Question d'origine :
Bonjour, J'ai retrouvé ce document dans des archives familiales. On m'a toujours dit que cela n'avait plus aucune valeur. Mais je serais très intéressé pour comprendre exactement de quoi il s'agit:
- combien a pu coûté l'achat de ces "obligations" à l'époque (années 1910)?
- Et qu'est-ce qui s'est passé ensuite?
On parle beaucoup de "l'emprunt russe" qui s'est effondré en 1917, mais là il s'agit de l'État de Minas Geraes: pouvait-il s'agir d'investissement dans des mines au Brésil...?
- Ou alors cela a-t-il perdu toute valeur au cours de la crise de 1929?
- ...
Cela me permettrait de mieux comprendre certains éléments de mon histoire familiale...
Merci d'avance


Réponse du Guichet

L’obligation par coupons que vous détenez était une des émissions d’emprunt de l’État du Minas Giraès (ou Girais selon les orthographes) qui devait servir à financier des infrastructures (eau, ferroviaire…) pour le développement du Brésil. Cette obligation n’a en effet plus de valeur proprement financière. En revanche, elle peut intéresser les collectionneurs, qui seront d’ailleurs à même de compléter les éléments d’information que nous vous proposons.
Bonjour,
Tout d’abord, signalons qu'une obligation par coupon, fort similaire à la vôtre, se retrouve sur le site numistoria.com, boutique spécialisée sur la vente d’anciens titres de bourse. Le site précise :
« Le Minas Geraes, qui connut un important développement au XVIIIe siècle grâce à l’or et aux pierres précieuses qui y furent découvertes, est l’un des plus grands États du Brésil et le deuxième le plus peuplé après São Paulo.
Emprunt de Conversion de 120 millions de francs remboursable en 58 ans, divisé en 240.000 obligations, autorisé par la Loi du 22 septembre 1909.
Le paiement des coupons et le remboursement des actions devaient avoir lieu chez MM. Perier & Cie, 59 rue de Provence à Paris.
Titre signé par le Secrétaire d'Etat des Finances au nom de l’État de Minas Geraes.
Extrait de la Loi du 9 septembre 1909 au dos du titre.
Titre non annulé, avec coupons ».
Votre photographie des coupons donne deux informations utiles pour en apprendre plus sur l’histoire de cette obligation.
Comme précisé au verso, cette émission de dette de l’État du Minas Girais servait à « réaliser des améliorations dans les stations hydre-thermales où existent déjà des préfectures ». Un article (en portugais) de l'historien Pereira Da Silva, publié dans la Revista de historia, explique les enjeux de ces émissions pour les «collectivités» brésiliennes :
Il fait ainsi le point sur « l'entrée massive de capitaux français au Brésil entre 1905 et 1912, un phénomène qui a eu une importance majeure dans des secteurs d'infrastructure tels que les chemins de fer et les services urbains, car les chemins de fer, les États et les municipalités ont été les principaux emprunteurs de ces fonds. En 1910, point de départ de cette étude, "les prêts accordés au Brésil représentaient plus de 13 % des exportations de capitaux français" (Abreu, 1994, p. 101). Dans ce contexte, l'État du Minas Gerais a été particulièrement notable parmi les unités fédératives. En effet, en 1910, il a contracté un emprunt de 120 millions de francs, ce qui représentait 57,48 % du total des prêts réalisés aux États, parmi lesquels figuraient également le Maranhão, le Ceará, le Rio Grande do Norte et la Bahia. L'emprunt contracté par le Minas Gerais était le seul à bénéficier d'un taux d'intérêt de 4,5 %, tandis que les autres emprunts de cette année-là étaient réalisés à un taux de 5 % ».
« La relation intense et parfois obscure entre la concession de services publics, les membres du gouvernement et le capital privé étranger n'est pas une caractéristique exclusive de notre époque contemporaine. Dans l'histoire du Brésil, une telle relation est en réalité assez ancienne. Le capital originaire de la France a joué un rôle significatif dans le financement de projets d'infrastructure au sein des municipalités et des états brésiliens – comme l'illustre le cas de la Banco Hipotecário e Agrícola do Estado de Minas Gerais. Cependant, ce capital avait également un caractère spéculatif et manquait souvent de rigueur ».
Au global, «Les emprunts français, dans le cas du Minas Gerais principalement liés à Perier & Cie, ont été d’importantes sources de financement pour des services tels que les transports ferroviaires et les banques, ainsi que pour doter plusieurs villes d'améliorations urbaines, comme l'approvisionnement en eau et en électricité ».
[Traduction réalisée par un agent conversationnel Chat-GPT-4].
La banque Perier et Cie est à l’origine de ces émissions en France. Un article d’Hervé Joly, historien, brosse l'histoire de cette institution :
« La banque Perier n’avait plus, dans les années 1900, son aura d’antan. Les gérants ne siégeaient plus depuis 1868 au conseil de régence de la banque de France. Elle n’était plus qu’une banque d’affaires discrète offrant des services techniques à ses entreprises clientes. On la trouve gestionnaire financière d’obligations émises (Société minière de Montferrier en 1906), collectrice de fonds de souscriptions au capital […], dépositaire d’actions au porteur pour siéger dans les assemblées générales […], etc. Rien qui ne fasse les gros titres des journaux [..]. Dès avril 1910, quelques mois après l’arrivée de Bauer à la gérance, la banque Périer s’engage dans une importante émission publique, très largement annoncée dans la presse, pour 50 millions de francs d’obligations de la Compagnie des chemins de fer fédéraux brésiliens, destinée à lui permettre d’étoffer le réseau dans la région de Minas. L’opération, réalisée en une journée, est présentée comme un grand succès […]. Quelques semaines plus tard, la banque se charge de l’émission de 120 millions d’obligations pour l’Etat de Minas Geraès ; l’opération est renouvelée l’année suivante pour 50 millions…»
« Les opérations dans laquelle la banque s’est engagée ne s’avèrent pas […] une bonne affaire pour ses clients. Les obligations de l’Etat de Minas Geraès sont cotées 175 francs en dessous de leur cours d’émission et ne paient plus de coupons depuis juillet 1915 ».
Chaque coupon d’obligation valait 500 anciens francs soit un peu plus de 2200 € aujourd’hui selon le convertisseur de l'INSEE. Et en effet, il semble bien que ces obligations n’aient plus aujourd’hui aucune valeur financière officielle. En revanche, ils peuvent avoir une valeur pour les scripophiles, les collectionneurs d’anciens bons au porteur !
Aussi pour en savoir plus sur ce sujet et approfondir l’histoire de ce titre de bourse, nous vous conseillons de vous tourner vers ces collectionneurs :
Le site Numistoria, que nous avons déjà évoqué, met à disposition un portail : scripophilie.com qui permet de se familiariser avec le monde étrange des titres anciens.
Le site de l’ACTIF (Association des Collectionneurs de Titres Financiers)
Le portail sriponet.com qui dispose d’un forum où vous pourriez poser vos questions.
Bon courage pour la suite de vos recherches !