Quels sont les auteurs sérieux concernant les mystères des construction au Pérou ?
Question d'origine :
Bonjour,
Quels sont les auteurs sérieux d'informations concernant les mystères des construction par des grands blocs de pierre tels les monolithes de Baalbek, de la cité de Cusco au Pérou ou la forteresse inca de Sacsayhuaman par exemple.
Comment ont ils taillé ces pierres, les ont transportées etc. Ou en est la recherche scientifique actuelle.
Cordialement
Réponse du Guichet
La cité de Baalbek au Liban et la forteresse de Sacsayhuaman au Pérou ont pour dénominateur commun la démesure de leurs fondations architecturales, basées sur le façonnage, la tractation et l'empilement de blocs de pierre monolithiques gigantesques. Des archéologues et historiens spécialisés ont produit de nombreuses hypothèses afin d'expliquer leur élaboration mais celles-ci se heurtent aujourd'hui encore à d'importants écueils. Nous vous proposons quelques pistes d'investigation.
Bonjour,
D’innombrables interrogations perdurent concernant les méthodes d'extraction, de façonnement et de tractation de ces immenses blocs monolithiques nécessaires à la construction de ces sites mythiques. Alors que les technologies les plus récentes éprouveraient les plus grandes difficultés à reproduire ces réalisations, par quels moyens ces civilisations anciennes (évoluant à des époques et dans des paradigmes sociaux-techniques distincts) sont-elles parvenues à entreprendre ces chantiers pharaoniques ? Il existe de nombreuses suppositions mais rien n'est encore tranché. En particulier pour Baalbek dont les ruines contiennent parmi les plus longs monolithes jamais réalisés par l'Homme. D'un poids total de plus de 1000 tonnes, La pierre de la femme enceinte à Baalbek (ancienne Heliopolis, dans l'actuel Liban) en est l'exemple frappant et de nombreux mystères entourent encore sa confection.
Ce paragraphe extrait du site pierres-info résume en quelques lignes la démesure des chantiers entrepris à Baalbek, et souligne notre incapacité aujourd'hui encore à comprendre comment ces pierres ont été travaillées et disposées :
Les trois pierres les plus colossales sont connues sous le nom de Trilithon. S'il était possible de les dresser, elles atteindraient la hauteur d'un immeuble de six étages. La plus grande d'entre elles mesure 18 x 4,20 x 3,60 mètres. Soit un bloc de 270 mètres cubes pesant près de 800 tonnes...
Quelques ouvrages et articles trouvés sur internet nous permettent de répondre à certaines questions techniques, mais de nombreuses parts d'ombre demeurent :
L'historien et archéologue Peter Eeckhout dans un article intitulé "Dans les pas des Incas. Architecture précolombienne et syntaxe de l’espace" (CLARA, 2013, p. 61 à 79) décrit les gigantesques édifices incas d'une extrême complexité architecturale, et cite notamment la forteresse Sacsayhuaman de Cuzco. Il explique de quels modestes moyens techniques disposait l'empire :
En outre, il n’y avait pas non plus ici d’animaux qui puissent être montés, pas d’utilisation de la roue pour des charrettes, des carrioles ou autres, à cause pense-t-on de la topographie particulière des Andes. Par conséquent, et l’on rejoint là le thème de ce dossier, le seul moyen de locomotion terrestre à l’époque préhispanique, c’est la marche. On se trouve ainsi face à des sites monumentaux, parfois très complexes, à des structures qui elles-mêmes le sont aussi, et à un transit exclusivement piéton : comment l’approcher ? Tel est le défi que les archéologues tentent de relever, avec l’aide des architectes contemporains, comme nous allons le voir.
Premier élément grâce à Patrice Lecocq, maître de conférence en archéologie andine à l'Université Paris 1, dans une réponse accordée à un lecteur du magazine Sciences et Vie en 2020, pour qui les Incas se fournissaient d'abord en pierre dans des carrières situées à proximité des constructions avant de transporter ces blocs grâce à la force de centaines d'hommes. Les pierres étaient ensuite retravaillées grâce à des ouvriers spécialisés qui utilisaient de l'hématite en guise de marteau. Des galets de plus en plus petit étaient ensuite employés par précision, jusqu'à utiliser du sable pour polir et parfaire la découpe. Celle-ci est réputée si précise, qu'une "lame de rasoir ne pourrait s'intercaler entre deux pierres" rendant caduque l'usage du mortier. Une manière de se prémunir notamment des tremblements de terre. L'historien rappelle enfin que plusieurs semaines et même des mois étaient parfois nécessaire au façonnage d'une seule pierre !
