Question d'origine :
Est-ce que tous les parents ont des désirs, qu'ils soient conscients ou inconscients, de ce qui ils veulent que leurs enfants soient dans la vie et ce qu'ils voudraient que leurs enfants fassent dans la vie?
Réponse du Guichet

L’enfant se construit toujours dans un rapport social avec son environnement notamment familial. Or, consciemment ou inconsciemment, les parents transmettent à leurs enfants des valeurs qui leur sont propres et qui influencent dans un sens ou dans l'autre leur avenir.
Bonjour,
Que ce soit consciemment ou inconsciemment, les parents encouragent leurs enfants et les conseillent sur leurs choix d'orientation en fonction de leurs propres valeurs et aspirations ou tout simplement par le modèle qu'ils représentent.
À travers "Élève et enfant" dirigé par Alain Bentolila dans les entretiens Nathan, le chapitre « le goût d’apprendre ou l’oralité sublimée » , Christiane Olivier de profession psychanalyste nous explique que les enfants sont en réalité formés par leur famille, lorsque l’on naît, on arrive dans un foyer celui-ci nous accueille et nous suivons les règles instaurées, nous grandissons et sommes scolarisés qu’à partir de 3 ans, parfois à peine plus tôt pour des enfants précoces. Avant cela, lors des deux ou trois années de vies au sein du foyer familial, nous sommes éduqués et construits uniquement par notre famille, en principe par les parents, voire la fratrie et grands-parents. Lors de cette éducation suivie de l’entrée dans la vie sociale avec la scolarisation, les parents continuent de nous enseigner ce qu’ils pensent juste. De là, souvent, il y a une place confondue avec des parents voulant vivre leurs propres rêves à travers la génération qui les suit, c’est-à-dire leurs enfants. Cette place confondue peut être instaurée consciemment ou inconsciemment, c’est ce que l'on appelle une transmission génétique. Cette dernière est l’aboutissant de la conjonction, des liens des héritages psychiques engendré par nos deux parents comme nous l’explique Patrick De Neuter dans "La transmission générationnelle". Christiane Olivier nous dit que si l'on a un bon développement au sein de la famille, alors on a une bonne capacité d’identification aux autres, ce qui veut dire que dans notre sujet, face à notre question de transmission familiale, un enfant peut alors s’identifier à son parent dans toute sa globalité, par exemple, dans son parcours scolaire. Ce parent aura alors un impact sur la construction de son enfant, dans son développement personnel et scolaire. À cet âge, les deux sont liés, un enfant ne peut pas faire la distinction entre enfant et élève. Elle explique que « pour devenir soi-même, on a besoin de faire un mélange entre son passé qui appartient aux parents et son avenir qui appartient à sa propre génération : ce sont ces deux parts qui constituent l’équilibre et l’originalité de chaque personne humaine ».
Marie-Carmen Dupuy explique dans le chapitre "À chacun son métier", que les parents sont les premiers enseignants pour les enfants, cela rejoint ce que nous disions précédemment, la famille transmet des valeurs, au départ l’enfant n’a pas conscience de tout cela, mais l’école va transformer ces valeurs en valeurs communes. Ce qui va permettre à l’enfant de se construire entre sa famille et son propre vécu, son propre ressenti. Au fur et à mesure de sa scolarisation, l’enfant grandit, il obtient alors sa propre personnalité, celle-ci va encore évoluer mais, il ne faut pas oublier qu’à ce moment-là, il n'est que le simple reflet de ceux qui l’entourent. Ils en font partie puisque ce sont les bases, les fondements, ce qui peut l’influencer cependant, il reste aussi une part de lui-même. [....]
M-C Dupuy nous explique à travers son discours dans ce chapitre qu’il y a des familles qui peuvent aider leurs enfants dans leur travail à la maison, mais en revanche d’autres parents ne le peuvent pas forcément. Il peut y avoir différentes raisons à cela, cependant une que l'on relève est celle du manque de responsabilité peut-être de la part du parent, parfois il y a ce que l'on va appeler un inversement des rôles, entre parent et enfant. Il se produit alors un mauvais investissement de l'enfant,
ce qui donne zéro influence pour la scolarisation, car il n’y a pas d’éducation de la part du parent.
