Quel était le statut des femmes au sein des tribus gauloises ?
Question d'origine :
Bonjour,
Je m'interroge sur le statut des femmes au sein des tribus gauloises, avant la conquête romaine.
Les Gaulois pratiquaient-ils la polygamie ou la monogamie ? Leurs femmes et leurs filles pouvaient-elles prétendre à l'éducation et jouer un rôle dans la vie politique ? Je sais que les sources d'informations sont rares, faute d'écriture...
Merci par avance.Et bien cordialement.
Eveline
Réponse du Guichet
Nous avons peu de sources sur la place des femmes dans la société gauloise avant la conquête romaine. Des archéologues comme Jean-Louis Brunaux parviennent cependant à esquisser le portrait de la Gauloise en pilier économique de la famille, jouissant d'une relative autonomie patrimoniale.
Bonjour,
Il est certain que les sources sont plus conséquentes pour la période de la Gaule romaine. Néanmoins, certains ouvrages abordent la question de la place des femmes dans la société gauloise avant la conquête. Souvent de manière très rapide il est vrai…
Voici par exemple ce que nous dit Jean-Louis Brunaux concernant le statut des Gauloises, avant et pendant la conquête romaine :
«La femme, nous le savons par César, avait un statut remarquable dans la société gauloise qui se traduisait notamment par une étonnante autonomie patrimoniale et financière. Cette place, elle l’occupait au moins depuis le premier Age de Fer où elle s’était exprimée dans la plus haute sphère sociale, celle des dynasties princières. […]» Les religions gauloises, Jean-Louis Brunaux, CNRS Editions, 2016
Dans l’ouvrage Voyage en Gaule, Jean-Louis Brunaux encore, fait dialoguer deux personnages, un archéologue et Posidonios d’Apamée. Ce philosophe, géographe et historien grec est l’auteur d’un travail remarquable sur le territoire gaulois, et qui porte en partie sur la période précédant la conquête romaine de la Gaule. Voici ce que les deux hommes nous disent concernant la vie et le rôle des femmes gauloises : «Bien sûr, elles n’ont aucun droit politique et ne participent pas plus aux assemblées et aux banquets qu’à la plupart des cérémonies religieuses. Mais il est certain qu’elles ont leur place dans la vie politique. […] Dans les temps anciens, ceux de la fondation de Massilia, et au cours des quelques siècles qui suivirent, les hommes nobles passaient la plus grande partie de leur temps dans les activités guerrières […]. Ce sont donc leurs femmes qui [...] sont devenues les véritables maîtresses des grands domaines. Pour qu’elles puissent mener à bien leur tâche et faire fructifier le cheptel, les terres, et les avoirs financiers, il fallait qu’elles y trouvent un intérêt.» Voyage en Gaule, Jean-Louis Brunaux, Editions du Seuil, 2011
Jean-Louis Brunaux toujours, consacre un chapitre de son ouvrage Les Gaulois, vérités et légendes au statut des femmes gauloises dans la société. Nous vous recommandons sa lecture. C’est l’ouvrage dans lequel nous avons recensé le plus d’informations. S’il souligne la difficulté de l’archéologie à s’exprimer sur des sujets de société d’une part, et la variabilité et la pauvreté des sources historiques de l’autre, il esquisse tout de même un portrait des Gauloises. Il souligne bien sûr le rôle de gestionnaires que les femmes des classes possédantes gauloises ont tenu, pour les intérêts économiques des familles. L’homme est ainsi redevable à son épouse d’assurer son train de vie, car en dehors des périodes de guerres, son temps à lui est occupé par la chasse ou encore les banquets. La place économique des Gauloises se mesure également après analyse du contrat de mariage qui prévaut alors : si l’un ou l’autre des époux se retrouve veuf, le survivant perçoit une certaine somme, quel que soit son sexe. Et l’époux apporte à la communauté au moment du mariage la même valeur que la dot de l’épouse. Enfin, les Gauloises peuvent être amenées à jouer le rôle d’arbitre dans les conseils entre Gaulois et alliés, parfois même un rôle de juge dans les affaires guerrières. Les Gaulois : vérités et légendes, Jean-Louis Brunaux, Perrin, 2018
Jean Markale, conteur et écrivain, a écrit un ouvrage sur l’Amour et [la] sexualité chez les Celtes. Si l’auteur a été largement critiqué pour la qualité scientifique de ses textes par une partie des universitaires français, l’ouvrage a le mérite de présenter une vision des relations amoureuses en pays celte. On y lit que la femme gauloise a en théorie toute latitude pour choisir un époux, et qu’un mariage sans consentement ne saurait avoir lieu. Un court développement rapporte les faits déjà évoqués, c’est-à-dire un équilibre dans l’apport à la communauté lors du mariage, et le même équilibre au moment d’un veuvage. Amour et sexualité chez les Celtes, Jean Markale, Ed. du Relié, 2005
Enfin, un article est disponible en ligne sur la base Persée Affinités, parentés et territoires en Gaule indépendante : fragments d'anthropologie de Serge Lewuillon, dans Dialogues d'histoire ancienne, 1990, 16-1 pp. 283-358. Dans la partie II de cet article, intitulée Prohibition et prescription, l’auteur aborde la question de la polygamie chez les gaulois. Il y évoque une forme de polygamie réciproque, tout en restant prudent sur la fréquence et les formes que cette polygamie peut prendre.
Bonnes lectures !