Quelle est la vraie histoire de la Gorgone Méduse ?
Question d'origine :
Bonjour !
J'aurais aimé connaitre la vraie histoire de la Gorgone Méduse. J'ai de vagues souvenirs de sa rencontre avec Persée, mais qu'elle était sa vie avant ? Est elle née comme ça ?
Merci !
Réponse du Guichet
Méduse, créature hideuse, pétrifiant ceux qui osent la regarder en face est une des trois Gorgones évoquées dans la mythologie grecque. Bien que, les différents récits qui ont été faits du mythe ainsi que l'histoire de l'art, nous donnent à voir, un monstre à la tête entourée de serpents évoquant la laideur et la mort, Méduse fut une femme d'une beauté fascinante avant d'être métamorphosée par la déesse Athéna.
Bonjour,
tout d'abord, revenons succinctement sur le mythe de Persée et la gorgone Méduse par le biais de cet extrait de la revue Recherches en psychanalyse et intitulé "le regard médusé" :
Méduse, rappelons-le, est une Gorgone. Elle et ses deux sœurs sont des êtres monstrueux. Leurs cheveux hérissés de serpents sont funestes aux mortels, et leurs yeux dilatés, comme des ocelles, paralysent et changent en pierre ceux qui les regardent. Si deux d’entre elles sont immortelles, Méduse, elle, est mortelle. Les différents récits relatifs aux Gorgones font valoir que Polydecte, roi de Sériphos, l’île sur laquelle avaient échoué Danaé et son fils, Persée, poursuit celle-ci de son désir. Pour se débarrasser du fils trop vigilant, Polydecte encourage ce dernier à aller couper la tête de Méduse. Persée, qui n’est autre qu’un demi-dieu puisqu’il est le fils de Zeus, est aidé d’Hermès qui lui donne des sandales ailées, et d’Hadès qui lui confie un masque d’acier rendant invisible, ainsi que d’Athéna qui lui donne un bouclier en bronze poli faisant miroir. Persée, après un long périple trouve alors les Gorgones endormies dans une caverne, capte l’image mortelle des monstres à l’aide de son bouclier, décapite Méduse sans la regarder et range sa tête dans un sac. Quand il la sort devant Polydecte, celui-ci se change en pierre ainsi que tous les membres de sa suite.
N'oublions pas de préciser qu'Athéna utilisera la tête de Méduse, placée sur son bouclier ou son égide pour pétrifier ses ennemi.e.s.
A présent, voici ce que nous dit Pierre Grimal, sur l'histoire de notre Méduse, dans son célèbre dictionnaire de la mythologie grecque et romaine à l'entrée "Gorgone" :
"Il y avait trois gorgones, appelées Sthéno, Euralyé et Méduse, toutes trois filles de deux divinités marines, Phorcys et Céto. Seule la dernière, Meduse, était mortelle. Ces trois monstres habitaient dans l’extrême occident, non loin du pays des morts.
Leur tête étaient entourée de serpents, elles avaient de grosses défenses pareilles à celles des sangliers, des mains de bronze, et des ailes d'or leur permettait de voler. Leurs yeux étaient étincelants, et leur regard si pénétrant que quiconque le voyait était changé en pierre. Elles étaient objet d’épouvante....
La légende de Méduse subit une évolution depuis ses origines jusqu'à l’époque hellénistique. D'abord, la gorgone est un monstre, l'une des divinités primordiales, appartenant à la génération pré-olympiennes. Puis on vint à la considérer, comme la victime d'une métamorphose, et l'on reconnaît que Gorgo avait d'abord été une belle jeune fille, qui avait osé rivaliser de beauté avec la déesse Athéna. Elle était fière, surtout de la beauté de sa chevelure. Aussi pour la punir, Athéna, changea t'elle ses cheveux en autant de serpents. L'on raconte encore que la colère d’Athéna s'abattit sur la jeune fille parce que Poséidon l'avait violée dans un temple consacrée à la déesse. Méduse porta la punition de ce sacrilège.
Diodore nous a conservé une interprétation evhémeriste de la légende des gorgones. Les Gorgones, dit-il, formaient un peuple belliqueux et comparables aux Amazones.
Les versions les plus reconnues du mythe corroborent l'histoire d'une Méduse qui avant d'être un monstre hideux fut d'une beauté fascinante...
chez Ovide (43 av J.C.- 17 ap J.C.) dans Les Métamorphoses au livre IV :
Ce que vous me demandez mérite d’être raconté ; apprenez-en la cause. Célèbre par sa beauté, Méduse fut l’objet des vœux de mille prétendants, et la cause de leur rivalité jalouse ; parmi tous ses attraits, ce qui charmait surtout les regards, c’était sa chevelure ; j’ai connu des personnes qui m’ont assuré l’avoir vue. Le souverain des mers profana, dit-on, sa beauté dans un temple de Minerve. La fille de Jupiter détourna les yeux, couvrit de l’égide son chaste visage, et, pour ne pas laisser cet attentat impuni, elle changea les cheveux de la Gorgone en d’horribles serpents ; maintenant même, afin de frapper ses ennemis d’épouvante et d’horreur, elle porte sur l’égide qui couvre son sein les serpents qu’elle fit naître ».
(source en ligne : Ovide, Les Métamorphoses, texte établi par Désiré Nisard, Firmin-Didot, 1850)
ainsi que chez Apollodore (récit du IIeme siecle ap J.C.) au livre II, 4,3. :
Hermès rendit ces objets aux Nymphes, alors qu'Athéna fixa la tête de la Gorgone au centre de son bouclier. Il y en a certains qui disent que ce fut Athéna qui décapita Méduse, car la Gorgone avait osé rivaliser de beauté avec la déesse.
Le verbe "méduser" qui apparaît en 1606 signifie " frapper de stupeur " mais aussi " fasciner"..
Paul Diel (1893-1972) dans son ouvrage, "Le symbolisme dans la mythologie grecque" nous donne son interprétation du mythe :
"d'une laideur effrayante, Méduse, d'après une autre version, est magiquement séduisante. C'est la vanité qui est séduisante, et la culpabilité qui est effrayante." (p113 et suivantes)
Nous vous conseillons de vous reporter à l'article wikipedia sur "Méduse" très développé, entre autres, sur l' l’interprétation psychanalytique de Freud ou celle plus féministe d'Hélène Cixous :
"c’est avec l’analyse d’un mythe et la médiation d’une représentation visuelle que Freud dans un court texte écrit en 1922 : « La tête de Méduse » va appréhender sa théorie de la castration. Le mythe de Méduse fait partie du mythe de Persée qui raconte comment avec l’aide des dieux un héros ose affronter le regard mortel de Méduse – celle qui des trois Gorgones est mortelle – et comment il parvient en décapitant le monstre à conquérir la face de terreur."
"Dans un essai aux allures de manifeste intitulé « Le rire de la Méduse » (1975), Hélène Cixous développe l'opposition entre la raison masculine et le corps féminin, représenté par Méduse et sauvagement réprimé. Prenant le mythe à contre-pied (« Méduse n'est pas mortelle : elle est belle et elle rit »), Cixous ironise sur les théories freudiennes et refuse la métaphore de la femme vue comme « un continent noir » qu'il faudrait cartographier et coloniser, plaidant en faveur du désir et de la libération des femmes à l'égard du discours masculin."
Pour aller plus loin, vous pouvez également consulter les nombreuses références disponibles dans nos collections sur la mythologie grecque.
Bonnes lectures.
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