source : L’influence de la famille sur la scolarité de l’élève / Héléna Mougenot qui prend pour référence les documents suivants :
- L'élève et l'enfant : actes, XI / Les Entretiens Nathan
- La transmission transgénérationnelle / DE NEUTER Patrick, Cahiers de psychologie clinique, 2014/2 (n° 43), p. 43-58
D’après Isabelle Méténier, psychologue et auteure du livre Histoire personnelle, destinée professionnelle (Éditions Dervy) : « *L’influence de nos géniteurs est plus souvent inconsciente. Elle se loge dans notre cerveau depuis notre plus jeune âge et à notre insu. Observer nos parents, nos frères et nos sœurs travailler a un impact sur la manière dont nous construisons notre carrière. Le cadre familial va soit nous inspirer, soit, au contraire nous permettre d’établir des contre-modèles.* » Les discours tenus par nos parents sur la réussite, leur rapport à l’argent ou encore la noblesse de certains métiers restent ancrés dans notre inconscient. Mais, ce n’est pas tout. La manière dont ils mènent leur carrière peut également avoir un impact. La psychologue nous invite d’ailleurs à nous questionner : nos parents ont-ils toujours fait passer leur travail avant tout ? Sont-ils épanouis dans leur emploi ? L’ont-ils choisi ? Ont-ils souffert ? Se sont-ils sacrifiés ? Valorisent-ils la réussite scolaire ? Tous ces facteurs nous marquent et posent les bases de notre orientation…
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Face au rapport qu’entretiennent nos parents avec le monde professionnel, deux solutions s’offrent à nous : marcher sur leurs plates-bandes en nous conformant à leur vision du travail ou… prendre le contre-pied. La plupart du temps, nous agissons inconsciemment, et nous ne sommes pas tous guidés par les mêmes raisons : « Un enfant peut voir ses parents travailler très dur, souffrir de leur absence et décider par la suite de ne pas sacrifier sa vie personnelle comme eux l’ont fait, ou à l’inverse, il peut vouloir les imiter pour leur faire honneur, explique Isabelle Méténier. J’ai même vu certaines personnes s’auto-saboter pour ne pas dépasser leurs parents : quand le père ou la mère n’occupe pas un haut poste, l’enfant peut par exemple se mettre en échec scolaire ou professionnel. “Râter” sera une manière d’honorer la famille.
source : Orientation sous influence : comment la famille nous souffle-t-elle notre voie ? / Gabrielle Predko - Welcome to the jungle - 08/12/2020
Lire aussi : Nous ne choisissons pas notre travail ! / Alix Ratouis - Le Point - 28/01/2017
Quelques pistes documentaires pour aller plus loin :
L’influence des parents sur le processus d’orientation professionnelle : approche pluridisciplinaire / Léonie Liechti
Aspirations scolaires des parents et décrochage scolaire : le rôle du soutien des parents et des aspirations des adolescents / Hélène Castaing-Jordan
OCTOBRE Sylvie, JAUNEAU Yves, « Tels parents, tels enfants ? Une approche de la transmission culturelle », Revue française de sociologie, 2008/4 (Vol. 49), p. 695-722.
Approches de l’influence des parents sur le développement vocationnel des adolescents Parental influence on career development in adolescents / Helena Rebelo Pinto and Maria da Conceição Soares
VIGNOLI Emmanuelle, « Les décisions d’orientation scolaire à l’adolescence : avec qui partager ses expériences émotionnelles, comment et pourquoi ? », Enfance, 2011/4 (N° 4), p. 465-496.
FRANCIS Véronique, « La parentalité à l'épreuve de la scolarité. Approches parentales de l'offre d'accompagnement en contexte de transitions », Connexions, 2011/2 (n° 96), p. 161-178.
BERGIER Bertrand, FRANCEQUIN Ginette, « 6. Du rôle des parents », dans : La revanche scolaire. Des élèves multiredoublants devenus superdiplômés, sous la direction de BERGIER Bertrand, FRANCEQUIN Ginette. Toulouse, Érès, « Sociologie clinique », 2011, p. 95-108.
LAHAYE Willy, POURTOIS Jean-Pierre, DESMET Huguette, Transmettre. D'une génération à l'autre. Presses Universitaires de France, « Hors collection », 2007, ISBN : 9782130562849. Sommaire sur Cairn
Duru-Bellat Marie. Les choix d'orientation : des conditionnements sociaux à l'anticipation de l'avenir. In: Filles et garçons jusqu'à l'adolescence. Socialisations différentielles / Yannick Lemel, Bernard Roudet. Paris : L'Harmattan, 1999. pp. 117-150. (Débats Jeunesses, 4)
Dynamique éducative familiale et construction identitaire de l’enfant / Christine Bouissou
Transmettre de génération en génération / Nicole Péruisset-Fache "L'auteure analyse les tenants et les aboutissants de l'acte de transmettre des cultures, des valeurs, des connaissances ou encore des traditions. A l'ère de la mondialisation, elle constate aussi le démantèlement de la transmission."
Bonne journée.