Comment meurent les animaux dans la nature statistiquement ?
Question d'origine :
Comment meurent les animaux dans la nature, statistiquement ? On connaît les causes de décès, qui semblent évidentes, mais quelles sont les connaissances en termes de proportions selon le type de mort ? Je parle principalement de la grande faune typique de nos régions, sangliers, chevreuils. Et mon interrogation porte aussi sur la souffrance liée aux morts naturelles : temps d'agonie ? Merci de ne pas encombrer de réponses approximatives, c'est un vrai sujet.
Réponse du Guichet
Globalement, 28% des morts d'animaux sauvages seraient causées par l'homme et 72% auraient une origine naturelle comme par exemple la prédation (pour 55% d'entre-elles).
Mais on remarque qu'il existe de sensibles différences selon le type d'animal considéré, son âge et son milieu de vie.
Les grands animaux adultes sont plus susceptibles d'être tués par les humains que par toute autre cause. Les animaux de petite taille et les juvéniles sont plus sensibles à la prédation par d'autres animaux sauvages.
Bonjour,
Une équipe de chercheurs du College of Environmental Science and Forestry (Syracuse, État de New York, USA) a étudié l’impact réel de l’Homme sur la mortalité des animaux à l’échelle globale. Parmi les vertébrés pris en compte : des mammifères, des oiseaux, des reptiles et des amphibiens suivis à l'aide de balises, morts sur les cinq continents entre 1970 et 2018.
Rassemblant les résultats de 1114 études, les chercheurs se sont penchés sur la mort de 42 775 animaux dans le monde. Résultat ? Pas moins de 28 % des individus auraient été décimés par l’Homme, en grande partie par la chasse autorisée (17 %) mais aussi par le braconnage ou encore les collisions avec les véhicules. Les 72 % restants correspondraient à des causes naturelles, principalement la prédation par d’autres animaux (55 %).
Une estimation bien en deçà de la réalité
Déjà extrêmement élevé, ce chiffre de 28 % ne comprend que les décès liés ‘’directement’’ à l’Homme. « Lorsque vous prenez également en compte la croissance urbaine et d’autres modifications de l’utilisation des terres qui réduisent l’habitat, il devient évident que les humains ont un effet disproportionné sur les autres vertébrés terrestres », indique Jerrold L. Belant, l’un des auteurs de l’étude.
Les chercheurs ont aussi démontré que les animaux les plus grands étaient bien plus susceptibles de mourir des mains de l’Homme que les plus petits. Une observation qui vient confirmer une étude parue en février 2018 dans le journal Conservation Letters, selon laquelle 59 % de la mégafaune (rassemblant tout vertébré dont le poids excède 45 kg) serait aujourd’hui en voie d’extinction. En cause là encore, les activités humaines destructrices et la consommation excessive de la viande de ces animaux.
source : L’Homme, cause de mortalité majeure pour les animaux… encore et toujours !
C'est ce qu'explique également l'article intitulé How wild animals die: what we know so far qui reprend un graphique assez éloquent publié dans une étude intitulée Cause-specific mortality of the world’s terrestrial vertebrates / Jacob E. Hill, Travis L. DeVault, Jerrold L. Belant :
De nombreuses études ont enquêté sur les causes de décès de mammifères et d'oiseaux adultes, mais on manque de données sur les décès d'animaux juvéniles, ainsi que de poissons et d'insectes.
Les grands animaux adultes sont plus susceptibles d'être tués par les humains que par toute autre cause. Les animaux de petite taille et les juvéniles sont plus sensibles à la prédation par d'autres animaux sauvages.
Les améliorations technologiques de la surveillance sous-marine amélioreront notre compréhension de la mortalité des poissons sauvages.
Les insectes meurent souvent de manière très différente des animaux plus gros. La plupart de ce que nous savons sur la mort des insectes provient de la recherche sur la lutte contre les ravageurs agricoles.
Précisons que la chasse est la principale cause de mortalité du sanglier, suivie de la mortalité naturelle (par exemple famine, sénescence) et de la prédation, tous ces facteurs de mortalité étant spécifiques à l'âge et/ou au sexe.
source : Hunting, Predation and Senescence in Boars / Marlène Gamelon
Concernant la faune sauvage française, nous n'avons pas trouvé d'études complètes portant sur les causes de décès des chevreuils et sangliers spécifiquement mais vous trouverez quelques chiffres dans les documents suivants :
- Les chasseurs français tuent 22 millions d’animaux par an dont environ 724 000 sangliers et 591 000 chevreuils
- Quels sont les animaux les plus chassés en France ?
- Plus de 200 millions d'animaux sont tués sur les routes chaque année en Europe !
Pour aller plus loin, nous vous proposons la lecture de ces articles scientifiques anglophones :
- Cause-specific mortality of the world’s terrestrial vertebrates / Jacob E. Hill, Travis L. DeVault, Jerrold L. Belant
- Are we eating the world's megafauna to extinction ? / William J. Ripple, Christopher Wolf, Thomas M. Newsome, Matthew G. Betts, Gerardo Ceballos, Franck Courchamp, Matt W. Hayward, Blaire Van Valkenburgh, Arian D. Wallach, Boris Worm
- A review of the mortality of wild fauna in Europe in the last century, the consequences of human activity / Andreia Garcês, Felisbina Queiroga, Justina Prada, Isabel Pires
Enfin, si vous êtes intéressé.e par la question de la souffrance animale, vous pouvez lire les documents suivants :
- L’importance de la souffrance des animaux sauvages / Brian Tomasik
- Introduction à la souffrance des animaux sauvages
- The situation of animals in the wild
- The Predominance of Wild-Animal Suffering over Happiness: An Open Problem
- quelques ouvrages de la BML sur la souffrance animale
Bonne journée.
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