Question d'origine :
Que disent les études scientifiques de la musicothérapie ?
Et, plus particulièrement, de la protéodie et de la musique dite des plantes ?
Merci pour vos lumières !
Réponse du Guichet
Les bienfaits apportés par la musique sur notre organisme et notre esprit sont indéniables : la musique est bonne pour la santé !
La protéodie (mot composé de protéine et de mélodie) est un concept créé par Joël Sternheimer, inventeur d’un procédé de régulation épigénétique de la biosynthèse des protéines par résonance d’échelle dont le brevet a été déposé en 1992. Sa théorie explique l’influence de la musique sur des organismes vivants et sur la croissance des plantes en particulier. Ses conclusions semblent diviser la communauté scientifique. Un partenariat a été noué avec l'université de Cergy afin de faire des essais et de mieux comprendre le fonctionnement scientifique de ses solutions. Pour l'instant, l'INRA manque de fonds pour valider ou invalider scientifiquement cette théorie par des expérimentations.
Bonjour,
Si la musicothérapie peut venir améliorer les effets d'un traitement médical, elle ne peut en aucun cas s'y substituer.
L'ouvrage intitulé La musique : entre génie créateur et vertu thérapeutique de Jean-Noël Beuzen présente quelques études scientifiques attestant de l'influence de la musique sur la santé.
La musique étant aussi protéiforme que les sentiments eux-mêmes, elle peut s'adapter à une infinité de situations cliniques. Elle peut soulager des patients souffrant de dépression (A.S. Maratos, C. Gold et al., 2008). La symptomatologie dépressive est plus susceptible de s'améliorer chez les patients en musicothérapie comparés à un groupe témoin non traité par musicothérapie. Les déprimés qui vont mieux sont ceux à qui on applique des techniques combinées, comme peindre en écoutant de la musique ou chanter en improvisant. La musicothérapie améliore la réponse aux antidépresseurs.
Elle peut également améliorer les sujets stressés (L. Keegan, 2003 ; E. Mok et K.Y. Wong, 2003), en particulier certaines femmes enceintes. Ces dernières, sous musicothérapie, voient à la fois leur niveau de stress, d'anxiété, voire de dépression diminuer. Les porteurs de pathologies cardiaques tirent également avantage de la musicothérapie, essentiellement sur leurs symptômes de stress sévère et d'anxiété. Il a même été montré que leur pression artérielle pouvait diminuer jusqu'à se normaliser, ainsi que leur rythme cardiaque, leur fréquence respiratoire et leurs précordialgies.
La musicothérapie a également été utilisée avec succès chez les porteurs de troubles envahissants du développement, en particulier d'autisme (C. Gold et al., 2004, 2005, 2006 ; J. Whipple, 2004 ; W. Tang, X. Yao et Z. Zheng, 1994). Les avantages rapportés sont notamment une augmentation des vocalisations, des verbalisations, des gestes de la compréhension du vocabulaire, de l'attention liée à la tâche, des actes de communication, du jeu symbolique et des habiletés aux soins personnels, ainsi qu'une diminution de l'écholalie (répétition automatique des phrases au fur et à mesure qu'on les entend). Les chercheurs ont aussi observé une amélioration de la conscience du corps et de la coordination, et une diminution de l'anxiété. En revanche, les résultats sont mitigés à l'égard de l'effet de la musique sur les troubles de comportement. Il reste aussi à définir clairement les avantages à long terme, mais en matière d'autisme, tout ce qui est acquis représente un grand pas pour l'avenir.
Améliorer la qualité de vie des personnes souffrant de schizophrénie est un autre des attributs de la musicothérapie. Des résultats d'essais cliniques, publiés en 2005, avaient déjà indiqué que la musicothérapie pouvait contribuer à améliorer l'état global, la santé mentale et le fonctionnement social des personnes atteintes de schizophrénie (C. Gold et al., 2004, 2005, 2006). [...] Pour le moment, la plupart des études de musicothérapie n'ont porté que sur les court et moyen termes. L'efficacité de cette technique sur le long terme reste à démontrer mais les chercheurs en musicothérapie s'y emploient. [...]
