Où trouver des pièces de théâtre écrites en langue non binaire ?
Question d'origine :
Bonjour,
Je chercher des pièces de théâtre qui auraient été écrites en langage non binaire, en "iel" etc.
Est-ce que ça existe?
Merci d'avance.
Réponse du Guichet
Il semble que l'offre de pièces grammaticalement non genrées soit encore très mince. Voici quelques pistes.
Bonjour,
Nous avons trouvé peu de textes de théâtre francophone travaillant sur le langage non binaire. Les recherches "binaire", "iel" ou encore "inclusive" ne donnent de résultats probants ni sur notre catalogue ni dans la base Mascarille.
L'auteure Samaele Steiner, que nous remercions chaleureusement, nous a cependant donné quelques pistes :
Pour un temps soit peu [Livre] Transe / Laurène Marx - dont vous pouvez découvrir un extrait en lecture-visioconférence sur Vimeo.
Les Rats quittent le navire / Anette Gillard, dont un extrait est visible sur YouTube, avec des interviews de l'auteure et du metteur en scène Sacha Vilmar.
Les oeuvres de Pauline Peyrade et de Guillaume Cayet, ainsi que deux textes encore inédits d'Agathe Charnet, Nuit de juin et Ceci est mon corps.
Autant d'oeuvres qui interrogent à leur manière les rapports au genre et à la langue, même si nous ne pouvons certifier qu'elle se servent précisément de la langue inclusive, faute d'avoir pu les consulter.
Au Québec, Marie-Ève Milot et Marie-Claude St-Laurent, fondatrices du Théâtre de l’Affamée, s'attachent actuellement à dégenrer la langue dans leurs créations, comme le rapporte un article du journal Le Devoir :
Dans leurs plus récentes créations, Chienne(s) en 2018 et Guérilla de l’ordinaire à l’affiche présentement au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, on peut constater leur prise de position linguistique tant dans l’écriture du texte que dans la mise en scène. Les personnages principaux de ces deux pièces sont entourés de rôles secondaires dégenrés. Par exemple, le rôle du patron dans Chienne(s) était joué à la fois par Larissa Corriveau et Richard Fréchette.
Cette singularité est toutefois le résultat d’un long processus créatif qui commence dès l’écriture, avec l’utilisation du point milieu. Une utilisation de l’écriture épicène qu’elles poussent à son paroxysme puisque, lors des répétitions, les comédiennes et comédiens peuvent incarner les mêmes protagonistes, peu importe leur genre. « Je trouve que ça ne confine pas les interprètes dans des rôles stéréotypés, déclare Marie-Ève Milot. On déjoue la représentativité de cette manière. Il y a aussi un travail qui devient plus collectif. Nous obtenons une espèce de kaléidoscope des visions de chacun sur un même personnage. »
Le débat entourant l’écriture inclusive connaît encore de nombreux rebondissements, à l’image de la décision récente de l’Académie française. Au Québec, l’Office québécois de la langue française (OQLF) recommandait la féminisation dès 1979. Mais dans la réalité du théâtre, les créatrices font elles-mêmes face à certaines réticences. « Je pense que les gens ont peur que ça alourdisse le texte et le jeu, et c’est vrai que c’est une barrière à franchir, affirme , auteure des Barbelés (2018), qui mettait en scène Marie-Ève Milot dans un monologue non genré. Je pense que ça peut vraiment être un tremplin pour la dramaturgie plutôt qu’un frein. »
Au théâtre, la langue étant parlée, il y a la possibilité de jouer avec les codes de l’écriture inclusive puisque rien n’est encore figé et que la pratique doit encore être théorisée. « On peut rendre cette inclusivité poétique, belle, drôle, et même dérangeante si on veut, précise-t-elle. La musicalité des mots nous habite beaucoup depuis les premières pièces qu’on a écrites. »
On peut également citer Kae (anciennement Kate) Tempest, poète et dramaturge britannique, et notamment son dernier recueil de textes Etreins-toi [Livre] = [Hold your own] :
Un jeune garçon, baskets aux pieds et écouteurs sur les oreilles, se promène en forêt. D’un coup de bâton, il délace l’union de deux serpents. Il est aussitôt transformé en femme. Ainsi débute son errance sublime d’être en être, se délestant de sa peau pour une renaissance à soi. Entre influences mythologiques et rythmes hérités du hip-hop, Kae Tempest déploie une traversée de l’être humain dans ce poème inspiré de la vie de Tirésias. Un conte contemporain, sensuel et hypnotique, sur les sentiers des forêts antiques, où se rencontrent des êtres riches d’une sensualité non normée. Un hymne à l’amour.
(Source : Arche éditeur)
Votre quête de théâtre non genré semble en tout cas une problématique partagée dans le monde anglo-saxon, puique des sites tels que Non binary monologues, NYC playwrights ou New play exchange s'efforcent de rassembler des scènes de théâtre accessibles aux personnes non-binaires.
Pour compléter notre recherche, nous contactons
En attendant vous pouvez découvrir sur notre blog L'Influx la sélection de pièces pour enfants et adolescents abordant la question du genre concoctée par nos collègues du fonds Arts vivants (médiathèque de Vaise).
Pour aller plus loin :
Complément(s) de réponse
Bonjour,
Nos collègues du fonds Arts vivants nous signalent particulièrement la pièce de Guillaume Cayet, déjà cité, Neuf mouvements pour une cavale, en écriture inclusive.
Par ailleurs une note du blog Je suis féministe revient sur la distinction entre "inclusif" et "non binaire" :
« L’écriture inclusive et non binaire, c’est la même affaire. Pourtant, ce sont deux types d’écritures avec des enjeux et des conjugaisons totalement différentes. L’écriture inclusive le dit, elle veut inclure toutes les identités de genres dans ses conjugaisons et refuse d’utiliser le masculin comme universel. L’écriture non binaire sert à genrer exclusivement les personnes non binaires. Dire que l’écriture inclusive est non binaire ou vice versa, c’est invisibiliser la langue des personnes non binaires et leur refuser une visibilité spécifique qui leur est propre. De la même façon, les revendications pour la féminisation des noms de métiers et autres mots servent à révéler l’existence spécifique des femmes (et du spectre des genres reliés au féminin) dans la langue et le monde. À noter qu’il existe plusieurs manières différentes de conjuguer et de nommer les personnes non binaires. La meilleure manière de le savoir est de demander poliment à la personne quels sont ses pronoms préférés et comment iel préfère être conjugué-e »
Bonne journée.
DANS NOS COLLECTIONS :
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