Question d'origine :
Bonjour,
Je voulais savoir si en 1944, il était possible d'adopter un enfant, si un autre avait été adopté précédemment. J'ai en effet vu que la condition pour adopter à cette époque était, entre autres, de ne pas avoir d'autre enfant, légitime ou naturel.
Merci pour votre réponse.
Réponse du Guichet
Vraisemblablement rien ne s’opposait en 1944 à une adoption supplémentaire si toutefois les parents n’avaient pas d’enfant légitime.
Cofondé par le CNRS, le musée numérique CriminoCorpus, consacré à l’histoire de la justice, des crimes et des peines propose en ligne une ancienne édition du code civil dont le titre VIII, «de l’adoption et de la légitimité adoptive» était valide entre 1939 et 1970. Il y est stipulé à l’article 344 que « Les adoptants ne devront avoir, au jour de l’adoption, ni enfants ni descendants légitimes. L’existence d’enfants légitimés par adoption ne fait pas obstacle à l’adoption ».
Précisons que c’est le décret-loi du 29 juillet 1939 « relatif à la famille et à la natalité française» qui pose les bases de ces règles adoptives. Titre I, chapitre II on peut ainsi lire: « la légitimation adoptive n’est permise qu’en faveur des enfants âgés de moins de cinq ans dont les parents sont inconnus; elle ne peut être demandée que conjointement par des époux, non séparés de corps, âgés de plus de quarante ans et n’ayant ni enfants, ni descendants légitimes ».
Une proposition de loi du Sénat de 1996, que nous avions déjà cité dans une précédente réponse, propose un rapide historique de l’adoption en France d’un point de vue légal.
Le texte détaille notamment le décret de juillet 1939 en ces termes :
« C'est dans le cadre du décret-loi du 29 juillet […] qu'intervient la réforme de l'adoption qui fonde, en quelque sorte, le statut moderne de l'adopté. Si ce texte laissait subsister l'adoption à finalité successorale, il n'en permettait pas moins aux adoptés de moins de seize ans et, sur décision du tribunal, une rupture des liens avec la famille d'origine, accompagnée d'un changement de nom et de la suppression de l'obligation alimentaire. À côté de cette adoption rénovée, il était créé une légitimation adoptive, prononcée par jugement du tribunal, au bénéfice des couples mariés depuis dix ans, sans enfant, et dont l'un des époux avait 35 ans au moins. Ces couples pouvaient demander des enfants de moins de cinq ans, abandonnés ou dont les parents étaient inconnus ou décédés. L'enfant avait les mêmes droits et obligations que l'enfant né du mariage. Ce texte fut complété et précisé par les lois du 8 août 1941 et 15 avril 1943 qui rapprochaient encore la situation de l'adopté de celle de l'enfant légitime ».
« La mise en œuvre du décret-loi de 1939 permit véritablement le développement de l'adoption à partir de 1943. Au lieu de 1.000 à 1.700 annuels, ce nombre dépassa bientôt 4.000, puis se stabilisa pendant les années cinquante, si l'on excepte les « pointes » enregistrées durant la Guerre d'Algérie, entre 1957 et 1961 ».
Pour en savoir plus sur la traduction dans la loi de la politique familiale pratiquée sous le régime de Vichy, vous pouvez également consulter le chapitre I du livre de Christophe Capuano, Vichy et la famille, intégralement accessible en ligne.
Bonnes lectures !