Question d'origine :
Est-ce que chacun de nous dans son être et donc dans sa vie, dans son comportement personnel a des aspects positifs et des aspects négatifs-chacun fait de bonnes choses mais aussi de mauvaises choses car cela fait partie de notre être de ne pas avoir que du positif?
Réponse du Guichet

Aussi subjectives et modulables soient les notions de positif et négatif en termes de comportements et "aspects" chez les humains, la dualité de présence de ces deux pôles éthiques relève effectivement d'un caractère très humain.
Bonjour,
Il faudrait premièrement et avant tout définir les notions d'aspect positif et négatif chez l'humain. Malheureusement, si cette tâche était menée à complétion avec ne serait-ce qu'une teinte d'universalité ou de finitude dans sa réponse, cela nous prendrait des mois voire des années. La discipline de recherche autour la morale, s'appelle l'éthique. La morale peut être définie comme la science du bien et du mal. Si durant des siècles de réflexion ces sciences ne sont pas devenue obsolètes ou n'ont pas trouvées de réponse finale, c'est bel et bien parce qu'il n'en existe pas. Concernant l'histoire de la morale nous vous conseillons cet ouvrage de Nicolas Journet.
Si toutefois nous parvenions à synthétiser l'étendue des possibilités, la réponse ne nous serait pas moins incomplète, à moins d'avoir rendu compte de la variabilité de ces notions d'une époque à une autre, d'un pays à un autre, d'une culture à une autre ou encore d'une personne à une autre au sein d'une même société. L'approche de ces concepts du bien et du mal est différente selon le théoricien ou le chercheur. Elle est au même titre différente pour chaque personne, comme cela vous a été précisé dans cette précédente question du Guichet : La morale est-elle différente selon les personnes ?Cette même réponse fait aussi le lien avec une ancienne question que vous avez posée, elle aussi pertinente pour approcher la naissance de la moralité, à l'échelle individuelle cette fois ci : Est-ce que tout le monde a un code moral personnel ?
Toutes les réponses à vos précédentes questions posées sur le Guichet permettent, nous semble-t-il de répondre à cette ambivalence du bien et du négatif. Dans "Est-ce qu'il existe vraiment des gens bons ou mauvais ?" nous vous citions un article de Cédric Enjalbert intitulé Les bons, les brutes et les truands. Permettez-nous de le citer à nouveau ici, en ce qu'il est plus que pertinent :
Ne vous est-il jamais arrivé de vouloir bien faire et de finir par mal agir, d’avoir une intention qui rate sa cible ou de blesser sans le vouloir ? Platon attribue d’abord cette expérience commune à une forme d’aveuglement, qui nous fait manquer notre but. Mais le philosophe va plus loin. Selon lui, même ceux qui semblent objectivement vouloir le mal le font en se trompant d’objet : pensons aux autocrates et aux tyrans qui peuvent, par exemple, avoir une certaine idée de la grandeur de la nation, nourrir des rêves de puissance ou vouloir renforcer leur empire. Ces méchants hommes pensent bien faire mais se fourvoient. Ce sont surtout des ignorants. Comme le rappelle Socrate, « il est évident par conséquent que ceux-là ne désirent pas le mal, qui ne le connaissent pas comme mal, mais qu’ils désirent ce qu’ils prennent pour un bien, et qui est réellement un mal ; de sorte que ceux qui ignorent qu’une chose est mauvaise, et qui la croient bonne, désirent manifestement le bien. N’est-ce pas ? » Voici en substance le raisonnement de Platon, que Socrate expose face à Ménon dans le dialogue du même nom : tout le monde veut être heureux, or, pour être heureux, il faut bien agir, donc personne n’agit mal en connaissance de cause. Le philosophe en conclut que « nul n’est méchant volontairement » – ce serait tout simplement paradoxal.
Vous pouvez également relire ces réponses qui traitent du même sujet : Les gens très mauvais ont-ils un très bon côté en eux ?, ou encore Est ce que les gens violents ont un bon coeur ?. Au même titre que la réponse mentionnant l'article de Cédric Enjalbert, les différents éléments qui vous ont été apportés permettent de confirmer qu'il n'existe pas uniquement des êtres aux aspects purement positifs ou purement négatifs. Si tant était que cette morale soit simplement absente de certaines personnes, court-circuitant ainsi ces questionnements autour du bien et du mal, nous vous invitons à reparcourir ces autres questions du guichet : Y a-t-il des personnes qui n'ont aucune morale ?, et aussi Est-ce que la majorité des personnes ont une moralité ?
Vous trouverez dans toutes ces réponses de nombreux travaux vous permettant d'étancher votre soif de connaissance sur la morale, à savoir :
- Par-delà le bien et le mal / Frédéric Nietzsche
- Théorie du mal, théorie de l'amour / Alain Badiou ; texte établi par Véronique Pineau
- Etre quelqu'un de bien : philosophie du bien et du mal / Laurence Devillairs
- La méchanceté / Michaël Foessel, Adèle Van Reeth
- La pensée mauvaise : essai philosophique / Bettina Stangneth
- Psychologie du bien et du mal / Laurent Bègue
- Psychologie du jugement moral : textes fondamentaux et concepts / Laurent Bègue, Laurent Bachler, Catherine Blatier, Nathalie Przygodzki-Lionet
Bonnes lectures,