Les alentours du parc Montel ont-ils été le lieu d'affrontements militaires ?
Question d'origine :
Bonjour ! :)
J'ai retrouvé un bouton en métal dans la terre au 27 rue du bourbonnais dans mon parc privé qui est le prolongement du parc Montel dans le 9e arrondissement. Sur ce bouton est marqué "infirmier militaire" et selon mes recherches c'est un bouton uniforme d'infirmier qui était porté par ceux ci entre 1875 et 1914. La question que je me pose est : y a t-il eu un affrontement militaire a cet endroit a cet époque ( avant la 1ere guerre mondiale ) ou un camp militaire a l'emplacement de l'actuel parc Montel?
Merci pour vos recherches et votre réponse

Réponse du Guichet

Les terrains où se trouve aujourd'hui le parc Montel, dans le quartier de Vaise (Lyon 9ème), étaient historiquement ceinturés de nombreux bâtiments militaires et le XIXème siècle symbolise l'apogée de ces constructions fortifiées. Mais celles-ci sont rapidement tombées en désuétude et les espaces qu'elles occupaient ont été réemployés pour mieux structurer l'aménagement urbain de la ville. A ce titre il n'est pas étonnant que l'on puisse trouver des insignes militaires dans le quartier. Le musée du patrimoine militaire de Lyon pourrait vous aider à identifier ce bouton !
Bonjour,
Le parc Montel est un parc situé dans le quartier de Vaise (9ème arrondissement). Il a été acheté par la ville de Lyon en 1969 aux Blanchisseries lyonnaises.
Si le parc ne semble pas avoir entretenu de lien particulier avec l'armée, le quartier de Vaise (rattaché à la ville de Lyon en 1852), de part sa position surplombante, était un lieu de choix pour la construction de forts militaires. Dans un espace restreint, plusieurs places fortes ont été construites dans les années 1830-1840 pour protéger la ville des invasions ennemies (Autrichiennes, savoyardes etc. mais qui ne vinrent jamais etc.). Ainsi le fort de la Duchère, le fort de Vaise, le fort de Loyasse ou encore le fort Saint-Jean, sur la presqu'île de l'autre côté de la Saône, entouraient les extrémités du parc (ou du moins le terrain qu'il occupait) et composaient une partie de la ceinture fortifiée imaginée selon les plans du général-comte de Fleury (p. 37 - Connaître son arrondissement, le 9ème).
Petite focale sur l'histoire du fort de Vaise, peut-être le plus important du quartier et dont les fortifications sont encore visibles. Aujourd'hui le site est privatisable et sert à accueillir de nombreux événements :
Le Fort de Vaise : Sa construction débute en 1834 et s'achève en 1848, il est considéré comme obsolète seulement quelques années après sa construction et ne sera jamais utilisé pour la guerre. Juché au nord de la colline Fourvière, son implantation lui permettait de croiser le feu avec le fort Saint-Jean et le Fort Loyasse. Il reste la propriété de l'armée jusqu'en 1927, date à laquelle il fut racheté par la ville. Assez petit, le fort ne pouvait héberger qu'une soixantaine d'hommes environ.
Source : L'avenir des forts militaires de Lyon - Marine Roubaud (Architecture Nancy, 2017)
Pour une description détaillée de l'enceinte militaire qui entourait les quartiers périphériques de la ville :
Cette enceinte décrit en demi-cercle sur la rive droite de la Saône, de la Quarantaine à Vaise, et se trouve protégée par des forêts isolés extérieurs ; le 9ème en hérite de la partie septentrionale. Juste à la limite avec le 5ème se met en place le fort de Loyasse, terminé en 1842. En partie enterré, il peut abriter une garnison de 500 hommes. Il se prolonge vers le nord par le front de Vaise, beaucoup plus petit, qui occupe l'arrête rocheuse séparant la dépression de Vaise de la vallée de la Saône. Un mur de pierre, percé de notes, relie les deux forts. Pour barrer encore plus efficacement la vallée de la Saône, l'emplacement du château de l'Archevêque reçoit la batterie de Pierre-Scize prolongée par un mur qui longe toujours la montée du Greillon. Au bord de l'eau on construisit plus tard le magasin à fourrages qui est toujours très prégnant dans le paysage actuel. Enfin, en position détachée se met en place la commune de Saint-Didier-au-Mont-d'Or et sur le 9ème (le 5ème à l'époque), le fort de la Duchère qui couvre la partie interne de l'enceinte. Sur des terrains disponibles dès 18, on le bâtit de 184 à 1851.
