette époque –, l’un d’eux serait sorti chercher de la nourriture. Les sept jeunes gens seraient ensuite retournés dans leur grotte avant de s’endormir pour l’éternité.
«L’édifiante histoire des emmurés vivants connut un foudroyant succès. Très vite, elle essaima aux confins du monde méditerranéen, de l’Occident latin à la péninsule Arabique», rapporte Manoël Pénicaud, chercheur au CNRS, spécialiste des pèlerinages et des lieux saints partagés, qui leur a consacré sa thèse.
Les Sept Dormants font très tôt l’objet d’une immense vénération populaire. La légende s’étend vers l’Occident chrétien jusqu’à Grégoire de Tours, auteur du premier récit en latin, et se propage simultanément vers la Syrie, l’Égypte et l’Abyssinie. Leurs sept noms ont été gravés au VIIIe siècle en copte sur les murs d’une chapelle de Nubie.
Un culte islamo-chrétien leur est rendu encore aujourd’hui.
Mais que font ces sept dormants à Orléans ?
Eugène Lepage [dans Les Rues d'Orléans] nous dit, sans sources hélas, que : « la rue des sept dormants, comme les rues de la Tour et des Africains, dut être comprise dans le quartier attribué aux prisonniers ramenés D’Égypte ou de Syrie, au moment des croisades » [«Nous savons déjà que, parmi eux, se trouvaient des troupes de musiciens et des bateleurs. Peut-être possédaient-ils aussi des simulateurs, qui, pour amuser le public et en tirer quelque aumône, simulaient comme des Fakirs de l’Inde le sommeil pendant de longs jours. Ces derniers pouvaient avoir élu domicile en cette rue, à laquelle le peuple a dû donner le nom qu’elle porte encore aujourd’hui.»].
En lisant Vergnaud-Romagnasi, nous constatons qu'il confirme cette thèse.
Mais creusons encore. Nous trouvons un article passionnant du Dr Biancardini en 1981 dans les Mémoires de la Société d’Agriculture, sciences, belles-lettres et arts d’Orléans.
A Orléans, malgré de multiples recherches, on n’a pu trouver de preuves de l’existence, dans le passé, chez les catholiques, du culte des sept dormants. Mais il est a peu près certain qu’au temps des croisades, des prisonniers musulmans avaient été transférés à Orléans et y pratiquaient leurs dévotions.
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La rue des Sept dormant, faisant suite à la rue de la Musique ronde devenue rue des Africains, peut laisser penser que ce sont bien les Musulmans installés dans ce quartier qui sont également à l’origine de cette dénomination. Rien dans l’histoire chrétienne d’Orléans ne signale le culte des sept dormants. Tandis qu’il est certain que dans la religion musulmane il tient une très grande place. La 18e sourate du Coran fait obligation aux musulmans de rappeler l’histoire des sept enfants d’Éphèse à la prière du vendredi ».
Il apparaît donc que dans trois sources différentes, l’hypothèse se confirme.
Bonne journée.