Existe-t-il des documents sur l'ancien café du bâtiment de l'ancienne poste des Terreaux ?
Question d'origine :
Bonjour
Je souhaite savoir s'il existe des documents sur l'ancien café dont il ne reste plus que l'inscription découverte en levant les yeux sur le bâtiment de l'ancienne poste des terreaux, café qui devait être situé angle rues Édouard Herriot et Pizay il y a fort longtemps car toutes les lettres ne sont pas visibles.
Merci d'avance

Réponse du Guichet

Vous souhaitez savoir s'il existe des documents concernant le Café Poulet, qui se trouvait à l'angle de l'actuelle rue Édouard Herriot et de la rue Pizay. En compulsant nos collections de Presse Lyonnaise numérisées sur Numélyo, le Guide indicateur de la ville de Lyon et l'Indicateur Henry, qui sont des annuaires commerciaux, ainsi que les plans parcellaires des Archives Municipales de Lyon, nous pouvons retracer l'existence commerciale de cet établissement. Nous avons également fait des découvertes intéressantes grâce au site Généanet.
Bonjour,
En compulsant nos collections de Presse Lyonnaise numérisées sur Numélyo, le Guide indicateur de la ville de Lyon et l'Indicateur Henry, qui sont des annuaires commerciaux, ainsi que les plans parcellaires des Archives Municipales de Lyon, nous pouvons retracer l'existence commerciale de cet établissement. Nous avons également fait des découvertes intéressantes grâce au site Généanet.
Au fil de nos recherches, nous avons découvert que les propriétaires de ce "Café Poulet" s'appelaient Charles Ambroise François (Carlo Ambrogio Francesco) Togni et Marie Lucresse Poulet. Monsieur Togni est né en 1797 en Suisse, à Aquila. Et Marie Lucresse Poulet est née en 1787 à Lyon, dans la paroisse d'Ainay. Ils se sont mariés en 1824 et ont eu deux enfants, dont un qui n'a pas survécu. Monsieur Togni est noté comme "cafetier et fabricant de chocolat, rentier" dans Généanet. Il décèdera en 1868, à l'âge de 70 ans.
Aux 18e et 19e siècle, les cafés ne se résumaient pas aux débits de boissons classiques. Certains établissements, assez luxueux, s'établissaient en tant que cafetiers chocolatiers.
Au XVIIe siècle, l’ouverture de l’Europe à d’autres continents entraîne l’apparition de nouvelles boissons dont l’usage touche d’abord les milieux aisés ainsi que de nouveaux lieux de consommation et de distinction sociale, les cafés. Entre plaisir, sociabilité et médecine, le thé, le café, le chocolat se démocratisent lentement jusqu’au début du XXe siècle. C’est le café qui connaît le plus grand succès, mais sous la forme d’ersatz accessibles à une large population.
Revue d'Alsace, n°137, 2011, Les boissons de salon : thé, café, chocolat
À Lyon, en 1835, ils étaient quatre cafetiers chocolatiers renommés, avec en numéro un Casati, puis Togni Poulet, Bianchinni et enfin Bianchi. On peut lire dans un article de la revue La Vie Lyonnaise daté du 24 octobre 1868 :
En 1835, on ne comptait à Lyon que quatre établissements en renom, fabricant le chocolat: Casati, Toni Poulet, Biancchini, et Bianchi. Plus tard, ce genre de consommation ayant considérablement augmentée, les fabriques se multiplièrent et tout le monde se mit à confectionner le produit auquel Menier doit sa célébrité.
Les premières traces de l'existence du commerce du couple remonte à 1827. Le commerce semble se situer à ce moment là rue Lafont, actuelle rue Joseph Serlin, parallèle à la rue Pizay. En 1823, ils étaient d'ailleurs domiciliés au 2, rue Lafont.
Dans nos collections Presse Lyonnaise numérisées, dans le journal Le Précurseur du jeudi 26 juillet 1827, on peut lire :
Avis: Mr Toni Poulet,chocolatier, rue Lafont, joint aux nombreux journaux de la capitale, et à ceux de notre ville, qu’on lit dans son établissement, la Gazette Allemande d’Augsbourg.
La mention "Mr Toni Poulet" dans cet article, comme dans d'autres, nous a induit en erreur...nous pensions au début qu'il s'agissait du prénom et nom du propriétaire, Toni Poulet.
Un peu plus tard, en 1829, un court article nous informe d'un larcin exécuté dans l'établissement :
Un jeune homme très bien vêtu entra hier au café Poulet, rue Lafont, se fit servir une tasse de chocolat, et avant d’avoir achevé son déjeuner, se leva précipitamment, comme s’il fut rappelé une affaire pressante, paya et sortit. Cette menée parue singulière, et on ne tarda pas à reconnaître qu’une cuiller de composition avait été substituée à celle d’argent qui faisait partie du service. Des vols de cette nature ont été commis dans plusieurs autres cafés.
