Pourquoi beaucoup de fleurs du printemps sont dans les tonalités violettes ?
Question d'origine :
Bonjour,
Y a-t-il une raison pour laquelle nombre de fleurs au printemps (au sol sur les arbres) sont dans les tonalités violettes?
Merci
Réponse du Guichet
Il n'existe pas, à notre connaissance, d'étude prouvant la prépondérance des fleurs violettes au printemps (donc dans des zones où la saison printanière existe) et expliquant les raisons précises de cette prépondérance.
Bonjour,
Vous partez d’une affirmation, je suppose basée sur l’expérience, mais que rien ne semble corroborer, du moins dans la littérature scientifique que nous avons eu sous les yeux : il y a plus de fleurs violettes que d’autres couleurs au printemps (blanches, jaunes, etc…). Nous aurions bien aimé trouver une étude confirmant ou infirmant votre hypothèse de départ.
N’étant pas des scientifiques mais de modestes bibliothécaires, nous allons extraire de nos lectures différents éléments connus concernant la couleur des fleurs dont la juxtaposition ici vous permettra peut-être de vous faire une idée.
Les fleurs sont un outil de séduction des plantes appelées angiospermes (plantes à fleurs). Odeurs, couleurs ne sont pas spécialement là pour flatter nos yeux ou nos nez délicats mais plutôt pour «attiser les convoitises de multiples transporteurs de pollen et disséminateurs de graines : principalement des insectes» (Sexus Botanicus / Joanne Anton, Arthaud, 2022).
Or, «la vision des insectes diffère de la nôtre en ce sens qu’ils ne distinguent bien que le jaune, le bleu et le violet. Ces couleurs sont d’ailleurs dominantes chez les fleurs de nos prairies et de nos montagnes» (Le langage secret des plantes / Jost et Jost-Tsé, Cabédita, 2017).
On voit donc que le violet fait partie des couleurs bien visibles aux yeux des insectes.
Mais d’où vient la couleur des fleurs? De certains pigments. Une page consacrée à la couleur des fleurs sur le site pédagogique de l’Académie de Paris nous en dit plus :
«Les flavonoïdes regroupent un très grand nombre de pigments dont les des plus connues, les anthocyanes, peuvent produire des teintes allant du jaune-orangé au bleu, en passant par le pourpre et le rouge. Composés polyphénoliques, ils partagent tous une même structure de base formée par deux cycles aromatiques reliés par trois carbones, C6-C3-C6 (la chaîne à 3 atomes de carbone est souvent fermée en un hétérocycle oxygéné hexa- ou pentagonal comme dans l'illustration ci-à-droite). mceclip0 - 2021-12-27 10h12m12s. A l'état naturel, les flavonoïdes sont souvent sous forme d'hétérosides, une ou plusieurs de leurs fonctions phénols sont alors glycosylées (les oses étant le glucose, le galactose, le rhamnose ou l'arabinose). La partie autre que l'ose est appelée aglycone.
Les flavonoïdes sont divisés en plusieurs classes qui se différencient par le degré de saturation de l'hétérocycle de l'aglycone, son oxydation et sa conformation spatiale :
- les flavonols, pigments conférant une couleur jaune,
Ex : quercétine dans les oignons, les échalotes
- les anthocyanidines (ou anthocyanidols), présents dans les anthocyanes
- les flavanols, incolores, qui entrent dans la constitution des tanins (ex : catéchine dans le thé, le vin)»
Nous apprenons aussi plus loin que «Les flavonoïdes et les anthocyanes ont aussi la propriété de changer de couleur en fonction du pH (de l’acide au basique) du milieu car elles sont en équilibre dans le milieu, entre différentes formes qui varie selon le pH».
Donc nous avons à ce point identifié deux «responsables» d’une grande variété de couleurs (don le bleu et le violet) des fleurs et noté que les résultats obtenus peuvent dépendre du PH du sol.
Ce que nous confirme d’ailleurs les définitions croisées des anthocyanes et anthocyanidols extraite du Dico de Bio (Dico de Bio / Romaric Forêt, De Boeck, 2020) :
«Les anthocyanes sont hydrosolubles, inodores, présentes dans tous les tissus, à fort pouvoir colorant, dont la couleur (du rouge au violet noir) dépend de plusieurs facteurs: le PH, le nombre d’hydroxyles OCH3. Anthocyanidols : groupe de pigments flavonoïdes du groupe des anthocyanes dont la valeur varie du rouge-orange en milieu acide au bleu-violet en milieu alcalin.»
Le PH du sol peut être très différent suivant la composition des sols. Mais selon la saison, qu’en est-il ?
Sur le site ARVALIS, Institut technique agricole, nous avons trouvé une page consacrée à l’acidité des sols qui nous délivre une information intéressante :
«La valeur du pH du sol varie au cours de l’année de l’ordre de 0,5point en moyenne: il baisse au printemps et en été (intense activité biologique et nitrification de l’azote ammoniacal) et il remonte en automne et en hiver.»
Ah. Donc du coup, ceci semble vouloir indiquer que théoriquement un sol est plus acide en moyenne (PH plus bas) au printemps. Or cela entre en contradiction avec une partie de ce que nous avons lu sur les anthocyanidols dans le Dico de Bio cité plus haut.
Comme vous pouvez le constater, nous ne pouvons extrapoler des théories sur de simples extraits de lectures d’articles pourtant eux-mêmes choisis comme source sûre.
Il nous manque, nous le répétons, l’étude qui, partant d’une analyse prouvant la prédominance des fleurs violettes dans la nature au printemps, expliquerait de manière scientifique la ou les raisons de ce fait constaté et prouvé.
Ce qui ne veut pas dire qu’une telle étude n’existe pas. Une recherche poussée dans des bases de données scientifiques internationales pourrait peut-être amener de meilleurs résultats. Mais nous n’avons pas accès à ces bases payantes : les personnes répondant aux questions du Guichet du Savoir sont des bibliothécaires territoriaux.
Une petite conclusion sous forme anecdotique : dans certaines conditions très spéciales, une plante peut choisir d’être certes moins visible par sa fleur aux pollinisateurs, mais aussi par là-même aux promeneurs qui vont la couper sans trop penser à sa reproduction, comme l’explique bien cet article de l’Influx sur la maligne Fritillaria delavayi.
Cordialement.
DANS NOS COLLECTIONS :
Ça pourrait vous intéresser :
Comment les platanes, enchâssés dans le goudron, trouvent-ils...