La musicothérapie ne serait dangereuse que lorsqu'elle ne serait pas adaptée. Certains patients autistes ou psychotiques peuvent être "enfermés" dans leur pathologie par la musique. D'autres, essentiellement les adolescents, peuvent éprouver des émotions, à l'écoute de certaines musiques, qu'ils seront incapables de verbaliser ou simplement d'exprimer. Le danger peut également provenir de thérapeutes insuffisamment formés et incapables de gérer les situations existantes ou induites, les émotions, les traumatismes induits par la musique. La musicothérapie implique, non seulement d'être musicien, mais aussi psychothérapeute et donc de connaître à la fois les limites de la technique.
A partir de la page 197, le livre intitulé Tout savoir sur la musicothérapie : l'art-thérapie à dominante musicale de Richard Forestier, liste les domaines dans lesquels la musicothérapie peut contribuer à l'activité médicale : les troubles du comportement, les troubles somatiques et psychosomatiques, les troubles généraux moteurs et psychomoteurs, les troubles digestifs, les troubles de la nutrition, les troubles de la clarté du champ de la conscience, les troubles de la mémoire, les troubles spatiaux temporels, les troubles du nuancement, les troubles du tonus, les troubles de l'affectivité les troubles sensoriels, les troubles des fonctions mentales de base, les troubles de la sympathie, les troubles relatifs à l'aliénation de la personnalité, les troubles relatifs à un conflit d'identification, les troubles liés au développement mental, les troubles du ressenti, les troubles de la représentation, les troubles de la socialisation, les états de dépendance, les grossesses et liens maternels difficiles, les soins palliatifs, les troubles relatifs à l'idéalisation...
Qu'en est-il de la protéodie ?
Commençons par la présenter :
En 1992, le physicien Joël Sternheimer, ancien élève de Louis de Broglie, déposait le brevet d’un procédé de régulation épigénétique de la synthèse protéidique dont il avait fait l’expérience, concluante semble-t-il, et confirmée depuis, à propos de la pousse des plantes. L’idée – d’horizon quantique – en est qu’à chaque acide aminé composant une protéine est associée une onde d’échelle (l’expression est de Sternheimer) qu’il est possible de transcrire en note de musique. La complexité des protéines, qui peuvent pour certaines comporter plusieurs centaines d’acides aminés ajoutés à la suite les uns des autres, permet donc d’obtenir de véritables mélodies : des protéodies, ou musique des protéines. Dès lors, soumettre une protéine à sa mélodie spécifique permet d’en stimuler la croissance : « Faire régulièrement écouter à un plant de tomates la musique correspondant à une protéine jouant un rôle dans le mécanisme de sa floraison, stimule la production de cette protéine dans la plante, qui donnera plus de fleurs qu’à l’accoutumée » . Une conclusion et un brevet qui entérineraient et résumeraient l’ensemble des études auparavant citées, dès lors que les protéines assurent l’essentiel des fonctions cellulaires communes à la totalité du vivant.
source : La musique au corps pour une esthésique du musical / François Félix
Qu'en disent les scientifiques ? Deux extraits d'articles répondent à vos interrogations :
À l’origine du concept, il y a le chercheur indépendant en physique quantique Joël Sternheimer qui, depuis plus de vingt ans, affirme avoir calculé les fréquences des ondes associées aux acides aminés, ces molécules constitutives des protéines. Or, la transposition de ces ondes dans l’audible générerait une « protéodie » (contraction de protéine et de mélodie) capable de stimuler ou d’inhiber la synthèse des protéines, donc la croissance du plant. Une approche dite « génodique », dont la société Genodics, par la voie de son directeur Pedro Ferrandiz, affirme que « sur les vignobles touchés par l’esca, elle induit une baisse de la mortalité des ceps de 60 % à 70 % ». Sauf que ces résultats ne sont pas validés par la science !
