Question d'origine :
droit coutumier
Réponse du Guichet
Le droit coutumier est un système juridique qui repose sur des règles issues de l'usage, la coutume et la tradition. Mais comment définit-on l'usage, la coutume et la tradition ? L'article de l'Encyclopædia Universalis apporte quelques éléments de réponse.
Bonjour,
Voici les définitions du droit coutumier émanant de plusieurs sources.
Pour le Larousse :
Droit coutumier, ensemble des règles juridiques établies par l'usage, la tradition, la coutume et ayant force de loi, par opposition à droit écrit.
Selon InitiaDROIT, association d’avocats bénévoles, Reconnue d’Utilité Publique, ayant pour mission d’ouvrir le droit aux jeunes :
Définition de la coutume et du système juridique qui en découle : le droit coutumier
La coutume représente une règle de conduite, une habitude suivie par un groupe social donné. La coutume résulte d’un usage plus ou moins prolongé et se transmet de génération en génération.
Le droit coutumier quant à lui, est le droit reposant sur la dite coutume. C’est en effet un ensemble de règles reposant sur la coutume, donc reposant sur l’usage.
Concernant la France, c’est essentiellement le droit de l’époque médiévale qui persistera sous l’Ancien Régime, lorsque la coutume était la principale source du droit.
Les dispositions du droit coutumier, consacrées par l’usage, s’établissaient ainsi dans les rapports entre les individus, les formes de possession ou d’usage des sols, les poids et mesures, les droits féodaux, les droits et attributions des différentes communautés en ce qui concernait la politique, civile et criminelle, le droit des élections et des successions, les droits et obligations concernant le mariage, les eaux et forêts, les procédures judiciaires … Il était aussi à l’origine des lois fondamentales du royaume et du droit des gens.
Le droit coutumier est ainsi un système juridique qui se fonde sur un ensemble de coutumes.
La coutume est une règle de droit qui présente trois caractéristiques :
- Elle est non écrite ;
- l’application de la règle est répétée et constante ;
- la population doit être convaincue du caractère obligatoire de cette règle.
En raison de son caractère très spécial, seuls trois pays (la Mongolie, le Bhoutan et le Sri Lanka) ont le droit coutumier pour système juridique.
L'Encyclopédie Universalis va plus loin en distinguant le droit coutumier comme coutume et le droit coutumier comme droit :
LE DROIT COUTUMIER COMME COUTUME
... la coutume est une règle de conduite suivie par un groupe social et résultant d'un usage plus ou moins prolongé. [...] ; ainsi, c'est une conduite sociale et, davantage, une règle de conduite.
Usage et coutume
L'usage consiste, semble-t-il, en une répétition, c'est-à-dire une pluralité d'actes (comme l'habitude, dont il serait pour certains une espèce, collective). Les juristes médiévaux ont longuement et vivement débattu du nombre des actes requis pour donner corps à la coutume : certains voulaient qu'il y en eût dix, d'autres se contentaient de deux, d'autres encore jugeaient qu'un seul était acceptable, s'il présentait une importance telle qu'il avait pu retenir l'attention de tous. À ce point, et dans la mesure où elle ne porte que sur un élément matériel ou externe de la coutume, envisagé pour lui-même, la question est aussi difficile à trancher que celles qui consistent à se demander combien il faut de grains de blé ou de riz pour former un tas, et combien d'actes pour faire une habitude.
[...]
La coutume et le temps
L'existence d'une règle coutumière donne à penser que le même acte, ou les mêmes actes, se renouvelleront dans le temps. C'est évidemment un problème tout autre, que celui de savoir si le temps est un facteur d'existence de la coutume. La réponse est le plus souvent affirmative, on considère même que l'écoulement d'une certaine durée est une condition essentielle à la formation d'une règle coutumière. En revanche, la détermination de cette durée n'est pas toujours rigoureuse : on demande parfois que la coutume soit immémoriale, ce qui est une exigence sévère et vague (mais qui peut être précisée : le droit anglais ne regarde comme immémoriale qu'une coutume qui existait en 1189) ; ou l'on fixe cette durée à quarante, vingt ou dix ans ; ou encore l'on indique simplement que la durée doit être suffisante pour que l'usage soit certain. La plupart des peuples du Tiers Monde paraissent témoigner sur ce point d'un strict respect de la tradition : on y fait remonter l'origine de la coutume aux ancêtres (de même qu'à l'époque romaine archaïque la coutume était essentiellement le mos maiorum). En réalité, cette conception n'impose pas nécessairement un âge vénérable à la coutume : point n'est besoin qu'elle sorte du fond des âges, puisque le décès peut suffire à transformer un homme en ancêtre. Les derniers défunts, dès lors qu'ils ont, de leur vivant, joué un rôle important dans le groupe social et joui d'une grande renommée, peuvent engendrer une coutume aussi bien que les ancêtres les plus lointains. Il ne faut donc pas s'abuser sur le caractère d'ancienneté : les pays de civilisation dite traditionnelle sont assurément sensibles à cette ancienneté, mais l'on y fonde la coutume moins sur la répétition prolongée de certains comportements que sur le prestige de l'individu qui accomplit, un jour, une action mémorable, et si le héros fondateur appartient souvent, ou le plus souvent, aux temps anciens, on n'en est parfois séparé que par quelques générations.Une autre considération conduit à penser que la vétusté n'est pas de l'essence de la coutume. En