Quel est le moindre mal entre la peste et le choléra ?
Question d'origine :
Bonjour, d'un point de vue purement scientifique/médicale, quel est le moindre mal entre la peste et le choléra ? Merci.
Réponse du Guichet
Ces deux maladies, contagieuses et mortelles, sont très différentes par leurs moyens de contamination et leurs symptômes. La peste est actuellement moins présente sur le globe que le choléra mais son taux de létalité semble plus élevé.
Bonjour,
Voici ce qu'indique un article du Parisien daté du 21 avril 2022 :
... au premier degré, entre les deux pathologies, pas d'hésitation, il faut choisir le choléra qui est 5 à 33,33 fois moins mortel ! Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), sur 100 personnes qui contractent la peste, 30 à 60 n'y survivront pas pour la forme bubonique, celle qui provoque des pustules énormes. Et « elle est presque toujours mortelle dans sa forme pulmonaire en l'absence de traitement », lit-on sur le site.
La maladie est fatale et foudroyante : après l'apparition des symptômes, les malades meurent en 24 à 48 heures. Quand le choléra enregistre, lui, un taux de létalité « de 1,8 %, en 2016, mais a dépassé les 6 % parmi les groupes vulnérables », indique l'Institut Pasteur - sur 100 malades 1,8 meurent.
Comparer ce qui n'est pas comparable
Pas de panique, de nos jours, si la peste continue de circuler chez certains animaux, les cas humains sont très rares - dans les dernières décennies, il y a eu des épidémies en République démocratique du Congo, au Pérou et à Madagascar où des formes à bubons sont signalées tous les ans. Et surtout des traitements antibiotiques peuvent en venir à bout.
Pourquoi donc l'expression passée dans le langage courant compare ce qui n'est pas comparable ? Réponse du dictionnaire historique de la langue française : « La gravité du choléra, maladie épidémique souvent mortelle, a fait mettre le mot au rang de peste, lui conférant la même valeur symbolique. » Le mot « peste » n'est donc pas à prendre au premier degré mais dans son acception plus ancienne de maladie grave. « Elle résulte en fait d'une méconnaissance ancienne liée à un manque de recul, commente la linguiste Aurore Vincenti. On oublie que la science évolue. La langue, les expressions traduisent souvent une sagesse populaire et non une connaissance scientifique. Ça a l'air d'être le cas ici. »
Dans l'équipe du Petit Robert, on fait remonter l'expression au moins au début du siècle dernier, puisqu'on en trouve la trace « dans le compte rendu d'une séance de la Chambre des députés du 30 mai 1912 », à un moment où une épidémie faisait rage en Russie comme dans l'empire Ottoman.
source : Entre la peste et le choléra, c’est facile de choisir / Emilie Torgemen
Voici ce qu'indique le site de l'OMS à propos du choléra :
Le choléra est une maladie diarrhéique aiguë, dont on peut mourir en quelques heures en l’absence de traitement.
- Selon les estimations, il y a chaque année 1,3 à 4 millions de cas de choléra, et 21 000 à 143 000 décès dus à la maladie dans le monde.
- La plupart des personnes infectées ne manifestent aucun symptôme ou des symptômes bénins, et peuvent être traitées avec succès au moyen de sels de réhydratation orale.
- Dans les cas sévères, un traitement rapide par perfusion de liquide et d’antibiotiques par voie intraveineuse s’impose.
- Les vaccins anticholériques par voie orale sont un moyen complémentaire de lutte, mais ne doivent pas remplacer les mesures classiques.
- Des vaccins anticholériques sûrs administrés par voie orale doivent être utilises conjointement à l’amélioration de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement pour limiter les flambées de choléra et favoriser la prévention dans les zones connues pour être à haut risque.
- Une stratégie mondiale de lutte a été lancée en 2017 avec pour cible diminuer de 90% des décès dus au choléra.
