Aux débuts de la Poste, fallait-il affranchir le courrier à deux reprises ?
Question d'origine :
Bonjour
Création de la poste distribution du courrier . Est-il exact qu'à ce moment là il convenait d'affranchir le courrier à deux reprises, c'est à dire un premier timbre pour l'expédition un second à reception pour obtenir le document ?
Je vous remercie
Cordialement
Réponse du Guichet
Lorsque les timbres-poste furent créés au milieu du XIXème siècle, les administrations furent dans l'obligation de taxer les lettres insuffisamment affranchies ou expédiées en port dû avec un "chiffre taxe".
Le double affranchissement dont vous parlez n'était donc nécessaire qu'en cas d'affranchissement insuffisant.
Bonjour,
Revenons tout d'abord sur l'histoire originale de l'invention du timbre poste.
Auparavant, l'affranchissement du courrier se faisait par le destinataire et son montant dépendait de la distance d'expédition. Mais, en Angleterre, Sir Rowland Hill, haut fonctionnaire de Sa Gracieuse Majesté et Directeur des Postes, est témoin d’une scène touchante qui lui donnera l'idée d'inventer une vignette collée sur la lettre et payée par l’expéditeur. Le premier timbre sera alors mis en circulation en 1840.
En 1836, le fils d'un maître d'école, nommé Rowland Hill, lui-même dessinateur, physicien et mathématicien, séjournait dans un village du nord de l’Écosse. [...] On raconte - mais peut-être n'est-ce qu'une légende - qu'il assista par hasard à une touchante scène : un facteur remettait une lettre en provenance de Londres à une jeune villageoise. Celle-ci l'examina, puis, se voyant réclamer une taxe importante, la refusa. Rowland Hill intervint mais n'obtint de la destinataire que des réponses embarrassées. Il la questionna avec patience ; et elle finit par avouer que son fiancé travaillait à Londres mais que, trop pauvres pour payer le port de leurs lettres, ils avaient imaginé un stratagème. Au moyen de quelques signes simples et discrets portés sur l'enveloppe, le jeune homme lui indiquait s'il était en bonne santé et lui confirmait son amour. Notre héros fut profondément frappé par cette anecdote et se mit à réfléchir à la situation. Il en conclut que c'était un cercle vicieux que de faire payer de fortes taxes qui entravaient la circulation des lettres en grande quantité, et qu'il valait mieux les diminuer pour permettre une augmentation du nombre des missives. Poussant plus loin sa réflexion, il conclut d'une part que, si la taxe était versée au départ, toute comptabilité disparaîtrait et que, d'autre part, si cette taxe était uniforme, tout serait encore plus simple !
Il publia une brochure intitulée "La réforme postale, son importance et les moyens de la réaliser" où il développait son projet, ajoutant, comme argument, aux avantages pratiques de sa proposition, l'utilité du progrès social qu'elle apporterait, en en faisant bénéficier les classes les plus modestes. Il préconisa de "petites étiquettes timbrées et mobiles" pouvant se coller sur une lettre et être vendues partout. [...] A compter du 10 janvier 1840, on accepta donc le paiement du tarif unique d'un penny par lettre ; cette baisse brutale provoqua des embouteillages dans les guichets et, le premier jour d'ouverture, 112 000 lettres partirent de Londres.
source : L'aventure de la poste à travers le temps / Dimitry Kandaouroff-Déka
Lire aussi : La petite histoire du timbre-poste / La Poste
En France, c'est le 1er janvier 1849 que le timbre poste est entré en circulation.
Le premier timbre-poste français a été émis en 1849. Si l’on sait aujourd’hui l’engouement qu’il suscite auprès des collectionneurs, on ignore tout de la véritable révolution qu’il a représentée pour le développement des échanges.
Le timbre-poste n’est que le résultat d’une audacieuse réforme qui visait à baisser considérablement la taxe des lettres. Cette idée démocratique, portée par quelques députés éclairés, rencontrait l’opposition du ministre des Finances qui n’y voyait qu’un manque-à-gagner pour le Trésor. Après de longs débats à l’Assemblée, la réforme fut votée le 24 août 1848. Le tarif était fortement abaissé et devenait uniforme sur tout le territoire français. On payait désormais le même prix, que l’on soit habitant de Marseille ou de Paris. Seul le poids de la lettre faisait varier le prix de l’affranchissement. L’application de cette réforme passait par l’utilisation d’un timbre-poste qui affranchissait le destinataire du paiement du prix de la lettre. Le travail des postes en fut considérablement simplifié car seules les lettres expédiées en port dû faisaient l’objet d’une inscription comptable. En l’espace de dix ans, le volume du courrier doubla et, dans le même temps, l’administration des Postes retrouvait le niveau des recettes qu’elle avait atteint avant la réforme.
source : La Poste... une histoire extraordinaire / Musée de la Poste
Répondons maintenant à votre question : était-il nécessaire d'affranchir le courrier à deux reprises ?
Le double affranchissement dont vous parlez n'était nécessaire qu'en cas d'affranchissement insuffisant.
Le 1er janvier 1859, le « Chiffre-taxe » est créé par l'administration des Postes en France pour matérialiser sur un pli le port dû par le destinataire pour affranchissement manquant ou insuffisant.
Les timbres-taxe de France sont introduits en 1859 pour marquer sur le pli le port dû par le destinataire, dans le cas d'un affranchissement manquant ou insuffisant. Avec le succès de la réforme postale de 1849 et de l'accroissement du port payé grâce à l'usage du timbre-poste, la taxe postale à acquitter par le destinataire devient supérieure à celle de la lettre affranchie par l'expéditeur à partir de 1854.
Au départ, ils servent uniquement sur les plis destinés à être distribués localement à la campagne. À partir de 1882, ils sont utilisés sur tous les plis insuffisamment ou non affranchis qui subissent un coefficient multiplicateur de 1,5 en 1859 et de 2 en 1878.
source : Wikipedia
Le "Chiffre-taxe" prendra plus tard le nom de "Timbre-taxe" et sera adopté par de nombreux pays.
On peut s'étonner de voir un timbre qualifié de taxe, alors que le timbre a été précisément créé pour cela. Le "timbre-taxe" s'oppose à celui de "timbre-poste" pour différencier le payeur : dans le premier cas, il s'agit de l'expéditeur (qui a payé ainsi le port d'avance), dans le second, il s'agit du destinataire. On pourrait aussi bien parler de port payé et de port dû. Très souvent, le port dû est plus élevé que le port payé pour un même poids et une même distance afin d'inciter le public à verser le paiement à l'avance, ce qui simplifie considérablement la tâche du service postal. Tous les pays ont adopté ce genre de vignettes, généralement peu artistiques et ressemblant davantage à des étiquettes.
source : L'aventure de la poste à travers le temps / Dimitry Kandaouroff-Déka
Nous n'avons pas trouvé trace d'un système en France ou ailleurs qui demanderait à la fois à l'expéditeur et au destinataire de régler le montant de l'affranchissement.
Lire aussi :
- Histoire de la poste aux lettres et du timbre-poste depuis leurs origines jusqu'à nos jours
- Histoire du timbre-poste / Eugène Vaillé - consultable partiellement sur Google Livres
Bonne journée.