Quelle est la signification du vers d'un poeme d'Aragon "j'arrive où je suis étranger" ?
Question d'origine :
Bonjour, sauriez-vous me dire comment l'on peut traduire le sens d'un vers d'un poeme d'Aragon "j'arrive où je suis étranger" chanté par Jean Ferrat? Il s'agit de l'expression "le coeur change avec le chardon" dans la 2eme strophe qui dit: demain qu'importe et qu'importe hier, le coeur change avec le chardon, tout est sans rime ni pardon.
En vous remerciant d'avance pour votre réponse.
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Réponse du Guichet
Le poème d'Aragon chante avec nostalgie le caractère éphémère de la vie. le pays étranger dans lequel arrive le poète, c'est la vieillesse.
Bonjour,
Le poème d’Aragon chante avec nostalgie le caractère éphémère de la vie. Le pays étranger dans lequel arrive le poète, c’est la vieillesse. Selon notre interprétation, le vers "le cœur change avec le chardon" décline, là encore, une variation sur le thème du temps qui passe. A savoir, tel le chardon piquant, désagréable, le cœur finit par s’endurcir sous l’effet des peines de la vie. D’ailleurs, le vers suivant, "Tout est sans rime ni pardon" confirme ce sentiment d’amertume.
A défaut d’un livre qui analyse l’œuvre d’Aragon, et spécifiquement ce poème, nous vous recommandons la biographie de Philippe Forest (2015).
Philippe Forest nous propose d’ailleurs un éclairage pertinent et amusant sur l’adaptation en chansons des poèmes de Louis Aragon.
"Il n’est pas exagéré, je crois, de dire qu’au cours du dernier demi-siècle Aragon a été davantage écouté que lu. On aurait tort de s’en désoler car ses livres auraient été moins lus si ses vers avaient été moins écoutés. Il a dû se trouver un grand nombre de personnes à faire l’acquisition de La Diane française, du Roman inachevé ou des Poètes pour y retrouver les paroles de ce qu’elles avaient d’abord cru être une chanson de Georges Brassens, de Léo Ferré ou de Jean Ferrat. L’album dans lequel ce dernier réunit en 1971 les principaux poèmes d’Aragon qu’il avait mis en musique s’est écoulé, dit-on, à deux millions d’exemplaires. Soit, à lui seul, presque autant que tous les livres d’Aragon publiés aux éditions Gallimard, tous titres et toutes éditions confondues, dont s’étaient vendus jusqu’en 2014 deux millions et demi d’exemplaires." (p 680)
Si Aragon accueillit plutôt favorablement cette reconnaissance, il put aussi s’agacer parfois de "l’espèce d’usurpation et de dépossession qu’impliquait la chose et qui faisait qu’on finissait par attribuer à Ferré, par exemple, des poèmes qui, après tout, étaient quand même les siens ! Et de s’en amuser aussi. Daniel Mesguich raconte comment Aragon, quand Antoine Vitez le lui présenta à Avignon, se plaisait à signer Léo Ferré quand les festivaliers l’abordaient et lui demandaient un autographe ! " (p 688)
Bonne journée,