Traitement
Le choléra est une maladie facile à traiter. On peut guérir la majorité des sujets atteints en leur administrant rapidement des sels de réhydratation orale (SRO). Le sachet standard de SRO OMS/UNICEF est à dissoudre dans 1 litre (l) d’eau potable. Jusqu’à 6 litres de SRO peuvent être nécessaires pour traiter une déshydratation modérée chez un patient adulte le premier jour.
Les patients gravement déshydratés présentent un risque de choc et l’administration rapide de liquide par voie intraveineuse s’impose. Ces patients reçoivent également des antibiotiques adaptés pour raccourcir la durée de la diarrhée, diminuer les quantités de liquide de réhydratation nécessaires et écourter la durée de l’excrétion des bacilles de V. cholerae dans leurs selles.
On ne recommande pas l’administration de masse d’antibiotiques, car elle n’a aucun effet avéré sur la propagation de la maladie et pourrait favoriser la résistance aux antimicrobiens.
L’accès rapide au traitement est essentiel lors d’une flambée de choléra. La réhydratation orale doit être disponible dans les communautés et pas uniquement dans des centres de soins plus importants qui pourront à tout moment proposer des perfusions intraveineuses et une prise en charge. Avec une prise en charge rapide et adaptée, le taux de létalité devrait se maintenir en dessous de 1 %.
Le zinc est un important traitement d’appoint chez l’enfant de moins de 5 ans. Il réduit aussi la durée d’une diarrhée et peut prévenir des épisodes ultérieurs de diarrhée aqueuse aiguë due à d’autres causes.
Voir aussi le site de l'Institut Pasteur : choléra
Voici ce qu'indique l'OMS à propos de la peste :
- La peste est une zoonose bactérienne due à Yersinia pestis, que l’on trouve habituellement chez les petits mammifères et les puces qui les parasitent.
- Les sujets infectés par Y. pestis présentent souvent des symptômes après une période d’incubation de 1 à 7 jours.
- Il existe 2 formes cliniques principales: la peste bubonique et la peste pulmonaire. La première est la plus courante et se caractérise par une tuméfaction douloureuse des ganglions lymphatiques, les «bubons».
- La peste se transmet de l’animal à l’homme par la piqûre de puces infectées, par contact direct avec des tissus infectés et par inhalation de gouttelettes respiratoires infectées.
- La peste peut être très grave chez l’être humain, avec un taux de létalité de 30% à 60% pour la forme bubonique et elle est presque toujours mortelle dans sa forme pulmonaire en l’absence de traitement.
- Le traitement antibiotique étant efficace contre la bactérie responsable de la peste, un diagnostic et un traitement précoces peuvent sauver des vies.
- De 2010 à 2015, on a enregistré 3248 cas de peste dans le monde, dont 584 mortels.
- Les 3 principaux pays d’endémie actuellement sont Madagascar, la République démocratique du Congo et le Pérou.
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Traitement
Comme, en l’absence de traitement, la peste pulmonaire peut entraîner rapidement la mort, la précocité du diagnostic et du traitement est essentielle pour la survie et la limitation des complications. Les antibiotiques et le traitement symptomatique sont efficaces si le diagnostic est posé à temps. En l’absence de traitement, la peste pulmonaire peut être mortelle dans un délai de 18 à 24 heures après l’apparition des symptômes mais les antibiotiques courants efficaces contre les entérobactéries (bacilles Gram négatifs) permettent d’obtenir la guérison s’ils sont administrés précocement.
Voir aussi le site de l'Institut Pasteur : Peste
Lire le document intitulé Maladies infectieuses tropicales aux pages 514 à 521.
Ainsi, comme nous l'indiquions dans cette précédente réponse, Peste ou choléra ?, ces deux maladies, très contagieuses et mortelles, sont toutes deux différentes, de par leurs moyens de contamination et leurs symptômes. La peste est actuellement moins présente sur le globe que le choléra mais son taux de létalité semble plus élevé. Il est important de savoir que, si le diagnostic est posé à temps et que le traitement est rapidement administré, les taux de guérison sont élevés. Diagnostiquées et traitées rapidement, ce sont deux maladies aujourd'hui curables.
Bonne journée.