Nous pouvons à ce moment là imaginer que le standing de l'établissement était élevé, avec service en argent et clientèle "très bien vêtue".
En 1840, un autre article nous donne cette même indication d'établissement luxueux fréquenté par une clientèle aisée :
«Il a été perdu une paire de lunettes en or, étui vert, du café Togni Poulet, rue Lafont, à la rue Saint-Côme. La rendre à la lithographie de la dites rue»
On remarque également que l'établissement se situe toujours rue Lafont à cette période.
Puis, dans le Guide indicateur de la ville de Lyon de 1867, on retrouve mention du Café Poulet, mais cette fois-ci 3, rue de l'Impératrice, qui deviendra ensuite la rue de l'Hôtel de Ville, et aujourd'hui la rue Édouard Herriot. À l'emplacement de notre fameuse inscription gravée dans la pierre que vous avez photographié.
Page 137, on lit «Rue de l’Impératrice, 3, Allegranza, Café Poulet» et page 330 «Allegranza, chocolatier, 3 rue de l’impératrice». Il semble donc que le nom de l'établissement ait changé pour devenir Allegranza, Café Poulet, Chocolatier.
Nous pouvons imaginer que Mr Togni s'est soit associé un peu plus tôt avec Mr Allegranza, soit il a revendu son commerce à ce monsieur.
Dans le Journal de Lyon du jeudi 17 avril 1873, on lit :
Séquestre Allegranza:
Deuxième avis. Me Galliot, avoué à Lyon, y demeurant, quai de la Pêcherie, n°11, séquestre de la succession du sieur Charles Antoine Allegranza, qui était cafetier à Lyon, rue de l’Hôtel de ville, 3, prévient toute personnes qui serait créancière dudit sieur Allegranza, de produire de suite en ses mains le détail de sa créance accompagnée des titres. Passé le délai de quinzaine, à compter du présent avis, Me Galliot procèdera à la répartition des deniers versées en ses mains, entre les créanciers connus ayant produit, les autres seront forclos.
À cette période, la rue de l'Impératrice est bien devenue la rue de l'Hôtel de Ville, et nous sommes toujours au numéro 3.
Lorsque l'on effectue une recherche sur Généanet, nous trouvons bien un Charles Antoine Allegranza, né en 1811 à Lyon, et décédé le 29 décembre 1869, à l'âge de 58 ans. Dans le faire-part de décès, il est indiqué que les funérailles auront lieu le 31, et que le départ du convoi se fera au domicile du défunt, au 3 rue de l'Impératrice. C'est donc entre 1869 et 1873 que la rue a changé de nom.
Il semble donc qu'au moment de son décès en 1869, Monsieur Allegranza était seul propriétaire du commerce , puisque la famille l'a mis en vente le commerce.
Monsieur Togni est décédé un an avant Monsieur Allegranza. Le commerce "Café Poulet" a certainement disparu dans cette péiode, 1868/1869.
Pour finir, voici un extrait de La tribune de Lyon / «Qu’a fait la famille Casati à Lyon ?» La rédaction - 11 décembre 2022
Les Casati, au 18e siècle, à Lyon «se lance dans la chocolaterie et en fait son activité complémentaire. Après la Guillotière, la famille ouvre un second magasin rue du Bât-d’Argent, qui comprend un cabinet pour dames et un atelier de fabrication. Le troisième sera rue Impériale (actuelle rue de la République), et sera considéré comme l’un des meilleurs restaurants de Lyon au milieu du XIXe siècle, où se réunissaient les habitués autour d’une tasse de chocolat chaud traditionnel, de glaces, mais aussi de tournedos et sole meunière.» «Des fabricants de chocolats connus à Lyon: Dans leurs plus belles années, cette popularité fait figurer le nom des Casati parmi les fabricants de chocolat de renom à Lyon, avec Toni Poulet, Bianchini et Bianchi. Malheureusement, les choses prennent brusquement un autre tournant en juin 1894, lorsque le président de la République, Sadi Carnot, est assassiné à Lyon par l’anarchiste italien Sante Caserio. Furieuse, la foule s’en prend à tous les établissements tenus par des Italiens. Les restaurants Casati sont saccagés et incendiés : Isaac, dernier descendant de la famille, n’a d’autre choix que de les fermer définitivement, laissant émerger de nouveaux chocolatiers lyonnais.»
Daphnée Capaces
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