Comment était organisé le culte d'Athéna en Grèce ?
Question d'origine :
Bonjour,
Je me pose des questions sur le culte d’Athéna. J'aurais aimé savoir comment il était organisé, si c'était dans des temples, et dans quels lieux en Grèce. Aussi, si il y avait des prêtresses, comme pour d'autres cultes.
Je vous remercie !
Réponse du Guichet
Dans le polythéisme grec, le culte d'Athéna tient une place très importante. Déesse tutélaire de la cité d'Athènes, sa statue d'or et d'ivoire érigée par Phidias occupe au Parthénon, sur l'Acropole, une salle conçue spécialement pour l'accueillir.
Fille de Zeus, Athéna fait partie des douze grands Olimpiens. Elle était la déesse de la guerre, mais aussi de plusieurs professions et arts. Athéna était la patronne des villes et avait des temples dans la plupart des grandes cités grecques, c'est une déesse panhellénique. La chouette, symbole de la sagesse, était son animal favori. Elle portait des surnoms différents selon les valeurs qu'elle incarnait (Promachos - la combattante, Niké - la victorieuse, Parthenos, etc.).
Dans la naissance très particulière d’Athéna, «déesse sans mère», mise au monde par Zeus, à qui Héphaïstos a fendu le crâne avec une hache pour le soulager d’une migraine annonçant la venue au monde d’Athéna, rencontre le rêve grec et en particulier athénien, d’exclure les femmes de la reproduction (selon Louise Bruit Zajdman et Pauline Schmitt Pantel, « La religion grecque. Dans les cités à l’époque classique », Armand Colin, 2017).
Avant de présenter les principaux éléments du culte d’Athéna, il faut savoir que pour les Grecs, les dieux n’étaient pas extérieurs au monde, ils n’étaient pas non plus les créateurs de l’univers ni des hommes; ils n’ont pas toujours existé, mais ils se sont simplement emparés du pouvoir. Ils ne possédaient tout de même ni tous les pouvoirs ni tous les savoirs, mais seulement certains d’entre eux. N’étant pas éternels, mais seulement immortels, ils étaient soumis au destin. En revanche, ils interviennent constamment dans les affaires humaines.
Les rituels pratiqués par les anciens Grecs forment un ensemble complexe de pratiques répondant à diverses finalités. Elles sont essentiellement motivées par l'entretien de la relation d'échanges avec le monde divin. Ils ont en général lieu dans des sanctuaires, espaces sacrés où se trouvent les éléments essentiels à la conduite du culte, en premier lieu l'autel sacrificiel.
Les principaux gestes sacrés, et l'offrande du sacrifice en particulier, n'exigent pas d'intermédiaires. Tout citoyen peut, dans l'intimité de son foyer ou dans un temple, pratiquer les gestes de piété. En dehors de la pratique privée, certains citoyens assument des charges religieuses déléguées par la cité.
Dans la Grèce antique, le sacerdoce fonctionne comme une magistrature de la cité, la prêtrise étant une fonction souvent parallèle à l’autorité législative, financière ou militaire. Dans la plupart des cas, ce sont des sacerdoces annuels, tirés au sort, à l’image des magistratures. Les sacerdoces s’achèvent avec la reddition des comptes, comme à Athènes pour le culte d’Athéna Soteria (la déesse du salut).
Les sacerdoces sont ouverts à tous les citoyens, mais fermés aux métèques et aux étrangers ainsi qu’aux personnes handicapées.
Dans le monde grec, il existe aussi des sacerdoces liés à des familles (genê en grec) particulières. Les prêtres qui les exercent sont désignés, parfois à vie, parmi les membres de ces familles selon des règles strictes. Ce sont les Etéoboutades, une des plus vieilles familles d'Athènes, qui fournissent les prêtres pour le culte d’Athéna Polias (protectrice de la cité).
Chez Homère, les prêtres n’ont pas de rôle sacrificateur, ils portent plutôt la fonction sacerdotale auprès d’un dieu. Ils l’assument toujours à l’époque classique, à côté des sacrificateurs qui exercent à demeure dans les grands temples. Le prêtre assure aussi le service intérieur du sanctuaire, comme l’entretien de la statue de culte, représentant le dieu dans sa demeure, mais aussi l’entretien des bâtiments ainsi qu’une activité administrative en ce qui concerne le fonctionnement du temple, liée à une gestion financière, comme le contrôle des revenus et des dépenses.
