Qu'appelle-t-on "les classes moyennes en voie de déclassement" ?

Dans un article de la revue des idées économiques, que vous pouvez retrouver sur la plateforme Cairn, l’économiste Yves Besançon, revient sur le travail de Louis Chauvel concernant le déclassement des classes moyennes :

« Le phénomène de repatrimonialisation est au cœur de l’aggravation des inégalités des classes sociales et, de fait, introduit une nette dichotomie chez les classes moyennes, tout particulièrement au sein des jeunes générations, entre ceux qui possèdent un peu grâce au patrimoine de leurs parents et ceux qui ne possèdent rien, ces derniers démarrant donc dans la vie avec un lourd handicap, condamnés à travailler deux fois plus longtemps que leurs parents pour accéder à la propriété d’un même logement ou à rester locataires ».

Plusieurs déclassements sont attestés par Louis Chauvel dans son ouvrage « la spirale du déclassement : essai sur la société des illusions », paru en 2016 :

- le déclassement résidentiel, lié à la fois à la hausse des charges allouées au logement

- le déclassement scolaire concernant, lui, la dévalorisation des diplômes, ainsi que l’explique Yves Besançon :

« un tel déclassement peut prendre deux visages pour un individu : accéder à une position sociale inférieure à celle de ses parents, tout en disposant d’un niveau de diplôme équivalent voire supérieur et/ou occuper un emploi correspondant à un niveau de qualification inférieur à celui auquel le titre scolaire peut prétendre (déclassement professionnel) ».

Pour le sociologue, ce déclassement prend une ampleur toujours plus considérable et déstabilise dangereusement la cohésion sociale :

" La civilisation de la classe moyenne, c’est-à-dire, en particulier, une société fondée sur le salariat, permettant aux individus par leur salaire d’accéder à un niveau de vie confortable, de disposer d’une large protection sociale, de pouvoir espérer une mobilité sociale ascendante et d’obtenir des progrès du point de vue de la réduction des inégalités sociales face à la réussite scolaire. Ce sont donc tous ces fondements qui sont mis à mal à partir des années 1970, redonnant force à la logique de la reproduction sociale et à un mouvement de régression sociale, et fragilisant du même coup dangereusement la cohésion sociale."

Nous ne pouvons que vous conseiller la lecture de l’intégralité de cet article ainsi que le livre, déjà cité, de Louis Chauvel.

Par ailleurs, et dans le sillage du sociologue, l’économiste Lucas Chancel analyse la même déstructuration des classes moyennes depuis 40 ans, en se basant sur la tranche de la population comprise entre les 50% les plus pauvres et les 10% les plus riches.

Il met en évidence la baisse de salaire considérable des professions intermédiaires.

Ainsi, précise-t-il, dans une récente tribune pour le journal Le Monde : «le salaire d’entrée des professeurs de collège avoisinait 2,2 fois le salaire minimum en 1980 contre seulement 1,2 aujourd’hui ». Vous pouvez lire cet article dans sa totalité via Europresse accessible en temps normal, à la BML et à distance par nos abonné·es. Actuellement, suite à une panne de notre hébergeur, notre site est temporairement indisponible.

L’économiste met également l’accent sur la politique fiscale à l’œuvre: «les classes moyennes reversent jusqu’ à 55 % de leurs revenus en taxes et en cotisations sociales. Ce taux est plus élevé pour les classes moyennes que pour les classes aisées».

Nous vous conseillons également une précédente réponse du Guichet du Savoir sur les Classes moyennes ainsi que d'autres ouvrages issus des collections de la BmL.

Bonnes lectures.