Quelle est l'origine du choix des couleurs pour chaque décade de conscrits ?
Question d'origine :
Bonjour,
Une question sur les conscrits.
On trouve facilement le code couleur des décades(20 ans vert, 30 ans jaune ....) mais on aimerait connaître l origine du choix des couleurs pour chaque decade svp ?
Merci d avance !
Alex
Réponse du Guichet

L'usage de rubans de couleurs se généralise après 1920 et a été analysé par Michel Bozon qui propose une interprétation pour chaque décade.
Bonjour,
Dans Les conscrits, Michel Bozon revient sur l’usage de rubans multicolores dont la tradition se maintient essentiellement à Villefranche-en-Beaujolais :
Le goût des conscrits pour les rubans multicolores remonte sans doute au temps des recruteurs du XVIIIe siècle, qui en surchargeraient leurs costumes. Par la suite, les rubans furent employés comme signe de chance ou de malchance au tirage au sort : on arborait au chapeau rubans blancs ou rubans noirs, selon le cas. Puis, petit à petit, leurs couleurs se diversifièrent pour s’intégrer dans l’habilement chamarré, pseudo-militaire des conscrits. Des flots de rubans se mirent à orner chapeaux, cannes, drapeaux, on en portera même en écharpe ou en ceinture (...) Mais le ruban tricolore, dont les couleurs s’harmonisaient avec celles de la cocarde qu’ils portaient aussi sur la poitrine, finit par éclipser tous les autres types.
A Villefranche-sur-Saône, en revanche, la tradition du ruban multicolore s’est conservée, mais seulement pour indiquer par la couleur l’âge du conscrit.
Une fiche d'inventaire du patrimoine culturel immatériel, revient sur la fête des conscrits à Villefranche-sur-Saône et cite :
Après 1920, les rubans de couleur se généralisèrent. En 1921, le défilé du matin perdit son caractère martial pour devenir la
« vague », analogue à celle du soir, plus organisée, plus structurée. Les 20 ans portèrent désormais un bouquet aux conscrites.
À partir de 1946, toutes les classes portaient le bouquet aux conscrites et les couleurs des rubans furent désormais fixées.
Jean-Jacques Pignard dans Les conscrits de Villefranche en Beaujolais (p. 84-85), revient lui aussi sur la symbolique des couleurs :
C’est à ce chapeau que les gars de vingt ans accrochaient un ruban vert, avant le tirage au sort, en signe d’espérance. Si le destin leur était contraire, ils le retiraient de rage, ne conservant plus que le feutre noir, couleur de deuil. Lorsqu’en 1905, le tirage au sort fut définitivement supprimé, les jeunes conscrits restèrent attachés au vert de leur ruban (…) les autres classards – les aînés – défilaient sans couleurs.
(…) Après la première guerre mondiale, l’usage s’établit peu à peu d’orner tous les chapeaux de rubans. Mais le choix des couleurs de cet arc-en-ciel, laissé à l’initiative des comités d’organisation, variait d’une année sur l’autre. En 1932, par exemple, les trente ans étaient lilas, les quarante en rouge, les cinquante en grenat, les soixante en mordoré et les soixante-dix en jaune. En 1938, les trente ans étaient en jaune, les quarante en rose, les cinquante en bleu et les anciens en jaune et vert (appelés curieusement dans la presse les couleurs de la ville). Il faut vraiment attendre les lendemains de la seconde guerre pour que la palette des conscrits prenne ses teintes définitives : vert pour les vingt ans, jaune pour les trente, orange pour les quarante, rouge pour les cinquante, bleu pour les soixante, violet pour les soixante-dix et tricolore pour les anciens.
Reprenant la thèse avancée par Michel Bozon (cf. Le patriote beaujolais, janvier 1981), il indique que les couleurs représenteraient ainsi :
«le ruban vert des vingt ans symbolise la décennie des espérances, des promesses, de l’avenir.
Le ruban jaune des trente ans et l’orangé des quarante appellent l’or et la chaleur, la lumière. Il s’achemine vers la maturité avec le ruban rouge des cinquante ans qui rappelle le sang, le feu, la force. Ces trois âges symbolisent les décennies d’activité, de vitalité, d’énergie. Le ruban bleu sombre des soixante ans et le violet des soixante-dix, aux couleurs de demi-deuil indiquent le déclin de l’individu, le ralentissement de son activité et son apaisement. Le ruban tricolore des anciens symbolise la prise en charge de l’individu par la collectivité et en même temps, la reconnaissance de celle-ci pour ce qu’ils ont fait, pour les honorer d’être encore vivants».
Forcément subjective, cette interprétation des couleurs rejoint dans l’anthologie toutes celles que de fertiles imaginations ont façonnées au gré de leur fantaisie. Les journalistes planchent sans fin sur cette symbolique ; les instituteurs la proposent à leurs élèves comme sujet de rédaction. Il est même des sous-préfets rendus plus disponibles par les bienfaits de la décentralisation, qui s’adonnent avec bonheur à cet exercice de style. Ainsi de Claude Pierret en 1984 ….»
Nous vous laissons poursuivre cette lecture.
Si cette interprétation ne vous convient pas, vous pouvez toujours lire les ouvrages de Michel Pastoureau traitant de cette question.
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