Le cheval fait-il partie de la mythologie arabe préislamique ?
Question d'origine :
bonjour cher guichet du savoir, pouvez-vous me dire si le cheval fait partie de la mythologie arabe préislamique ? ou serait-il, à l'exemple de pégaze, un emprunt grec ? merci
Réponse du Guichet
Il existe très peu d’éléments qui permettent de dire que le cheval faisait partie des panthéons préislamiques, sur lesquels les connaissances sont de toute façon partielles. Vraisemblablement, l’animal ne servait pas – ou très peu - à représenter la divinité dans ces régions avant le VIIe siècle
Rappelons tout d’abord que le monde arabe préislamique court sur une très longue période, durant laquelle les formes de la religiosité varient grandement. Dans son Arabie saoudite, l’incontournable, Jacques-Jocelyn Paul signale en effet que « la Péninsule Arabique est passée, progressivement […] du polythéisme païen aux trois monothéismes [avec] l’apparition entre ces deux bornes opposées de quelques hénotéïsmes et monolâtries intermédiaires ». De même, la Péninsule n’est pas une zone religieusement unifiée. On parle d’un «maelström de croyances polythéistes» et de croyances différentes «selon leurs localisations».
Dans ce contexte pluriel, qu'en est-il du cheval ?
Les actes du colloque du Collège de France intitulé Dieux et déesses d’Arabie « mettent en évidence que, dans l’Arabie préislamique, il existait une forte réticence à représenter la divinité sous forme humaine ou animale. Cette réticence, qui remonte à la plus haute Antiquité, semble d’ailleurs partagée par plusieurs peuples du Levant ».
On pourrait faire l’hypothèse, en s’appuyant sur l’article de Christian Julien Robin et Sabina Antonini de Maigret, Le cheval dans l’Arabie méridionale antique (notamment le Yemen), que sa quasi absence dans les religions arabiques s’expliquerait par la quasi absence… du cheval lui-même sur ces territoires et ce, durant une longue période. Les auteurs constatent en effet la « rareté du cheval en Arabie méridionale, plus grande qu’on ne le pensait, jusque vers la fin de l’Antiquité ». Son « introduction a dû s’étaler sur une longue période, avec des échecs suivis de nouvelles tentatives ». Vous trouverez toutefois plusieurs représentations de chevaux en annexes de cet article, mais dont le rapport aux cultes est sans doute inexistant ou lointain.
En parcourant Légendaire cheval. Mythes, folklores et traditions, d’Hélène Dubois-Aubin, très complet, nous n’avons trouvé aucune représentation ou propos précis sur le cheval en Arabie préislamique. Les seules occurrences dont nous pouvons vous faire part à ce stade sont les suivantes :
Jacques Rickmans, spécialiste de l’Arabie ancienne, signale dans son article sur le panthéon de l’Arabie du sud préislamique, le culte rendu à une déesse solaire. A ce propos, il explique : « D’autres aspects de la déesse solaire se cachent peut-être sous certains épithètes féminins […] mais il est difficile d’en décider sauf pour dhât-Ba’dân épithète qu'on a traduite « celle d'éloignement », d'après la racine arabe, en y voyant —hypothèse peu plausible— une allusion à l’ "éloignement" du soleil d'hiver. Son caractère "solaire" se déduit plutôt du fait qu'on lui offrait des statuettes votives de chevaux : cet animal est associé, dans tout le monde méditerranéen, au culte solaire ».
Toujours dans Arabie saoudite, l’incontournable, l’auteur évoque la religion des Sabéens (au Yémen actuel). « Parmi les dieux locaux existait Ta’lah, le bouquetin, qui rendait ses oracles à Riyâm, le sacré s’étendant parfois aux animaux, comme le faucon, le taureau, le cheval ».
Pour approfondir vos recherches à ce sujet, nous vous conseillons d’adresser votre question à la bibliothèque de la Maison de l’Orient et de la Méditerranée, spécialisée sur les civilisations du Proche-Orient ou à la bibliothèque de L’institut du Monde arabe, à Paris.
Bonnes recherches et bonnes lectures !