effet, on relève – et l'on vante – les caractères de souplesse et de flexibilité de la coutume, par opposition à la rigidité de la loi : le droit coutumier, reflétant l'évolution de la société, serait lui-même en constante évolution. Cette faculté d'adaptation et cette mobilité imputées, non à tort, à la coutume, sont évidemment en contradiction avec l'idée d'une règle traditionnelle, ancestrale : les droits coutumiers africains comportent aujourd'hui, en matière de régimes matrimoniaux notamment, des règles particulières aux machines à coudre et transistors qui ne se rattachent évidemment pas à un très lointain passé... Ainsi, les expressions les plus authentiques et spontanées de la coutume se rapprochent curieusement de ses manifestations les plus techniques, puisque l'on observe que la formation d'une coutume constitutionnelle dans un État moderne peut être d'une rapidité extrême et qu'il peut suffire d'une innovation pour que naisse, instantanément, une règle coutumière. D'ailleurs, ici encore, si le temps – l'histoire ou la légende – faisait seul la coutume, devant quel genre de phénomène se trouverait-on tandis que le temps écoulé est insuffisant ? et la novation, en coutume, de ce quid indéterminé s'étant opérée à un certain moment, comment ferait-on remonter l'origine de cette coutume à la date, plus reculée, où il ne devrait pas s'agir encore de coutume ? À quel titre un ancêtre aurait-il, jadis, adopté le comportement de son prédécesseur immédiat, si le recul seul permettait de regarder ce dernier comme l'instaurateur de la coutume ? Au vrai, ce n'est pas parce que la coutume est ancienne qu'elle est coutume, mais bien parce qu'elle est coutume qu'elle est ancienne : la tradition concerne la vie et non la nature du droit coutumier ; le temps peut témoigner du respect que l'on porte à la coutume, il n'explique pas sa force, ni sa genèse. Ce qui revient à dire que l'élément matériel de la coutume se réduit, sans autre exigence ni qualification, à un comportement social. Mais il est clair que cet élément n'épuise pas la nature de la coutume, il reste à rendre compte du caractère socialement obligatoire, du caractère de règle, de celle-ci.
La règle de conduite
Ce qui fait la coutume, ce n'est pas – dit-on – la simple circonstance qu'une conduite est effectivement tenue, c'est le fait qu'on doive la tenir : la conduite est perçue comme étant obligatoire par les membres du groupe.
[...]
LE DROIT COUTUMIER COMME DROIT
Dans les sociétés modernes où existe, théoriquement du moins, une séparation tranchée entre le juridique d'une part, et le social non juridique, d'autre part, le droit coutumier devrait, semble-t-il, pouvoir se reconnaître à la matière qu'il régit. [...] dans les sociétés traditionnelles où règne une indistinction parfois totale entre les différents secteurs de la vie sociale, les coutumes y sont alors, à la fois, usages sociaux, règles morales, impératifs religieux et normes juridiques ; il est cependant évident que, pour les intéressés, elles constituent un ensemble homogène et indissociable, de qualification incertaine.
[...]
Détermination de la coutume
... il apparaît que, dans tous les types de sociétés, un problème identique se pose, celui de la détermination de la règle de droit coutumier dont le respect doit être assuré, ou la violation sanctionnée. [...] Dans les sociétés traditionnelles, les essais de conciliation que tente le chef, ou le sorcier, ou le groupe des anciens, ou l'assemblée du peuple montrent assez que la règle de droit coutumier n'est pas une donnée antérieure et fixe à laquelle il conviendrait, et il suffirait, de se référer, mais qu'il faut que l'accord se fasse sur elle, d'après une opinion moyenne de ce qu'elle est. C'est-à-dire qu'il faut la recréer en chacune des occasions qui appellent son application, et l'on désigne parfois les assemblées où il est fait état de la coutume d'un mot qui signifie à la fois faire et dire le droit (cf. Henri Lavondes). [...]
Dans les sociétés modernes, la coutume est parfois rédigée. Il arrive que la rédaction soit un moyen d'éliminer les coutumes dites mauvaises ; seules les bonnes coutumes sont rédigées, les autres sont théoriquement abolies : ainsi, en France, au XIe siècle. La coutume tire alors sa valeur de la sanction de l'autorité. Il se peut que la rédaction soit l'œuvre des seuls intéressés (ainsi, en matière de commerce international) ; la coutume paraît alors être l'expression d'un pouvoir autonome des usagers. Il faut bien voir cependant que cette rédaction, quand bien même elle serait précédée de consultations, est le fait de comités restreints, directoires d'associations professionnelles qui, en fait, imposent leurs décisions aux autres adhérents du groupement. Il se peut aussi que la coutume rédigée reçoive une consécration officielle ; elle se transforme alors en loi, si toute possibilité d'évolution ultérieure lui est refusée ; elle conserve son caractère de droit coutumier, si elle peut poursuivre son existence en dehors du document qui l'a recueillie, en modifiant, voire en abrogeant, certaines dispositions de celui-ci.
[...]
Il faut ajouter que, très souvent, la coutume ne peut être source de droit que dans la mesure où elle est raisonnable, conforme à l'ordre public, non contraire au droit étatique, etc.
Source : Annie ROUHETTE, « COUTUMIER DROIT », Encyclopædia Universalis [en ligne]. Cet article est accessible dans sa totalité en bibliothèque et à distance pour les abonnés à la BML. L'inscription en ligne est également possible.
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