Le temps de leurs mandats, les prêtres sont les gardiens des lois sacrées, assurant la transmission de la tradition.
La vie quotidienne et politique à Athènes est rythmée par les fêtes en l’honneur des dieux. Ce sont les calendriers sacrés qui en fixent le rythme dans les nombreuses cités grecques. Ils s’apparentent à de véritables listes de fêtes prévues pour tous les mois de l’année. Dans le calendrier Athénien, certaines fêtes se déroulent chaque mois, et notamment la fête de la naissance d'Athéna est célébrée le 3e jour de chaque mois lunaire, le premier jour étant Nouménia, le nouveau jour de la lune, l'occasion d’organiser un grand marché ou un grand banquet, le 2e jour étant consacré à l’agathos daimon, le bon génie.
Un grand moment festif consacré à Athéna, les Panathénées, était une fête ayant lieu tous les ans, le 28 du mois d’hécatombéon (correspondant à la deuxième moitié de juillet). Tous les 4 ans, avaient lieu les Grandes Panathénées. Comme pour plusieurs autres célébrations, une procession marquait le premier temps de ces festivités. Elle avait pour point de départ les portes du Dipylon, et passant par l’Agora, elle arrivait à l’Acropole par les Propylées et longeait le Parthénon pour arriver du côté Est du temple d'Athéna devant l’autel de la déesse. La procession ne s’écartait donc pas des points les plus importants de la ville, aussi bien des lieux à signification politique comme l’Agora ou marquant le respect des morts à travers le passage au cimetière (quartier du Céramique). A partir d’une frise sculptée qui recouvrait le haut du mur du Parthénon, représentant certaines séquences de cette procession, l’historien a la possibilité de reconstituer les classes sociales participantes: les citoyens athéniens: des hommes jeunes et plus âgés, des filles de citoyens, des métèques, leurs fils soulevant des plateaux d’offrandes et leurs filles portant des jarres d’eau. Il est possible que des habitants non-libres de l’Attique rejoignaient la procession, de même que des étrangers venus des cités alliées. On conduisait aussi du bétail pour les sacrifices.
La procession portait le péplos (tunique tissée par les femmes d'Athènes appelées les Ergastines), à l’archonte-roi (principal dignitaire religieux de l'Etat. Il dirigeait en particulier les sacrifices des cultes hérités des ancêtres, dont l'ancienneté est attestée par la religion) qui devait, à son tour, en parer la statue de bois d’Athéna dans l’Erechtheion. Ce rituel très solennel véhiculait un message politique: celui de l'organisation hiérarchique de la cité, mais aussi de l'unité dans la diversité de sa population. A travers le spectacle de la procession, il était diffusé aussi bien auprès du peuple athénien que communiqué aux cités alliées et, plus largement, à toutes les polis du monde grec. L’image d’unité et de la puissance athéniennes imprégnait ainsi l’ensemble de l'espace public hellénique.
Illustration ci-dessous (BnF) :
Le temple grec n'est pas un lieu de culte qui accueille les fidèles, mais la maison du dieu auquel il est consacré. Dans le Parthénon, une pièce fermée au centre des colonnes abrite la gigantesque statue d'or et d'ivoire d'Athéna, déesse de la sagesse, des arts et de la guerre, car elle est la protectrice de la ville qui lui doit son nom.
La légende veut qu'Athéna et Poséidon, dieu de la mer, se soient disputé la ville d'Athènes. Celui qui offrirait à la ville le don le plus utile gagnerait. Poséidon fait jaillir une source salée à l'endroit de l'Acropole, ou dans certaines versions donne vie à un cheval invincible au combat. Athéna, quant à elle, fait naître le premier olivier, arbre nourricier mais aussi symbole de paix. C'est elle qui l'emporte.
Pour aller plus loin :
D'une Athéna à l'autre. L'emploi du nom "Pallas" dans les sources athéniennes du VIe au IVe siècle avant J-C. d'Audrey Vasselin et un autre sur les origines de la déesse ;
Dieux et hommes de l'Antiquité VIIIe siècle av. J-C - Ve siècle après J-C, sous la dir. de Sophie Malick-Prunier et Stéphanie Wyler, Les Belles lettres, 2011;
Mythe et religion en Grèce ancienne de Jean-Pierre Vernant, éd. du Seuil, 2014 ;
L'univers, les dieux, les hommes. Récits grecs des origines du même auteur, éd. du Seuil, 2014.