Impossible à prouver en labo
« Impossible de conclure à une quelconque efficacité car on ne peut pas mettre en place de répétitions avec témoins dans une même parcelle » , explique Pascal Lecomte, ingénieur à l’Inra. Autre hic : la transposition de cette hypothétique « protéodie » dans l’audible, « alors que le phénomène se joue a priori à un niveau quantique » , pointe Aroune Duclos, acousticien au Laboratoire d’acoustique de l’université du Maine. « Il manque une preuve en laboratoire » , résume Olivier Gallet, de l’université de Cergy-Pontoise.
Son équipe a ainsi élaboré un protocole – en cours de validation – sur le petit pois. Verdict bientôt. Mais la surprise serait que la musique dans les vignes ne soit pas un pur chant des sirènes…
source : La musique peut-elle doper les vignes ? / Nathlaie Picard - Science & Vie QR n°26 « Le guide du vin » - 02 Oct 2018
De résultats expérimentaux qui forcent l'intérêt de la communauté scientifique. Ainsi, Genodics a noué un partenariat avec l'université de Cergy, en région parisienne, afin de faire des essais et de mieux comprendre le fonctionnement scientifique de ses solutions. Les essais sont en cours comme l'explique Mathieu Vidard sur France Inter:
De son côté, l'Inra reconnaît que «les plantes sont sensibles aux sons et qu'elles réagissent à certains bruits, comme celui du vent ou le craquement d'une plante voisine qui se dessèche et provoque une réaction. Toutefois, aujourd'hui nous n'avons pas prouvé scientifiquement ces liens», souligne Bruno Moulia, directeur de recherches à l'Inra. Concernant la théorie de Genodics, «je ne peux pas dire que ça ne marche pas, mais nous n'avons pas, non plus, démontré scientifiquement l'efficacité de ces traitements», souligne le membre de l'organisme français de recherche en agronomie. Les résultats de Genodics constituent son meilleur argument «mais on peut avoir des théories fausses avec des applications vraies», tempère toutefois le chercheur. Pour le savoir, il faudrait que l'institut mène des expérimentations, une hypothèse aujourd'hui envisagée par l'Inra. Mais pour cela il faut que l'institut débloque des fonds pour vérifier scientifiquement les théories.
source : Un paysan sauve ses cultures d'un virus dévastateur… grâce à la musique ! / Golla, Mathilde - Le Figaro.fr -lundi 13 novembre 2017
Quelques articles pour en savoir plus :
- FERRANDIZ Pedro, « La génodique : de l’émergence d’un nouveau champ scientifique à sa validation sur le terrain, puis sur celui académique », Annales des Mines - Responsabilité et environnement, 2021/3 (N° 103), p. 69-74.
- GALLET Olivier, « Existe-t-il une biologie cellulaire des sons ? De « l’écoute » des plantes à l’acoustique cellulaire », Annales des Mines - Responsabilité et environnement, 2021/3 (N° 103), p. 16-22.
Cet article présente les résultats du partenariat avec l'université de Cergy.
- Effect of Music on Plants – An Overview / Anindita Roy Chowdhury and Anshu Gupta
Quelques articles récents sur les effets de la musique sur la santé :
- Apport de la musicothérapie dans la prise en charge de l’anxiété / Aymeric Le Monnier de Gouville
- Influence de la chanson sur le langage oral chez des patients Alzheimer au stade modéré / Floriane Leleu, Marthe Lenfant Poisson
- De la musicothérapie en soins palliatifs : la musique comme outil d’accompagnement thérapeutique / Carla Marie Joséphine Masciari
- La musicothérapie : un soin de support en oncologie / Mélanie Bacquet
- Musicothérapie et démences de la personne âgée / Louise Morel
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Bonne journée.