Comment les rails de chemins de fer modernes supportent-ils la dilatation ?
Question d'origine :
Bonjour,
Les rails de chemin de fer étaient jadis posés en laissant entre eux un joint destiné à laisser s'opérer la dilatation de l'acier. Aujourd'hui on pose des rails longs de plusieurs centaines de mètres en les soudant entre eux. Comment se fait alors la dilatation?
Merci
Réponse du Guichet

Vous évoquez la technique des Longs rails soudés qui comportent des dispositifs de dilatation spéciaux.
Bonjour,
Vous évoquez l’usage des longs rails soudés, décrits sur wikipedia :
Les longs rails soudés ou LRS, appelés aussi «barres longues», constituent une méthode moderne de pose des voies ferrées qui présente l'intérêt de supprimer la plupart des joints de rails sur des longueurs importantes, souvent de plusieurs dizaines de kilomètres.Les rails sont soudés à une température ambiante comprise entre 20°C et 30°C (en France). Si la température des rails est inférieure, on peut utiliser des tendeurs hydrauliques pour donner au rail la longueur qu'ils auraient à 25°C (dilatation d'environ 0,01mmm−1°C−1). Si la température des rails est supérieure, il est interdit de souder. Grâce à ces précautions les contraintes dans les rails restent relativement faibles (de l'ordre de 10daNmm−2 max), ce qui permet d'éviter tout problème de flambement ou de déformation de la voie.
Les rails peuvent être soudés sur plusieurs dizaines de kilomètres sans joint de dilatation. Les appareils de dilatation sont généralement réservés aux ouvrages d'art tel que les ponts. Ces appareils compensent la dilatation du tablier du pont.
Le libre mouvement du métal en fonction de sa température est bridé par sa fixation ferme aux traverses, elles-mêmes ancrées dans le ballast. Les mouvements contrariés du métal se transforment en contraintes de compression (lors de températures élevées) ou de tension (lors de basses températures), qui peuvent générer des efforts équivalents à 140 tonnes pour une voie armée de rails de 60 kg/m.
Ces contraintes mécaniques internes dépendent des variations de températures mais sont indépendantes de la longueur et de la section du rail. La section intervient par contre dans le calcul des efforts générés.
À l'extrémité du LRS se trouve une zone où la libre dilatation du rail n'est plus totalement compensée, la zone de respiration. Les mouvements de l'extrémité du rail étant supérieurs à ce qu'un joint mécanique traditionnel peut normalement absorber, on y installe des dispositifs de dilatation spéciaux qui permettent aux rails de coulisser, tout en assurant, sans hiatus longitudinal mais avec hiatus latéral, la continuité du roulement.
Le site caminteresse.fr pose la question de savoir si les rails du TGV se dilatent :
Non, car des boulons les fixent fermement sur les traverses. Celles-ci, en béton armé, pèsent plus de 350 kg et sont disposées tous les 60 cm. Le rail ainsi maintenu ne peut s’allonger même si la température varie fortement. La dilatation se réduit à une augmentation de la compression dans la structure interne du rail. Mais la contrainte est faible, compte tenu de la petite longueur (60 cm) sur laquelle s’impose l’effort. Cette technique permet de réaliser, par soudure, un rail continu de plusieurs kilomètres de long.
Par ailleurs, dans une réponse précédente du Guichet du Savoir portant sur le touk touk des trains – que nous vous invitons à consulter - nous abordions la question des Longs rails et citions notamment un article de Chadi El Boustani, Modèles analytiques du comportement des LRS. Longs rails soudés - Efforts longitudinaux et interaction rail – structure, consultable via la base de données Les techniques de l’ingénieur que nous ne possédons pas. Le résumé indique :
Pour aborder une étude des systèmes de longs rails soudés (LRS) et la problématique de l’interaction rail-structure (IRS), il convient en premier lieu de revenir aux questions classiques de mécanique de la voie afin de pouvoir appréhender en second lieu les modèles d’interaction sous chargement thermique ou tout autre chargement.
Il est entendu par «voie courante» le système formé par les rails, les traverses et les attaches, fixé par pose directe ou par l’intermédiaire du ballast, n’ayant aucune zone singulière comme un appareil de voie, un changement de section des rail, un changement du travelage, un ouvrage d’art ou un tunnel,etc. C’est la partie du chemin de fer la plus commune.
En effet, le mode de pose influera largement sur les résistances de la voie et entrera en jeu à partir de sa loi de comportement. Il sera alors judicieux, dans une ligne à grande vitesse avec divers modes de fixations, de distinguer une «voie courante à pose ballastée» et une «voie courante à pose directe», en comparaison avec une voie sur ouvrage d’art ou voie avec aiguillage par exemple.
1Fonctionnement des LRS en voie courante sous chargement thermique
Dans un LRS en voie courante, toutes les sections ne se comportent pas de la même manière sous chargement thermique. On observe l’existence de trois zones distinctes comme le montre la figure1:
une zone dite «neutre» où les déplacements dus à la dilatation thermique sont complètement contrariés du fait de la résistance de la connexion entre la voie et son assise. Les contraintes y sont donc maximales aux températures extrêmes;
deux zones dites «de respiration», de part et d’autre de la zone neutre centrale, où la dilatation est partiellement contrariée. Ils se produit alors des déplacements qui atteignent leurs maximum aux extrémités des barres alors que la contrainte thermique dans les rails sera minimale voire nulle…
Pour compléter cette première approche, nous vous renvoyons vers deux contributions :
- Des barres normales aux longs rails soudés de Francis D'Alascio, ingénieur chef de section honoraire SNCF, travaillant à académie de Lorraine des sciences.
- Théorie Simplifiée des LRS, rédigé par Yves Noblet, consultant dans le domaine ferroviaire
Nous vous laissons aussi jeter un coup d’œil à la vidéo produite par la SNCF sur Le phénomène de dilatation du rail en cas de fortes chaleurs.
Enfin, vous pourriez consulter Manuel d'exploitation ferroviaire de Didier Janssoone.