Je cherche de la documentation sur l'histoire des services secrets marocains
Question d'origine :
Bonjour,
Je cherche de la documentation sur l'histoire des services secrets marocains et leurs relations avec des etats (France, Espagne, Etats-Unis-, UK...).
Merci.
Réponse du Guichet
Il n'existe à notre connaissance aucune histoire complète des services secrets marocains. En revanche de nombreux livres et articles abordent le sujet, que ce soit sous l'angle de la question démocratique, de la lutte antiterroriste ou encore des relations internationales.
Bonjour,
Si on en croit l'entrée correspondante de Wikipédia, les services secrets marocains sont une institution puissamment structurée, couvrant le renseignement intérieur comme extérieur, dont les branches relèvent des forces de polices ou de l'armée :
- Sous la tutelle du ministère de l'Intérieur:
- Renseignements généraux marocains "RG" (Rattaché au service de la police nationale)
- Service autonome de renseignement des Forces auxiliaires marocaines "SAR"
- Direction générale de la surveillance du territoire " DGST " (Renseignements intérieurs)
- Direction générale des affaires intérieures "DGAI"(Rattaché au ministère de l'intérieur)
- Sous la tutelle des Forces armées royales:
- Direction générale des études et de la documentation " DGED " (Renseignements extérieurs)
- Deuxième Bureau "2B" (Renseignements militaires)
- Cinquième Bureau "5B"
- Service de renseignement de la gendarmerie royale marocaine (SRGR)
- Service national pour la lutte contre le terrorisme:
- Bureau central d'investigation judiciaire (BCIJ) (Rattaché à la DGST)
Le propre de ces services étant d'être secrets, et la transparence n'étant pas la qualité la plus tangible du régime marocain, l'écriture de leur histoire peut s'avérer ardue faute de sources. C'est ce que nous apprend l'article de Benjamin Stora, Les enjeux et les difficultés d’écriture de l’histoire immédiate au Maghreb publié en 2000 dans Bulletins de l'Institut d'Histoire du Temps Présent n° 75, 2000, lisible sur Persée :
La dissimulation d’archives par les États existe toujours de nos jours. Pour de nombreux historiens du Maghreb aujourd’hui, l’impossibilité d’accès aux archives est un problème politique. La dissimulation d’archives publiques pèse sur la découverte possible d’archives privées. Des citoyens qui ont été acteurs de l’histoire possèdent une quantité de documents, des photographies ou des lettres. Ils n’ont pas confiance en l’État et ne les lui livrent pas. Ils les conservent pour eux. L’une des difficultés d’écriture de l’histoire du Maghreb se lit dans le divorce qui existe entre la construction des archives officielles, et l’extraordinaire richesse contenue dans les archives privées. [...] Au Maroc ou en Algérie, la défiance du citoyen par rapport à l’État reste élevée ; et des historiens trouvent parfois des pépites dans les archives privées plutôt que dans les archives officielles. Ainsi, en travaillant sur Messali Hadj dans les années 1975-1978, en compulsant les archives de la famille, des amis, des compagnons, ce «trésor » m’est apparu. En fait, il ne faut pas s’arrêter aux archives officielles, mais en soulevant des interrogations, découvrir des archives nouvelles.
Se pose également un problème de conservation d’archives. Les Etats qui ont accédé à l’indépendance dans les années 1960 ne se sont pas préoccupés de stocker leurs archives. L’urgence c’était de bâtir un Etat, un pays, non de conserver une histoire ancienne, ou plus proche comme la séquence coloniale jugée infamante. Dans les pays du Maghreb, les lieux de conservation d’archives sont dérisoires et privés de moyens.
[...]
La déclassification des archives étatiques est régulièrement évoquée, mais les pièces déclassifiées essentielles ne sont pas accessibles. Cette question d’archives pose le problème de l’engagement citoyen des historiens. Ces derniers ont trop laissé la place que des journalistes occupent, légitimement, pour traiter de l’histoire contemporaine. Sur cette «affaire Ben Barka », qui touche au fonctionnement de l’État, le travail des historiens reste faible. Ceux-ci doivent effectuer un travail de croisement des sources disponibles, de recoupement et vérification des témoignages déjà recueillis, mettre en perspective la fabrication du sens historique, établir des relations avec l’histoire du mouvement national marocain, voire maghrébin. L’histoire des services secrets des États ne peut être négligée. Un retard a été pris par les historiens sur ce type d’événements qui ont dérivé dans les eaux médiatiques, au mauvais sens du terme. La responsabilité historienne est grande, au risque de se trouver en retard par rap¬ port aux sociétés, marocaine ou algérienne, qui expriment de plus en plus d’exigences pour une histoire plurielle.
Le Maroc, a accumulé un certain retard dans l’écriture de l’histoire immédiate.
C'est ainsi qu'une histoire du renseignement marocain est encore à écrire, du moins en français. Cependant, nos recherches nous ont permis de découvrir que ces organes ont eu une influence majeure sur la vie politique marocaine depuis l'indépendance en 1956. Vous trouverez donc des éléments sur ceux-ci dans ces quelques documents de nos collections :
Guerre des services spéciaux en Afrique du Nord : d'après les souvenirs inédits du général Jean Chrétien, ancien chef du contre-espionnage à Alger (1918-1947) / Jean Chrétien ; Olivier Lahaie
Mehdi Ben Barka : 50 ans après / introductions de René Gallissot et Maurice Buttin ; ouvrage coordonné par l'association Sortir du colonialisme ; postface de Patrick Farbiaz
Hassan II-De Gaulle, Ben Barka : ce que je sais d'eux / Maurice Buttin
Le roi prédateur / Catherine Graciet, Éric Laurent
Déni français : notre histoire secrète des liaisons franco-arabes / Pierre Vermeren
Ajoutons à cette liste ces ouvrages que nous ne possédons pas :
Bourrat Flavien, Les services de renseignement au Maghreb : un processus de normalisation complexe et inachevé, Confluences Méditerranée, 2020/3 (N° 114), consultable sur Cairn à la Bibliothèque municipale de Lyon
Éric Denécé, SDECE : la « non affaire » Ben Barka, Centre français de recherche sur le renseignement, 2021, consultable sur cf2r.org
Enfin, peut-être pouvez-vous également contacter le Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R)
12/14 Rond-Point des Champs Elysées
75008 Paris
Téléphone : 33 (1) 53 53 15 30
Bonne journée.