L'encyclopédie en ligne World History consacre un article à l'architecture inca et s'intéresse en particulier à l'acheminement ainsi qu'au martelage des pierres de Sacsayhuaman. Les marques laissées sur les blocs seraient la preuve que des coups de marteau étaient assénés pour façonner la pierre. Il indique que les blocs auraient ensuite été déplacés grâce à des cordes, des rondins, des poteaux, des leviers ou des rampes. Les analyses rejoignent celles de Peter Eeckhout :
Le fait que les pierres étaient grossièrement taillées dans les carrières puis retravaillées à leur destination finale est clairement indiqué par les exemples inachevés laissés dans les carrières et sur les différentes routes menant aux sites de construction. Le processus méticuleux consistant à poser, enlever, redécouper puis reposer des blocs pour qu'ils s'emboîtent exactement les uns dans les autres était lent, mais des expériences ont démontré qu'il était beaucoup plus rapide que ce que les spécialistes pensaient auparavant. Même ainsi, il aurait fallu de nombreux mois pour produire un seul mur. L'emboîtement des blocs et les murs inclinés rendent les bâtiments incas extrêmement résistants, mais pas à l'abri des dommages causés par les tremblements de terre. 500 ans de tremblements de terre ont fait remarquablement peu de dégâts aux structures incas laissées dans leur état complet.
Pour aller plus loin, nous vous recommandons la lecture de l'article ainsi que sa bibliographie (anglophone !). Tout comme la lecture de ces ouvrages disponibles à la BmL :
Andes précolombiennes / Adine Gavazzi ; photographies Beatrice Velarde ; traduit de l'italien par Nathalie Scholz (Paris : Hazan, 2010).
L'Amérique latine précolombienne : des premiers peuples à Tupac Amaru : dernière glaciation-XVIe siècle / Carmen Bernard (Belin, 2023) (Emprunté au moment de la rédaction de cette réponse).
- Des ouvrages plus généraux sur la civilisation inca pourraient également vous être utiles.
Ce documentaire amateur sur Youtube, consacré à la réalisation technique de la forteresse de Sacsayhuaman, à l'air de s'attirer les éloges de nombreux passionnés pour son sérieux. A vous d'évaluer la confiance que vous lui accordez.
En ce qui concerne le site de Baalbek, vous pouvez parcourir cet article sur Persée : A propos du trilithon de Baalbek. Le transport et la mise en œuvre des mégalithes de Jean-Pierre Adam (Syria. Archéologie, Art et histoire Année 1977 54-1-2 pp. 31-63).
Bien que daté, il revient en profondeur sur le goût des cultures et des civilisations méditerranéennes pour le mégalithisme et les constructions titanesques. A compter de la page 54 vous trouverez des explications techniques, des photos et des schémas représentant les outils/machines probablement utilisés.
Plus récemment, vous pouvez vous appuyer sur cet article du site Sacredsites - World Pilgrimage Guide qui revient sur les nombreuses hypothèses envisagées par les historiens et archéologues pour déplacer et façonner les pierres monolithiques de Baalbek. Mais n'espérez pas en obtenir une réponse définitive à la question, les suppositions sont multiples et demeurent, pour l'heure, invérifiables.
Pour ce qui à trait au bâtit romain, voici enfin quelques ouvrages récents qui s'intéressent à votre sujet sans être spécifique à Baalbek. Ils présentent avec détails les méthodes et matériaux employés par les romains pour construire leurs plus célèbres infrastructures : aqueducs, thermes, monuments etc. :
La construction : les matériaux durs : pierre et terre cuite / sous la direction d'Alain Ferdière ; Jean-Claude Bessac, Odette Chapelot, Raffaël De Filippo et al. (Errance, 2020)
La construction romaine : matériaux et techniques / Jean-Pierre Adam (A et J Picard, 2017)
En espérant vous avoir apporté quelques pistes,
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