Source : Connaitre son arrondissement - le 9ème (Éditions lyonnaises d'Art et d'Histoire) (p.37)
L'article de Marie-Clotilde Meillerand - Les terrains militaires comme ressort de l’urbanisation au XXesiècle dans l’agglomération lyonnaise (2011, sur Openedition) est essentiel pour comprendre la dynamique urbaine lyonnaise au XIXème siècle, de la construction de ses lignes défensives au re-dessin des espaces urbains laissés vacants par l'abandon des terrains militaires à partir de 1880.
La première ceinture de défense est donc progressivement abandonnée aux profits de nouveaux axes structurants au développement de la ville. Mais une deuxième vague de fortification est engagée à la fin du XIXème siècle. Celle-ci s'inscrit dans une dynamique nationale plus globale, la chercheuse rappelle que plus de 450 000 000 de francs sont investis en France en 10 ans (1874 - 1885) pour renforcer les fortifications de plusieurs grandes villes.
Mais cette dynamique s’essouffle au début du XXème siècle et la priorité est donnée au réaménagement urbain :
En effet, à partir des années 1910, les impératifs d’aménagement et d’extension se font de plus en plus sentir dans les grandes villes françaises. Lyon n’échappe pas à la règle. L’ingénieur en chef de la ville de Lyon, Camille Chalumeau, mène de premières réflexions sur un plan d’aménagement d’embellissement et d’extension (PAEE) de la ville de Lyon dès 1912. Après la Première Guerre mondiale, une loi est votée imposant aux villes de plus de 10 000 habitants la réalisation d’un PAEE. Les services municipaux en charge de ces études à Lyon dressent l’état des lieux des terrains urbanisés, des équipements nécessaires, des projets d’aménagement… Au cœur de la cité, les territoires « protégés » comme le sont les terrains militaires deviennent des enjeux de taille. En 1919, les édiles lyonnais s’inscrivent dans la dynamique parisienne et profitent de l’inscription à l’ordre du jour du Parlement du déclassement des fortifications parisiennes pour y être associés expliquant que « Lyon étouffe dans son corset suranné de vieux remparts. Sa grandeur ne doit plus souffrir de la servitude militaire »20 et précisant : « Notre ville, qui se développe jour après jour, a besoin d’être débarrassée d’un système archaïque de protection qu’aucun intérêt ne justifie plus. Le déclassement de nos fortifications couvrirait la construction des terrains indispensables. Il nous permettrait de poursuivre l’exécution de notre plan d’extension. Il serait aussi utile aux communes voisines qu’à nous même »21. Le déclassement des terrains militaires est alors présenté comme un élément indispensable de la réalisation et des projets de PAEE car « le problème est plus que mûr, et je reconnais, de la façon la plus nette, qu’il faut en finir avec ces vieilles murailles, qui privent les cités de leur faculté nécessaire d’expansion et les gênent au point de vue de l’élégance, de la commodité et de l’hygiène »22.
14C’est dans cette dynamique que les ouvrages militaires de la première ceinture situés sur la rive droite de la Saône sont déclassés par la loi du 29 juillet 1920 par son article unique qui précise :
15« Sont déclassés et rayés du tableau des places de guerre, les ouvrages dépendant de la place de Lyon désignés ci-après :
l’enceinte de Fourvière
le fort de la lunette de Ste Foy
le fort St Irénée
le fort de Loyasse et sa lunette
le fort de Vaise
le fort de la Duchère
le fort de St Jean
le fort de Caluire
le fort de Montessuy et ses redoutes (Caluire)
l’enceinte de la rive gauche du Rhône.
Source : Les terrains militaires comme ressort de l’urbanisation au XXesiècle dans l’agglomération lyonnaise - Marie-Clotilde Meillerand.
Pour répondre à votre question : Évidemment nous ne pourrons retracer l'histoire de cet insigne militaire ou identifier spécifiquement l'individu qui l'a porté. En revanche, l'aménagement défensif des quartiers entourant le terrain aujourd'hui occupé par le parc Montel, au milieu et à la fin du XIXème siècle, pourrait aisément expliquer votre découverte. De nombreuses manœuvres militaires et d'incalculables déplacements de bataillons ont nécessairement eu lieu sur ce territoire historiquement à l'abri des grands conflits urbains ou des guerres pour la période qui nous intéresse. Et il ne serait pas étonnant que d'autres objets émaillent les sols du quartier de Vaise !
Peut-être devriez vous transférer votre découverte aux équipes du musée du patrimoine militaire de Lyon et de sa région. Peut-être seraient-ils capables d'identifier avec précision votre bouton en l'associant à une époque ou à un régiment particulier ?
Bonne journée,
DANS NOS COLLECTIONS :
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Je cherche des informations sur cet insigne ayant appartenu...